Comment Dussenne est revenu au premier plan: "Il a mis du temps à accepter la réalité, mais là, il veut terminer en beauté"
Antonietta, la future femme de Noë Dussenne, revient sur la non prolongation et le transfert avorté de son homme cet hiver.
Publié le 10-03-2023 à 09h57 - Mis à jour le 10-03-2023 à 09h59
Mardi 17 janvier 2022, il est 22h33, le Standard mène 2-0 face à Malines. C’est le moment choisi par Ronny Deila pour remplacer son capitaine, Noë Dussenne (30 ans), qui, comme un symbole, cède sa place au jeune Lucas Noubi (qui a fêté ses 18 ans deux jours plus tôt). Les observateurs ne le relèvent pas forcément, mais l’émotion se lit sur le visage du capitaine des Rouches, pourtant toujours impassible sur la pelouse.
Quelques minutes après le coup de sifflet final, alors que les joueurs ont fait le tour d’honneur et sont rentrés au vestiaire, Dussenne, lui, se rend seul face à la T3 qui l’acclame comme jamais. Les larmes sont visibles dans les yeux de l’ancien Mouscronnois. Et pour cause, il le sait, à ce moment précis, il dit au revoir à ses fans et foule pour la dernière fois la pelouse de Sclessin.

C’était en tout cas le scénario initial, mais comme souvent cet hiver, les choses ne vont pas se passer comme prévu pour celui qui compte 82 matchs à son compteur en Rouche. Entre annonce de non prolongation, transfert avorté et retour au premier plan, retour sur l’hiver compliqué du défenseur central.
Le coup de massue en Espagne
Tout commence en réalité durant le stage à Marbella. En fin de contrat, Noë Dussenne sait qu’il doit avoir une entrevue avec Fergal Harkin pendant le séjour espagnol pour évoquer son avenir. “À ce moment-là, il ne pense pas du tout à ce qui va pourtant arriver”, nous précise sa femme Antonietta.” Depuis le début du stage, le capitaine est enjoué, chambreur envers ses équipiers comme avec Laurent Henkinet qui essuyait les frappes de ses copains après une séance. “Oula, il faut un bandage pour les poignets de Lolo.” Mais ce genre de réflexion taquine, on ne les entendra plus par la suite. À quelques jours de la fin du stage, le Montois rencontre bien Harkin. Et là, c’est le coup de massue.

”J’étais venue à Marbella avec mon fils pour y passer quelques jours. J’étais sur place le jour de son rendez-vous. Lorsqu’il m’a appelé pour me mettre au courant de la décision, c’était comme un coup de massue. Il ne s’attendait pas du tout à un retour négatif. À vrai dire, on n’était pas du tout angoissé à l’approche de ce meeting. Cela fait bientôt quatre ans qu’on est ici, Noë se plaît au Standard, notre fils (Romeo) est né à Liège. On se voyait évidemment rester en Cité ardente. Je n’étais pas prête à entendre ça, et lui non plus…”
“Les deux semaines qui ont suivi l'annonce de sa non prolongation ont été dures à vivre.”
Le coup est dur à encaisser pour le robuste arrière central qui marque le pas. “Les deux premières semaines qui ont succédé l’annonce ont été très compliquées à vivre pour Noë”, précise celle qui deviendra prochainement son épouse. “Il a fallu plusieurs jours pour qu’on le remette d’aplomb. On a énormément parlé. Je suis quelqu’un de très rationnelle. Je lui ai alors dit qu’il devait accepter la situation, que si ce n’était pas ici, au Standard, l’histoire s’écrirait ailleurs. En attendant, il était toujours le capitaine d’un Standard en plein redressement et il réalisait une superbe saison. C’est d’ailleurs pour cela qu’il était surpris de la décision de ne pas le prolonger.”
Plus le même pendant plusieurs jours
Mais au début, rien n’y fait vraiment et le Standardman, entier et qui ne triche pas, a du mal à cacher ses sentiments si bien que cela se ressent dans ses prestations. Le 20 décembre, pour le match de reprise en Coupe à l’Antwerp, il prend l’eau (comme toute l’équipe), allant jusqu'à être exclu. Quelques jours plus tard à Gand, il ne fait même pas partie de l’équipe. “Il était dans sa bulle à lui, même si on lui parlait, il restait dans ses pensées. Il avait conscience que cela se ressentait. Le coach, après quelques jours, était venu lui parler. Il lui a dit : ‘je vois bien que cela ne va pas, tu ne parles plus, tu n’es plus le même. On a besoin de toi.’ Ce à quoi Noë a rétorqué : ‘je sais coach, mais je suis entier, je ne peux pas faire semblant. Ça reviendra mais pour le moment, je dois encaisser.’”

