Charleroi - Les malheurs de Nadhir Benbouali
L’attaquant algérien Nadhir Benbouali (22 ans) vit des premiers mois compliqués à Charleroi, sa grave blessure en climax. Retour sur une adaptation peu évidente.
Publié le 10-01-2023 à 16h01
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Un joueur n’est pas l’autre. Si Adem Zorgane a réussi une intégration et une adaptation rapides à Charleroi dès son arrivée à l’été 2021, la réalité de Nadhir Benbouali est différente. À la fois humainement et sportivement.
Il faut puiser un élément de son passé pour contextualiser les raisons d’une adaptation moins évidente pour l’attaquant qui a découvert Charleroi en juillet 2022. Issu d’une famille nombreuse originaire de Chlef, à environ 200 kilomètres de la capitale Alger, Benbouali vivait déjà partiellement éloigné de sa famille lorsqu’il fréquentait le centre de formation puis l’équipe première du Paradou AC, mais il rentrait près des siens au moins les week-ends. Un besoin vital pour ce garçon souriant et sensible. "Il ne vient pas du même milieu et n’a pas reçu la même éducation qu’Adem, mais il ne posait pas de problème dans le vestiaire", se souvient son ancien entraîneur Francesco Chalo.
Depuis son transfert en Europe, l’éloignement familial pèse sur le moral de Benbouali, malgré l’aide et les conseils précieux de son ami Adem Zorgane, avec qui il évoluait déjà au Paradou. "Ils sont tout le temps ensemble, et c’est bien normal", nous dit-on au club.
"Je lui montre les choses pratiques du quotidien", confiait Zorgane, avec qui il partage volontiers des soirées thé et jeux de dominos, dont ils raffolent. "Ça lui fait chaud au cœur, nous explique-t-on. Nadhir a en revanche eu du mal à s’acclimater à la météo, au froid de l’hiver belge. Un jour, en décembre, il m’a raconté que lorsqu’il frappait dans le ballon, il souffrait des pieds à cause du gel. Il avait du mal à l’entraînement à cause de ça."
Il se met beaucoup de pression
Sportivement, en 15 matchs dont 8 comme titulaire, Benbouali ne s’est pas encore rendu indispensable, au contraire de Zorgane dès la saison dernière. Un joueur n’est pas l’autre. Pourtant, Edward Still croyait beaucoup en lui, "mais sur le terrain, cela ne marchait pas trop, nous assure un proche. Il a notamment été terriblement déçu d’être en tribune à Anderlecht."
La direction et Felice Mazzù sont également convaincus du potentiel du joueur, de ses qualités physiques et techniques, en sachant qu’il est perfectible tactiquement. Mais il faut être patient. Or, le contexte actuel au Sporting laisse très peu de place aux doutes et tergiversations. Benbouali en est conscient et s’inflige une pression grandissante, conscient, aussi, que le club et le public attendent énormément de lui, successeur désigné de Vakoun Bayo.
Parmi les meilleurs buteurs du championnat algérien ces deux dernières saisons (9 buts, puis 14, avec 10 passes décisives), et titulaire assuré au Paradou AC, Nadhir Benbouali ne dispose pas du même statut en Belgique. Il s’imaginait peut-être marcher un peu trop vite sur la Pro League. Il lui arrive dès lors de forcer un peu les choses, à l’entraînement et en match, comme pour (se) prouver qu’il possède bien les qualités nécessaires pour marquer, aider l’équipe et exploser à Charleroi. "Je pense qu’il ne s’attendait pas à avoir autant de mal à s’adapter au jeu ici. Il croyait marquer plus de buts, et plus vite", explore un suiveur.
Le 21 octobre au Cercle Bruges, il pensait avoir ouvert le score, mais le VAR a annulé son but pour un hors-jeu. Charleroi s’était finalement incliné (1-4) pour ce qui était alors le dernier match de Still, remercié le lendemain. Benbouali, déçu, avait quitté la pelouse en pleurs.
Il a finalement planté son premier but une semaine plus tard, le 30 octobre, face à l’Antwerp, lors de l’intérim de Frank Defays, sur une passe décisive de son ami Zorgane. Il est allé célébrer dans les bras de celui qui a depuis lors retrouvé son rôle d’adjoint.
"Nadhir a vécu des moments difficiles depuis son arrivée d’Algérie. Des moments de doutes et de tristesse, avait raconté Defays. Il découvre un nouveau championnat, un nouveau pays… Pendant ces moments-là, c’était notre rôle de le soutenir, de l’encourager à ne rien lâcher. On savait que ça tomberait un jour."
Mi-décembre, Benbouali a inscrit un deuxième but, contre Malines, à nouveau sur un assist de Zorgane. Mais il ne sera pas comptabilisé puisque le match a été arrêté définitivement et qu’un score de forfait devrait être infligé à Charleroi. Quoi qu’il en soit, l’Algérien pensait être lancé.
Bientôt opéré
C’était sans compter ce nouveau malheur survenu samedi à Eupen. Remplaçant, il est monté à la mi-temps mais, 26 minutes plus tard, sur une intervention de l’Eupenois Gary Magnée, son genou gauche a tourné. Il a tenté de reprendre, de masquer sa douleur pour essayer de la surmonter, mais les ligaments croisés ne pardonnent pas. Les larmes ont coulé, encore.
Nadhir Benbouali sera opéré prochainement. Sa saison est d’ores et déjà terminée, mais il espère secrètement retrouver les terrains à la préparation estivale pour entamer la saison prochaine en pleine possession de ses moyens, déterminé à prouver qu’il aura non seulement réussi l’épreuve de l’adaptation, mais aussi celle de l’éclosion. "Je reviendrai plus fort", a-t-il partagé sur les réseaux sociaux.