Bamona: «On disait de m oi que j’étais juste bon pour la P1»
Leslie Bamona fête aujourd’hui ses 28 ans. L’ancien Hutois et Soliérois est revenu sur le terrain de ses premières amours pour un entretien confidences.
Publié le 24-04-2021 à 06h00
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Leslie Bamona a aujourd'hui 28 ans! Douze ans après avoir découvert la Belgique, lui, l'habitant de Kasa-Vubu, une commune du centre de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo. «Mon père (NDLR: Willy Bamona, ancien joueur professionnel qui a notamment disputé pour le compte du Zaïre comme on l'appelait à l'époque plusieurs rencontres de qualification à la CAN 88) m'a proposé de le rejoindre en Belgique. Je ne l'avais jamais rencontré jusque-là, rembobine Leslie. Il était venu en Belgique, où sont nés mes deux frères Willy Junior et Willis, pour le foot. J'étais heureux au Congo, mais venir en Europe, où la vie est belle, était une chance pour moi.»
Le jeune Leslie quittait sa maman, Mamie, pour vivre l'aventure européenne. « Je n'étais jamais sorti de Kinshasa. Prendre l'avion me stressait donc très fort. J'ai d'ailleurs eu des crampes d'estomac tout le vol tellement j'avais peur, sourit aujourd'hui celui qui allait faire par la suite le bonheur du RFC Huy, Solières, Visé et enfin Heist. Les dames assises à côté de moi dans l'avion l'ont bien vu et m'ont beaucoup parlé pour me rassurer.» Après six heures de vol, Leslie Bamona foulait le sol belge. Un vrai choc climatique! «Je suis parti de Kinshasa qu'il faisait 35 degrés. À mon arrivée à Bruxelles, il devait faire -3 degrés. J'avais juste un pull, un jeans et des chaussures. Mon père, qui était avec ma tante, m'a fait croire qu'une voiture réellement en panne sur le parking était la sienne. Heureusement, c'était une blague, sa voiture était garée juste à côté», s'esclaffe Leslie, en Belgique depuis ce 9 février 2009.
Chez nous, le Congolais ne pouvait envisager faire un autre sport que du football, toute sa vie. «Je me rappelle comme si c'était hier du jour où ma mère m'a offert un ballon de foot. J'étais super content, car c'est difficile d'avoir un ballon de foot au Congo, tout le monde n'a pas les moyens, confie le joueur à la technique parfaite dans la rue. On jouait pieds nus et on ne se prenait pas la tête. On s'affrontait entre rues. Moi, j'habitais la rue de Bongandanga. Il y avait de bons joueurs dans ma rue et on gagnait souvent (sourire). À Kasa-Vubu, j'ai joué avec ou contre de très bons footballeurs, comme Kabongo Kasongo, qui évolue maintenant en D2 turque.»
L'histoire de Leslie Bamona est intimement liée à l'AS Kora. «Mon premier et unique club au Congo, dit-il. Je devais avoir neuf ans quand j'ai commencé là-bas. Mon entraîneur, Koko, faisait des études et recevait de l'argent de ses parents, qu'il mettait de côté pour acheter des vareuses… Il m'a aussi payé des chaussures de foot et me donnait parfois un peu d'argent. C'était mon entraîneur, mais aussi un grand frère pour moi. Il nous a inscrits dans un championnat où on affrontait des équipes d'autres communes de Kinshasa. C'est ainsi que tout a commencé pour moi. Maintenant, quand je sonne au Congo, tout le monde est content de ma réussite en Belgique, de me voir sur des vidéos. Or, à une époque, on disait de moi que j'étais juste bon pour la P1…»
Ne comptez toutefois pas sur Leslie Bamona pour se contenter du niveau, la Nationale 1, auquel il joue actuellement avec Heist. «À chaque fois que je parle avec des gens, on dit que c'est fini pour moi, que je suis trop vieux pour signer plus haut, confie celui qui vit aujourd'hui à Ampsin. Mais je sais que ma carrière n'est pas terminée, qu'elle va encore me réserver des surprises. Je demande juste à Dieu de me protéger en me donnant une bonne santé, rajoute-il, très croyant. Je suis chrétien depuis tout petit. Et tant que je jouerai au foot, j'y croirai. Je connais mes qualités et je sais qu'un jour, un club qui évolue plus haut me donnera ma chance», espère Leslie, dont le caractère a été forgé par des entraîneurs de la trempe d'Alain Dheur, Philippe Caserini, Stéphane Huet ou encore Stéphane Demets, son actuel coach à Heist. «'Case', c'était quelque chose, sourit l'attaquant, qui a fréquenté durant trois saisons avec Solières l'actuel coach de Stockay. Sur un terrain, on ne le voyait pas rigoler, il faisait son travail à fond. On courait beaucoup lors de ses entraînements, mais cela m'a forgé un caractère.» Et de belles expériences, parfois surprenantes de prime abord. «Vous voulez parler de ce fameux entraînement dispensé un dimanche à 7h du matin?, se marre notre interlocuteur. On avait perdu 2-1 la veille au soir contre Verlaine après avoir raté beaucoup devant le but. Le coach n'était vraiment pas content et nous l'a fait savoir à sa manière. Depuis mon arrivée en Belgique, j'ai toujours eu des coachs avec un fort caractère. C'est aussi le cas de Stéphane Demets, qui m'a fait progresser mentalement et tactiquement.»
Notamment sur le plan défensif. «En D2 ou D3 ACFF, la première année avec Visé, je me disais que je pouvais encore rattraper une erreur grâce à ma vitesse. Mais en Nationale 1, ce n'est plus possible, tout va plus vite. C'est à Heist que j'ai appris l'importance du repli défensif, assure-t-il. Je suis obligé d'être bien positionné pour défendre et attaquer. Stéphane Demets est le coach le plus complet que j'ai eu jusqu'à présent. Si je l'avais eu plus tôt comme entraîneur dans ma carrière, je jouerais plus haut à l'heure actuelle. » Est-il trop tard?