Et la compagne du Standardman de mettre en avant les qualités humaines du T1 norvégien. “Là où d’autres auraient réagi autrement, Ronny Deila a fait preuve de compréhension. Il lui a laissé le temps de se remettre et ne lui a pas enlevé son brassard. Il a d’ailleurs toujours été clair en disant que si Noë était disponible, il jouerait. Cela lui a fait du bien.”
Deuxième coup de massue : transfert avorté à Moscou
Alors qu’il doit encaisser le coup, Noë Dussenne réfléchit alors à son avenir. Directement, il a joué cartes sur table avec ses dirigeants. “Il leur a dit qu’en cas d’opportunité durant le mercato, il partirait pour ne pas prendre le risque de se retrouver sans rien en cas de blessure par exemple. Ce que le club a parfaitement compris et a accepté”, poursuit Antonietta. Vient alors la proposition du Lokomotiv Moscou. Les négociations vont bon train et après mûre réflexion au sein de la famille Dussenne, il est décidé de tenter l’aventure russe. “On a pesé le pour et le contre compte tenu de la situation en Russie. Beaucoup nous ont dit qu’on était fou d’y aller. Mais on s’était assuré, lors des négociations, de pouvoir revenir si cela tournait mal. Noë devait signer pour six mois avec un contrat renouvelable.”
“Aujourd'hui encore, on ne sait toujours pas ce qui a capoté avec le Lokomotiv Moscou.”
Mais alors que tout semblait réglé, la confirmation n’est jamais arrivée de Moscou. “Tout était prêt. L’agent s’était rendu sur place pour négocier, les papiers étaient quasiment tous signés, il ne manquait que la finalisation du Lokomotiv Moscou. Tous les jours, je voyais Noë rentrer à la maison en se posant 1 000 questions. La fin du mercato approchait et la réponse du club moscovite se faisait attendre. Elle ne viendra finalement jamais et aujourd’hui encore, on ne sait pas pourquoi.”
Retour au premier plan
Trop tard pour se retourner, Dussenne reste donc à Liège jusqu’au terme de son contrat. “Je lui ai alors dit que rien n’arrivait par hasard. Qu’en attendant, il devait assumer son statut de capitaine du Standard et il a directement repris sa marche en avant.” C’est sans arrière-pensée que Dussenne est remonté sur le terrain. “Il ne jouait pas avec le frein à main. Penser à la blessure, c’est le meilleur moyen pour qu’elle arrive.”
Et le défenseur se donne alors à nouveau à 100 %, s'érigeant comme un moteur de la belle dynamique actuelle. Grâce notamment aux échanges avec Ronny Deila. “C’était le coach dont il avait besoin, dont ils avaient tous besoin”, constate sa compagne. “Il est extrêmement humain, proche de ses joueurs. Il a tout pour faire passer un cap au Standard. Durant les négociations avec Moscou, il a toujours été proche de Noë et à l’écoute.”
Aujourd’hui, après avoir connu la galère la saison dernière, le Standard veut aller au bout de ses rêves. Son capitaine aussi. “Il est focalisé sur la fin de saison et a évacué la déception. Il donne tout et est super fier de faire partie de cette équipe et de ce qu’elle accomplit. Même s’il ne sera plus là dans quelques mois, il veut tout faire pour aider le Standard à terminer le plus haut possible et ainsi partir la tête haute.”
“Le Standard restera assurément le meilleur passage de sa carrière.”
Arrivé en 2019, le défenseur central aura donc été au bout de son contrat. Le Standard restera comme sa plus longue expérience de sa carrière. “Et malgré tout ce qui a pu se passer, les montagnes russes rencontrées, que ce soit avec la blessure, sa mise à l’écart ou encore sa non prolongation, le Standard restera assurément la plus belle partie de sa carrière. Il a réalisé son rêve en signant dans ce club dont il est devenu le capitaine.”