Comment va le football liégeois ? Au carrefour, il faudra faire le bon choix
Le football liégeois n’a plus été aussi bien représenté au plus haut niveau depuis le milieu des années 90. Mais il est à un tournant.
Publié le 10-03-2022 à 18h49
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Le football d’en haut, en province de Liège, se porte bien, et mal, cette saison. C’est un paradoxe, mais c’est un fait.
Trois clubs de la Principauté n’avaient plus fréquenté la D1 en même temps depuis la saison 1994-95, quand le Standard, le RFC Liège et Seraing rivalisaient dans un rayon de vingt kilomètres. Le Standard avait terminé vice-champion, Seraing avait fini neuvième et Liège vivait son dernier exercice en D1, dans la douleur.
Vingt-sept ans plus tard, deux des trois clubs sont toujours là, à cinq kilomètres de distance, et Eupen a remplacé Liège, ce qui a élargi un peu le cercle. Mais tous les trois finiront probablement dans la colonne de droite, le 10 avril, au terme de la phase classique. Ce n’est pas une infamie pour Seraing et Eupen; c’est une anomalie, au minimum, pour le Standard.
Seront-ils encore trois clubs la saison prochaine? Cela dépendra beaucoup de Seraing, qui se dirige vers le barrage pour son maintien. De manière plus générale, la question qui se pose est la suivante : y a-t-il la place, en province de Liège, pour trois clubs au plus haut niveau belge?
"Sur le papier, oui", estime Benoit Thans, ancien joueur du Standard et du RFC Liège. "Il faut tenir compte des circonstances financières, mais avec une bonne gestion, et des investissements dans la formation, pour aller chercher des recruteurs et des entraîneurs, plutôt qu’un deuxième ou un troisième joueur pour l’équipe première, c’est possible."
Jean-François de Sart, ancien joueur du RFC Liège, et ancien directeur sportif du Standard, partage le constat, au sujet de la formation. "Il faut regarder ce qui se fait autour, pour permettre aux jeunes d’être bien formés, leur proposer des infrastructures de qualité. Cela amorce une pompe, qui permet de faire sortir des jeunes, qui vont dans des clubs de D1 de la région, puis percent au haut niveau."
Le tissu économique a évolué, depuis les années 90, et le business du football avec lui. Seraing et Eupen sont dans des mains étrangères, Metz pour le premier, le Qatar pour le deuxième. Et le Standard devrait, dans les prochains jours, passer sous pavillon étranger également.
"Le football belge dépend beaucoup des investisseurs étrangers, et la province de Liège n’échappe pas à la règle", observe José Riga, ancien entraîneur du Standard. Il ajoute : "Un club comme Zulte Waregem peut encore tenir avec des propriétaires belges, parce qu’il est installé dans une région (la Flandre occidentale) plutôt prospère. Mais globalement, il devient difficile de trouver des investisseurs locaux, encore plus avec la crise du coronavirus, et les conséquences qu’on aura du conflit en Ukraine, au niveau des finances des entreprises qui sont de potentiels sponsors."
L’arrivée de capitaux étrangers serait presque une obligation, pour survivre, ou passer un cap. Et de ce point de vue, "avec l’apport de capitaux étrangers, il est possible d’avoir trois clubs dans la province", confirme Thans, qui précise toutefois : "Je suis plutôt un partisan des clubs filiaux, pour garder une certaine identité locale, plutôt que pour l’arrivée massive d’investisseurs."
En D1A, pour rappel, le Cercle Bruges est une filiale de Monaco; l’Union, de Brighton et Seraing, de Metz. Avec toutes les limites que cela suppose et le risque même de dépendance. Comment faire, alors, pour élever le niveau? "La finalité du foot, cela reste les résultats, on a tendance à l’oublier, glisse Thans. Il y a dix ans, Sclessin était à la limite trop petit pour la réussite du Standard."
"Le Standard était présenté comme la capitale du football belge", complète de Sart.
"Une région a besoin d’une locomotive, et à Liège, c’est le Standard, conclut José Riga. Cette locomotive doit tirer les autres vers le haut, et si un deuxième club peut rivaliser, comme Liège à une époque, c’est bénéfique, car cela crée une émulation."
Plus que Seraing ou Eupen, Liège semble être le club capable de passer un cap, en raison de son histoire et de son potentiel public. Mais, là aussi, il faut trouver des fonds pour progresser et se développer. Jean-François de Sart, devenu administrateur-délégué du RFC Liège, est bien placé pour expliquer le modèle liégeois. "On veut revenir au niveau professionnel et il y a toujours de l’intérêt pour augmenter le capital. Pour le moment, on veut garder notre ancrage liégeois. On pourrait toujours se développer financièrement, mais ce n’est pas toujours un gage de réussite."
Faudra-t-il faire un choix, un jour? Liège et Visé, en Nationale 1, sont actuellement les deux clubs liégeois, puisqu’il n’y en a pas en D1B. Au total, la province compte donc cinq clubs, sur quarante-et-un, dans les trois premières divisions.
Ils étaient sept, sur septante, en 2016, au terme de la dernière saison avant la réforme du football professionnel et amateur (Standard en D1; Seraing et Eupen en D2; Liège, Sprimont, Hamoir et La Calamine en D3). La province de Liège compte donc 12 % des clubs, quand ils étaient 10 % il y a sept ans. Cela traduit, là aussi, un progrès.
En Wallonie, la province de Liège est la mieux représentée, dans les trois premières divisions, si on s’en tient au critère sportif (voir infographie). Il reste toutefois un élément important à changer : refaire de Liège la capitale du football belge, ou la repositionner sur la carte du foot belge avec un peu plus d’ambitions. Cela passera par le Standard, c’est inévitable. En moins de vingt-cinq ans, si possible, espèrent leurs supporters.