Yanis, ce Belgo-Marocain de Namur qui a supporté ses deux pays à la Coupe du Monde au Qatar : ”un monde de Bisounours” (photos et vidéos)
Yanis Kola a pu suivre tous les matchs du Maroc et les deux premiers de la Belgique dans les stades du Mondial 2022 au Qatar. Retour sur son expérience.
Publié le 16-12-2022 à 09h52 - Mis à jour le 16-12-2022 à 10h27
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Voici plus d’un mois que ce Belgo-Marocain est parti à la conquête du Qatar et de la Coupe du Monde qui s’y tient. Yanis Kola a 21 ans, habite la région d’Andenne et a suivi presque tous les matchs du Maroc et de la Belgique au Mondial 2022.
”J’ai senti qu’il allait se passer quelque chose”
Pour s’y rendre, Yanis a pu compter sur sa belle famille déjà présente sur place. “Niveau logement, c’était donc simple. Avec mon père, on a pris les billets d’avion plus ou moins deux mois à l’avance et, pour les premiers matchs, on s’est inscrit sur un site de la FIFA pour pouvoir acheter nos places”. Yanis a vu tous les matchs du Maroc sauf le quart de finale face au Portugal, “sans regrets” puisque le joueur du Condruzien (en région Namuroise) découvrait l’Arabie saoudite à ce moment-là “où un supporter nigérian a échangé son maillot contre le mien”. “J’avais donc pris mes places pour Croatie – Maroc et Belgique – Canada en premier. Après le nul (0-0) du Maroc, j’ai senti que quelque chose allait se passer, donc j’ai décidé de m’arranger pour trouver des places à chaque nouveau match”. Et ce ne fut pas mince affaire. “On a quand même réussi à se débrouiller à chaque fois. En réalité, je n’ai payé que pour les premiers matchs, après on a toujours réussi à se dégoter des places gratuitement, notamment grâce à la maman de Walid Regragui (le coach marocain) qui habite dans la même ville que ma grand-mère et qui est une femme géniale avec un grand cœur”. Yanis et son père, “Mouss”, ont donc pu assister à certains matchs en tribune familiale, aux côtés du frère d’Hakimi ou celui de Ziyech.
”Lorsqu’on a appris ce qu’il se passait à Bruxelles, on a été dégoûté”
D’origine marocaine via son papa, Yanis est né et a toujours habité en Belgique. Pas question pour lui de renier ses couleurs. “Ma famille, du côté de ma mère, et mes meilleurs amis sont Belges donc, évidemment, j’étais triste quand les Diables sont sortis. J’ai assisté au match Belgique – Maroc et, il faut l’avouer, j’étais plutôt du côté marocain… J’ai décidé de choisir le petit pays, pour l’histoire, mais surtout car j’avais plus confiance en la Belgique qu’au Maroc avant le tournoi. Lors du match, j’avais des joueurs des Diables devant moi et je me disais 'ils vont me prendre pour un traître', comme s’ils savaient que j’étais Belge. Je suis même passé à la télé lors de cette rencontre”. Le résultat, on le connaît (0-2), et c’était la plus belle fête des Marocains selon Yanis. “Pour le dernier match des groupes, j’étais au match du Maroc mais heureusement (ou pas) mes amis me gardaient au courant de la Belgique en même temps”.
Après la rencontre, la réalité frappait à la porte de tous ces supporters puisque, dès la sortie du stade, les moues changeaient. “Lorsqu’on a appris ce qu’il se passait à Bruxelles, on a été dégoûté et les visages ont changé. Partout autour du stade, les médias ne posaient des questions que sur ce sujet, alors que deux minutes plus tôt nous voulions juste profiter du moment. Tous les Marocains avec qui j’ai discuté ont exprimé un sentiment de honte et de profonde tristesse. On était déçu car on savait que leurs actes allaient être généralisés et qu’on en serait les premières victimes”.
Yanis, à propos du parcours marocain
Néanmoins, pas de quoi tuer l’esprit des Lions de l’Atlas. Les matchs se suivaient ensuite jusqu’à cette fameuse demi-finale perdue contre la France mercredi 14 décembre. Encore une fois, l’esprit était à la fête. “Franchement, l’ambiance avec les Français était géniale. On s’est tous félicité dans le respect et on a même chanté des chants ensemble”. Son meilleur souvenir restera quand même les 8ès face à l’Espagne où il a fondu en larmes au dernier penalty d’Achraf Hakimi. “La pression est retombée d’un coup. Tout le stade a pleuré en même temps”. Il retiendra le parcours exceptionnel du Maroc auquel il ne s’attendait pas du tout et qui, pour lui, a pour cause la confiance donnée aux cadres. “Ziyech a été transformé, Mazraoui retapé et un gars comme Ounahi est méconnaissable. Walid Regragui a donné de la confiance à l’équipe et à tout un peuple. On avait vécu des moments difficiles à la dernière CAN (sorti en 1/4 par l’Égypte) et la dernière Coupe du Monde (sortie en phase de poules sans victoire). Au début, on voulait juste une victoire pour l’honneur et, à la fin, on voulait une victoire pour la finale”.
”Une réelle communion entre supporters”
En dehors des matchs, quand il ne naviguait pas le désert ou qu’il ne croisait pas la femme de Lionel Messi et ses enfants dans un parc d’attractions, Yanis a découvert l’ambiance d’une Coupe du Monde qui lui restera gravée dans le cœur à jamais. “C’est une réelle communion entre supporters. Tout le monde est dans le partage, que ce soit Européens, Africains, Américains… Un vrai monde de Bisounours. Ce n’est pas ce qu’on annonçait dans les journaux en début de Coupe. Toutes les personnes partent à la découverte des différentes cultures. On dirait que le pays a été créé pour la Coupe du Monde. Les métros sont à un pas des stades où l’ambiance est incroyable même si, pour la Belgique, il y avait plus d’Australiens que de Belges. Toute la ville ne parlait que de foot, même les Qataris qui, à la base, ne s’y intéressent pas”.

Le problème de la température revenait quand même à sa bouche mais, selon lui, la période était parfaite. “Il fait les mêmes températures qu’un printemps en Belgique. Les autres mois sont trop chauds, même la population qatarie ne peut pas sortir tellement la chaleur est pesante”. Cette population, “Yan” a pu la découvrir via son demi-frère, un habitant de Doha. “Ils rêvent tous d’Europe. Ici, les écoles sont par pays. Par exemple, une école française, où l’on apprend l’histoire et la langue du pays. Les personnes ici sont donc très cultivées, ils connaissent mieux les pays d’Europe que moi-même”. Yanis sera de retour en Belgique juste avant la petite finale, un remake du premier match qu’il a vu au Qatar, qu’il devra donc suivre depuis les températures polaires annoncées en ce mois de décembre. Il pourra cependant y retrouver ses amis et sa famille à qui il a sûrement grandement manqué pendant ce mois d’exil footballistique… “Un peu dégoûté, mais ça va”.
