CHARLEROI | Les confessions de Jackson Tchatchoua : "Il était temps, mais pas trop tard"
Étendard de la nouvelle politique sportive, Jackson Tchatchoua récolte les fruits de sa persévérance. Sa réussite sert d’inspiration.
Publié le 19-11-2021 à 07h47
:fill(000000)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/HPCD2YQ72BBO7CJO5DUR4MN5WI.jpg)
Pour résumer Jackson Tchatchoua, on choisirait volontiers les termes maturité et humilité. L’ailier carolo (20 ans) a utilisé beaucoup plus que deux mots lors du long entretien qu’il nous a accordé cette semaine. Il éclaire sa trajectoire et ses croyances, faites d’abnégation et de patience. Il explique aussi son éclosion plutôt tardive, son intersaison incertaine et l’exemple qu’il représente pour le centre de formation.
Jackson, vous avez signé votre premier contrat professionnel au Sporting en juin dernier, à 20 ans. C’est tard par rapport aux standards actuels, non?
On est dans un milieu où les phénomènes émergent très tôt, mais chaque joueur prend le temps dont il a besoin. À Charleroi, on a l’exception de Martin (NDLR : Wasinski, 17 ans), qui a été très vite à l’aise. Moi, j’ai franchi ce cap un peu plus tard. Il était temps, mais pas trop tard. C’était le timing parfait.
Jusqu’il y a quelques mois, on ignorait si vous seriez conservé dans le noyau. Aujourd’hui, vous comptez 9 titularisations en 15 matchs toutes compétitions confondues. Comment expliquer ce basculement soudain?
Dans les faits, vous estimez que c’est une évolution très rapide. Mais en réalité, c’est un long chemin. À l’intersaison, je n’étais pas certain d’être intégré au groupe pro et on m’a dit de faire mes preuves durant la préparation. J’ai bossé deux fois plus, comme si chaque entraînement et chaque match étaient les derniers. Rien n’arrive par hasard; il y a un gros travail dans l’ombre. Cette première saison en pro me procure beaucoup d’émotions et de l’expérience. J’essaie d’apporter ma pierre à l’édifice collectif.
La signature de votre contrat vous a-t-elle libéré?
Je suis conscient que ce n’est pas donné à tout le monde. Cela a concrétisé certaines choses et m’a donné un second souffle. Le club m’a montré qu’il croyait en moi et qu’il voulait m’intégrer à son projet.
Vous êtes arrivé à Charleroi en U16, à une époque où les jeunes du cru ne recevaient pas leur chance en A. Désormais, c’est le cas. Ressentez-vous le changement de philosophie du club?
Wasinski, Descotte, Ferraro, moi : en à peine six mois, quatre jeunes ont pointé le bout de leur nez en D1A. Dans le passé, il y avait déjà des jeunes de qualité, mais la porte n’était pas vraiment ouverte… La nouvelle volonté du club de leur donner une vraie chance est claire aujourd’hui. Il y a une réelle prise de conscience et une professionnalisation, aussi pour les jeunes. On suit des programmes plus complets, plus spécifiques et mieux adaptés. On peut s’épanouir davantage.
N’avez-vous jamais craint, lors de votre post-formation, que votre avenir ne soit bouché au Sporting?
Si, on y pensait. On n’était pas aveugles. Des mauvaises langues disaient que jamais un jeune n’aurait sa chance à Charleroi. Moi, je pense qu’on a tous une bonne étoile. Tu es seul maître de ton destin. D’ailleurs, si j’avais écouté ces gens-là, je ne serais pas assis ici devant vous.
Comment avez-vous vécu ces années, à 16, 17 ou 18 ans, sans réelle perspective de percer à l’époque?
J’étais performant en jeunes mais c’était compliqué d’intégrer les A. Il y a eu des questionnements, des moments de frustration, mais jamais au point de me faire douter longtemps. Je savais au fond de moi que j’avais des qualités pour passer cette étape. Quand tu sais que c’est toi seul qui dois bousculer les choses, qu’on ne va rien t’offrir, cela décuple ta détermination.
Aujourd’hui, avez-vous le sentiment d’être un porte-drapeau pour les jeunes du centre de formation?
Oui, on est un exemple. On est la première génération à être lancée de la sorte. On porte cette responsabilité-là et on doit être à la hauteur, justement, pour les jeunes qui suivent. On sait qu’ils nous regardent. On doit l’assumer. Certains m’envoient des messages, m’encouragent… Ils se disent que cela pourrait aussi fonctionner pour eux, plus tard.
Fin septembre, nous titrions dans un précédent article : «Tchatchoua, celui que l’on n’attendait pas». Cela colle plutôt bien à votre trajectoire, non?
Être celui que l’on n’attend pas, c’est plaisant. Et motivant. Ça donne envie de faire plus et de prouver aux gens qu’ils ne sont pas au bout de leurs surprises… Je vis un rêve mais j’ai travaillé pour l’atteindre. Ce qui peut peut-être vous surprendre, c’est le timing. Mais je vous l’ai dit, je crois au timing parfait.