"Au début, Amadou a forcé pour rembourser son transfert"
Le Guinéen Amadou Diawara prend de plus en plus de place à Anderlecht. Kaba Diawara, son sélectionneur.
Publié le 28-02-2023 à 16h06 - Mis à jour le 28-02-2023 à 20h08
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L’image l’a fait sourire face aux micros après la rencontre. Quand Brian Riemer l’a remplacé par Lior Refaelov pour les dix dernières minutes du Clasico dimanche, Amadou Diawara s’est énervé. Il a balancé sa bouteille puis a shooté dans le plaid mauve que le team manager venait de lui proposer. "J’étais un peu fâché de sortir parce que je me sentais bien dans le match, mais j’ai bien compris le choix du coach", avouait-il dans un sourire.
Il y a quelques semaines, Diawara aurait aussi pu s’énerver en revenant vers le banc avant la fin du temps réglementaire. Mais sûrement pas parce qu’il se sentait bien sur la pelouse. Plutôt par frustration sur son niveau de jeu, loin des hauteurs prises par son CV et des 21 millions € dépensés par l’AS Rome pour se l’offrir en 2019. L’évolution actuelle n’est pas loin de ressembler à une métamorphose, tant le Guinéen avait déçu lors de ses premiers mois au Sporting.
La faute directe après 10 mois de banc
Son premier contact avec les supporters anderlechtois n’avait pas aidé à le rendre populaire. Pour ses débuts au Sporting, le 4 septembre contre Louvain (2-2), Diawara avait perdu le ballon devant son rectangle trois minutes après l’égalisation de Julien Duranville. Il n’avait pas senti venir le pressing de Mathieu Maertens et Musa Al-Tamari avait conclu. Le médian s’était pris la tête entre les mains et les doutes étaient nés : est-ce lui qui devra remplacer Adrien Trebel, blessé à l’épaule pour une longue durée ?
Felice Mazzù l’a soutenu à l’époque, notamment en lui parlant en italien. Mais la suite n’a pas beaucoup rassuré. S’il n’a été à la base d’un but adverse de façon aussi flagrante que contre Louvain, Diawara n’arrivait pas à convaincre. Peu d’impact au milieu, des passes faciles loupées, aucune présence offensive… Il donnait l’impression de traverser sa période anderlechtoise comme une ombre. Pourtant, il est le huitième joueur de champ le plus utilisé de l’effectif depuis son arrivée. "Amadou avait besoin d’enchaîner les matchs, explique Kaba Diawara, son homonyme et sélectionneur de la Guinée. Il ne faut pas oublier sa longue période de disette à Rome (NdlR : sa dernière titularisation datait de novembre 2021, dix mois avant ses débuts au RSCA). Même si tu as joué à un haut niveau et que tu es motivé, tu ne peux pas effacer ça d’un coup de baguette magique. Surtout dans un championnat dense comme la Belgique. Amadou avait besoin de temps."
Un salaire XXL qui lui a rajouté de la pression
Pour Kaba Diawara, il y a aussi une autre explication aux débuts compliqués de celui qui est l’un de ses cadres en équipe nationale. "Je suis venu voir Amadou début février à Bruxelles, le lendemain du déplacement d’Anderlecht à Ostende. Il m’a très bien reçu. Il est bien installé et on sent qu’il est maintenant bien dans ses baskets en Belgique. Au départ, c’était plus compliqué. Il devait s’habituer à un nouveau pays, un nouveau climat et une nouvelle culture. Tout ça avec beaucoup d’attentes autour de lui vu ses lettres de noblesse. Il s’est mis une certaine pression."
Le stress et le temps de jeu ont fonctionné comme un cocktail dangereux. "Amadou s’est blessé une fois. Puis une seconde fois. Ça n’avait rien d’illogique, mais il a voulu forcer, en revenant le plus rapidement possible. Il se sentait redevable envers Anderlecht et il avait envie de rembourser son transfert. Mais ça ne marche pas ainsi dans le football. Amadou aurait mieux fait de bien se soigner et de revenir quand il était à 100 %", gronde son sélectionneur, ancien attaquant d’Arsenal, de l’OM et du PSG au début du siècle.
Diawara s’est engagé dans un cercle vicieux où il jouait sans être à son maximum pour tenter de convaincre les supporters, les observateurs et, plus encore, ses dirigeants. S’il n’a été acheté que pour 1,5 million à la Roma, il est arrivé en Belgique avec un gros salaire, l’un des plus élevé du vestiaire anderlechtois. Le but était de faire une opération à multiples gagnants : relancer le joueur vers un grand championnat, permettre au RSCA de faire une plus-value et consoler les Romains de leur investissement loupé en 2019 avec 50 % du futur transfert. Mais il fallait commencer par bien jouer en Pro League…
Pas un coup de foudre mais une belle histoire d’amour avec Riemer
Dater le déclic est compliqué, mais l’arrivée de Brian Riemer aura clairement fait changer les choses pour Diawara à Anderlecht. Le coach danois l’avait pourtant mis sur le banc pour ses deux premières rencontres. Et à sa première titularisation, le Sporting a perdu le derby contre l’Union. On ne peut pas parler de coup de foudre au premier regard entre les deux hommes. "Mais j’ai l’impression que l’entraîneur d’Anderlecht a vite compris tout ce qu’Amadou pouvait apporter à son équipe, reprend Kaba Diawara. Il équilibre une équipe. Il est puissant mais il est aussi intelligent, aussi bien sur qu’en dehors du terrain. Il t’aide à gagner des matchs. Et aussi à ne pas les perdre."
Depuis ce revers contre l’Union, le RSCA n’a été battu qu’une seule fois en championnat, contre Zulte Waregem. L’unique rencontre où Diawara n’est pas sorti du banc.
On n’ira pas jusqu’à en faire un talisman de Riemer, mais Diawara s’est installé dans le onze. Le coach a beaucoup cherché la bonne formule au milieu et a fini par la trouver ces dernières semaines : un triangle où Diawara aide Majeed Ashimeru et Yari Verschaeren. Il peut aussi offrir une version "offensive" de ce trio en remplaçant Diawara par Lior Refaelov, comme à Courtrai, mais ça n’arrivera pas souvent. Anderlecht a rarement le luxe de se sentir assez dominant pour se priver d’un vrai numéro 6.