Roméo Lavia, le nouveau Diable rouge de Tedesco : l’itinéraire d’un surdoué
L’ancien espoir d’Anderlecht et de Manchester City s’est imposé en Premier League cette saison du côté de Southampton et est devenu le 60e Belge à évoluer en Angleterre. Et à tout juste 19 ans, il intègre officiellement ce vendredi 17 mars 2023 le noyau de l’équipe nationale belge.
Publié le 17-03-2023 à 13h16
C’était écrit. Roméo Lavia, qui a fêté ses 19 ans en janvier, ferait un jour partie du noyau des Diables rouges. Depuis ce vendredi et la première sélection de Domenico Tedesco, c’est désormais le cas.
Taillé pour le haut niveau, Roméo Lavia représente la relève dans le cœur du jeu. De par son style, son calme ainsi que sa maturité, il ressemble d’ailleurs fortement à Axel Witsel, le grand absent de cette sélection.
À un âge où certains terminent leurs études ou commencent à travailler, Roméo Lavia est titulaire en Premier League et s’apprête à faire ses premiers pas en équipe nationale. Devenu indiscutable du côté de Southampton cette saison, le milieu se bat pour que son club reste en Premier League. Avant certainement de, déjà, viser un transfert dans une formation plus huppée.
Itinéraire d’un surdoué aussi calme dans la vie que sur un terrain de football.
Bruxelles trop petit, City un rien trop grand
“Seulement un joueur sur un million est capable de s’imposer à Manchester City. Et Roméo Lavia en fait partie.”
Ces mots proviennent du maître Kompany après les débuts du ketje de Bruxelles pour les Citizens en septembre 2021. Frustré de ne pas l’avoir vu défendre les couleurs mauves. Fier qu’un joueur représente aussi bien la formation anderlechtoise à l’étranger. Parce que le Diablotin démontre que le talent dans nos contrées est énorme. Et que Neerpede est bien l’une des meilleures pépinières du pays.
Après des débuts à Woluwe, le milieu arrive à Anderlecht à l’âge de huit ans. Autant d’années plus tard, le club bruxellois est déjà devenu trop petit pour lui. En âme et conscience, il décide de mettre les voiles dans les équipes de jeunes des Citizens. Très vite, il s’impose. Au point d’être élu meilleur joueur de sa catégorie en U23.
Après ce titre honorifique, il dispute ses premières minutes lors d’un match de League Cup. “Roméo Lavia est très bon”, avait commenté KDB pour Play Sports après les débuts du prodige. “Depuis la fin de l’année dernière, il s’entraîne avec nous. S’il continue son développement, je pense qu’il sera un joueur de premier plan”, avait prédit De Bruyne.
Mais la marche est trop haute à City. Et la concurrence trop importante. Forcément, d’autres écuries flairent le bon coup. Direction le Hampshire dans une ville portuaire de 250 000 habitants : Southampton.
Southampton, l’éclosion… puis la chute
Le 6 juillet dernier, les Saints déposent un peu plus de treize millions d’euros pour un élément qui n’a disputé que 97 minutes avec les pros. Exagéré ? Certainement pas si on observe les débuts du Bruxellois en Premier League. En tant que sentinelle, il est un titulaire inamovible du 4-2-3-1 mis en place par Ralph Hasenhuttl. Sauf qu’il ne se contente pas de ses tâches défensives. Lavia a une aisance exceptionnelle à se retourner, jouer vers l’avant et casser des lignes. Les médias et consultants anglais sont rapidement conquis. Dont un spécialiste du poste : “Il n’a que 17 ans et il semble avoir un énorme potentiel, avait commencé Paul Scholes sur BT Sports. Il s’est tellement bien installé dans l’équipe. Ce joueur a une très bonne passe. Il est grand, fort et aime défendre. Comme milieu défensif, il préfère rester devant sa défense pour organiser et mettre en place le jeu sans se projeter trop vite vers l’avant.” Un avis partagé par Rio Ferdinand : “Ce jeune joueur peut jouer des deux côtés du terrain. Il est aussi bon défensivement qu’offensivement. De plus, il a une gamme de passe qui est extraordinaire.”
