Tarik Tissoudali revient de loin et veut marquer son premier but de l'année contre le Standard : "Je ne jouerai dans aucun autre club belge que Gand"
Rétabli de sa grave blessure au genou, Tarik Tissoudali veut marquer son premier but de 2023 à Sclessin.
Publié le 06-05-2023 à 11h26
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Avec ses 27 buts la saison passée, dont 21 en Jupiler Pro League, Tarik Tissoudali (30 ans) était un des meilleurs attaquants de notre championnat. Sa rupture des ligaments croisés a gâché sa saison actuelle. Après huit mois de rééducation, le sympathique international marocain de Gand est enfin de retour sur les terrains. Et que le Standard soit prévenu : il a inscrit son dernier but à Sclessin, en juillet.
Il a marqué son seul but à Sclessin : “Le Standard est mon adversaire favori”
Quand on lui demande quel est son adversaire favori, Tissoudali sourit. “Cela doit être le Standard. Je crois que j’ai marqué plus de buts contre OHL (10), mais c’est en ajoutant les matchs pour la montée avec le Beerschot. J’en ai mis six contre le Standard ? Cela ne m’étonne pas. J’aime jouer contre des grands clubs, et je considère le Standard comme un grand. Et j’aime jouer dans des stades avec une grosse ambiance. Par contre, je ne sais pas si je serai dans le onze de base (il était titulaire contre Westerlo au détriment du buteur Gift Orban, qui n’a pas caché son mécontentement). Une équipe avec Orban, Cuypers et Tissoudali ? Non, je ne crois pas que c’est possible. Cela ferait peut-être rêver nos supporters, mais notre milieu de terrain serait trop peu peuplé. J’espère marquer mon premier but de l’année. Je me suis déjà créé des occasions dans les matchs précédents (5 montées au jeu, 2 titularisations), donc j’y crois.”
Sa rééducation : “Me plaindre ? J’ai vu un homme sans jambes…”
Le 30 juillet 2022, le monde de Tissoudali s’est effondré. En tentant d’éviter un tacle de Janssens contre Saint-Trond, il s’est arraché les ligaments croisés. “Le jour même, j’étais terriblement abattu. Le lendemain, quand j’ai vu un homme sans jambes à l’hôpital, je me suis dit que j’avais de la chance. Moi, je pourrais encore jouer au football. Après ma rééducation, j’ai même plus de puissance dans ma jambe, et je saute plus haut. Mais il me manque encore la finesse qu’il faut à un attaquant. J’en ai parlé avec Memphis Depay, qui a eu la même blessure. Lui, il était même revenu après trois mois et demi. Mais il lui a fallu trois ou quatre mois supplémentaires pour retrouver son ancien niveau. La période la plus dure de ma rééducation était celle de la Coupe du monde. Savoir que j’aurais pu faire partie de l’équipe nationale du Maroc a fait mal. J’étais en contact avec quelques joueurs, surtout les Néerlandophones comme Armabat (Fiorentina) et Aboukhlal (Toulouse). Je ne suis pas allé au Qatar, pour ne pas interrompre ma rééducation. Ma santé primait avant tout. Je serais allé pour la finale si nous avions battu la France. Et cette victoire contre la Belgique ? Elle ne m’a pas fait plus plaisir que nos autres victoires. J’aurais même aimé voir le Maroc et la Belgique au prochain tour.”

Son transfert : “Je veux aider Gand à être champion”
Ses 27 buts ne sont pas passés inaperçus, la saison passée. Plusieurs grands clubs belges – dont Anderlecht – étaient intéressés. Et à l’étranger, on parlait de Valence et d’Al-Rayyan, au Qatar. “C’est correct. Mais pendant ma rééducation, Gand m’a fait resigner un nouveau contrat, jusqu’en 2026. Ce geste m’a donné des ailes. Je fais partie du projet pour les années à venir. Je veux aider Gand à être champion ou à gagner la Coupe. On s’est mis d’accord que je ne partirai pas avant la dernière année de mon contrat. Et si je pars, ce ne sera certainement pas vers un club belge. La saison passée, déjà, je trouvais que nous étions une des meilleures équipes du championnat. Je ne vois pas dans quel autre club je pourrais progresser. À 33 ans, je pourrais envisager un transfert au Moyen-Orient. À cet âge-là, c’est normal de penser à l’argent. Je me souviens avoir conseillé à un joueur africain – je ne citerai pas son nom – d’accepter une offre financière très intéressante, même si la destination n’était pas très attrayante. Dernièrement, il m’a dit qu’il avait fait le bon choix.”
L’aventurier : “On s’est lavé dans la rivière”
Tissoudali est un footballeur atypique. Le luxe ne l’intéresse pas, comme en témoigne son aventure en Suisse, lors de la trêve hivernale de la saison 2021-2022. “Quelques jours avant notre dernier match de 2021, mon ex-coéquipier ukrainien au Beerschot, Denis Prychynenko, m’avait demandé si je voulais partir en vacances en Suisse, dans la nature. J’ai accepté et c’était génial. On a dormi dans une tente alors qu’il faisait -1 degré, on s’est lavé dans la rivière. Je compte beaucoup voyager après ma carrière, surtout vers des pays pauvres. S j’ai d’autres projets ? Je voudrais être bénévole chez les pompiers. Et je vais faire plus de kickboxing. Ma femme a donné des cours et son papa donne encore des cours, il a été kickboxeur dans le passé. Parfois, je pratique ce sport pour garder la forme.”
Son bon cœur : “Oui, j’ai nourri un sans-abri”
Le Gantois a un cœur en or, comme en témoignent plusieurs exemples qu’il n'aurait pas dévoilés si on ne lui en n’avait pas parlé. “Oui, j’aide un sans-abri qui habite dans un container à Anvers, en face de la pleine de jeu où j’allais avec mes enfants. Je lui apportais de la nourriture excédentaire que le cuisinier de La Gantoise aurait dû jeter. Entre-temps, j’habite Gand, mais je passe de temps en temps voir mon ami sans-abri à Anvers. De temps en temps, il arrête de boire de l’alcool, puis il recommence. Et oui, je collectionne des chaussures de foot et des vêtements au profit d’une association qui achète des cadeaux pour des enfants atteints de trisomie 21. Et oui, je m’occupe des nouveaux joueurs étrangers qui arrivent à Gand. Je fais cela depuis ma mésaventure au Havre. Je ne parlais pas le français et j’ai senti que les autres joueurs ne voulaient pas créer de lien avec moi. C’est une des raisons qui expliquent mon échec en France.”
Il est un ami du malheureux Nouri : “Il m’a prêté sa Mercedes”
Tissoudali est proche de (la famille de) Abdelhak Nouri, l’ex-joueur marocain de l’Ajax qui est plongé dans un coma artificiel depuis le 8 juillet 2017 à la suite de lésions cérébrales. “J’ai été lui rendre visite il y a un mois et demi. J’ai été à l’école avec son frère et nous jouions au foot en rue à Amsterdam quand nous étions jeunes. Nouri m’a prêté sa Mercedes pour mon mariage. Et il m’a donné des chaussures de foot Nike quand je n’avais pas encore de contrat avec une marque de chaussures. Comment il va ? Ce n’est pas à moi de donner des détails, mais dans notre culture, nous disons toujours : ‘Cela va bien’. On est reconnaissant pour ce qu’on a. On ne dit jamais que ça va mal. Cela nous évite d’être stressés.”
Il est fan du Real : “Je ne donne pas un euro au Barça”
S’il y a un championnat où Tissoudali aurait voulu jouer, c’est la Primera Division. Et le club de ses rêves est le Real Madrid. “Je suis un supporter acharné du Real. J’adorais surtout l’équipe à l’époque de Zidane comme joueur.”
Un des frères de Tissoudali habite Barcelone. “Je vais souvent lui rendre visite. Mais pas question d’aller voir un match du Barça. Dernièrement, on m’a proposé de faire une visite guidée du Camp Nou. J’ai refusé. Je ne dépense pas un euro au Barça.”
Et si Barcelone avait voulu le transférer ? “Question difficile, celle-là. J’aurais d’abord demandé au Real s’ils n’étaient pas intéressés.”

Son frère est international de futsal : “Mais je le dribble”
Un autre frère de Tissoudali a été international néerlandais de futsal. “Maintenant, il ne joue plus en équipe nationale, mais il évolue encore en D1.”
Qui de Tarik ou lui a la meilleure technique ? “Honnêtement ? Je crois que c’est moi. Lui, sa spécialité est de défendre. Mais je crois que je le dribblerais. Avant, quand nous jouions dans la rue à Amsterdam, il ne me faisait pas de cadeaux (rires).”
La famille Tissoudali est très soudée et proche. “Nous essayons de nous réunir un jour par semaine à Amsterdam. Mais après ma carrière, je n’irai pas vivre à Amsterdam. Ce n’est pas l’idéal pour mes enfants. Et je préfère aller où le soleil brille. Oui, pourquoi pas au Maroc ? J’ai d’ailleurs déjà une petite société qui loue des Vespas en été dans la ville Tétouan.”
Vu qu’ils étaient onze enfants, Tarik a dû travailler à partir de ses 12 ans. Il allait déposer des brochures publicitaires dans les boîtes aux lettres, il livrait des pizzas à domicile et il travaillait dans un restaurant. “Je suis content d’avoir reçu cette éducation. Elle a fait de moi la personne que je suis maintenant.”