Tout le monde est sous le charme. Paradoxalement, son meilleur souvenir sera également le pire de sa jeune carrière. Face à Chelsea, il inscrit son premier but d’une patate à 25 mètres. Une nouvelle fois, il éclabousse de son talent une rencontre sans éclat jusque-là. Sauf que le gamin se blesse à la 60e minute. Son corps était-il prêt à supporter une telle charge à seulement 18 ans ? Ralph Hasenhuttl, son coach en début de saison, reconnaît avoir peut-être brûlé son diamant brut. “Disputer deux matchs de PL en trois jours est une expérience totalement inconnue pour des jeunes comme lui, explique-t-il après la victoire contre les Blues. À l’avenir, nous devrons être prudents. C’est également ma responsabilité car je dois faire plus attention à ne pas le forcer à nous montrer ses qualités. Maintenant, il est absent pour longtemps…”
Effectivement, Roméo Lavia prend près de deux mois de revenir dans l’équipe après sa blessure aux ischios. Surtout, elle hypothèque fortement une Coupe du monde où il aurait pu être la grande surprise de Martinez. Cela attendra.
Un diamant à polir
Sans lui, les Saint’s s’enfoncent dans le classement de Premier League. Huit rencontres, cinq défaites, deux nuls pour une maigre victoire. Début novembre, il est directement titulaire pour son retour et dispute moins d’une heure de jeu lors d’une rouste contre Newcastle (4-1). Une semaine plus tard, il joue 82 minutes lors de la défaite subie contre Liverpool. Son entraîneur a-t-il appris de ses erreurs ? En interne, on en doute et les résultats l’accablent. Nathan Jones le remplace juste avant la Coupe du monde où Lavia n’est pas sélectionné. Désormais Diablotin, il part en vacances… mais n’en profite pas trop. Lavia préfère surtout travailler lors d’intenses séances physiques. Comme l’expliquait son coach personnel, Ronald Kabeya pour Sport Foot Magazine en début de saison. “Ces entraînements supplémentaires font qu’il ne part jamais en vacances. Mais il ne trouve pas ça très grave parce qu’il aime bien passer du temps en famille. Il ne voit pas l’intérêt de claquer de l’argent dans des voyages à Marbella, à Dubaï ou dans d’autres pays où on fait surtout la fête. Il lèvera un peu le pied et il s’offrira des vacances quand il aura acquis un certain statut.”
Lors du retour aux entraînements collectifs, le coach Gallois de 43 ans modifie l’approche. Plus question d’utiliser le Belge de 18 ans à tire-larigot. Entre décembre et début février, il est titulaire mais ne dispute pas plus de 65 minutes de jeu. L’objectif est clair : préserver le joueur sur la durée. “Nous avons estimé que si nous gérions bien Roméo, nous obtiendrions plus de temps de jeu de sa part sur du long terme, avait expliqué Jones après une défaite contre les Magpies en Carabao Cup. S’il joue trop, il pourrait se blesser. Du coup, nous ne l’avons pas trop utilisé pour cette rencontre. Nous devons être responsables. Quand il est en forme, c’est un footballeur magnifique. C’est très important de gérer un joueur de son âge dans un environnement comme le nôtre.”
Une tactique qui semble porter ses fruits. Notamment contre sa victime préférée : Chelsea. Pendant 87 minutes, Enzo Fernandez et les autres stars de Stamford Bridge sont impuissants face à l’élégance du gamin. Ce qui fera dire à Alan Shearer après la rencontre : “Il a dominé toutes les nouvelles recrues de Chelsea ce soir.”
Simple, basique. Mais tellement vrai. Au point que Todd Boehly aurait déjà coché son nom dans sa prochaine folie dépensière du mercato estival pour jouer aux côtés du champion du monde argentin.