40 ans après leur finale de Coupe des Coupes face à Barcelone, les Standardmen n’ont pas digéré: «L’arbitre n’a sifflé que des couillonnades»
La défaite du Standard contre le Barça (2-1), il y a quarante ans, en finale de la Coupe des Coupes 1982, reste un crève-cœur pour les acteurs de l’époque.
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Publié le 12-05-2022 à 08h45 - Mis à jour le 12-05-2022 à 15h24
C’est un classique du football belge, parmi les souvenirs amers. La finale de la Coupe des Coupes 1982, entre le Standard et le Barça, est résumée en un mot par Éric Gerets: "Injustice."
L’injustice d’un deuxième but barcelonais tombé à la suite d’un coup franc manifestement trop vite tiré, et qui a surpris les Liégeois. L’injustice ou l’impression que l’arbitre allemand, Walter Eschweiler, n’a sifflé "que des couillonnades", en français dans le texte, selon Gerets.
C’était il y a quarante ans, et Walter Meeuws, sollicité à intervalles réguliers pour évoquer cette première (et seule) finale européenne du Standard, en sourit, avec le temps. "On devient des vieux messieurs, avec ces souvenirs." Mais la mémoire est toujours bonne, pour le défenseur de 70 ans, qui refait le fil du parcours, cette saison-là, anecdotes à l’appui.
Il y a d’abord le seizième de finale aller à Floriana (Malte), sur un terrain où les traces d’une fête étaient encore présentes. "La veille du match, à l’entraînement, on a découvert des capsules de bouteilles sur le terrain, se rappelle Meeuws. Il y avait eu un événement festif, et tout n’avait pas été dégagé, manifestement…"
Le Standard ne se prendra pas les pieds dans les capsules, et il passera douze buts sur l’ensemble des deux matchs (1-3 puis 9-0).
C’était une autre époque, avec des matchs aller-retour, pas de phase de poules, mais Raymond Goethals était déjà un entraîneur qui avait du mal avec les noms. "En huitième de finale, contre des Hongrois (Vasas), Raymond se méfiait d’un joueur au nom imprononçable (Andras Szebeginszki). Il l’avait rebaptisé Joseph, et il n’arrêtait pas de dire: ‘Méfiez-vous de Joseph, il prend toujours la profondeur.’" Ni Joseph ni Szebeginszki n’a marqué, et le Standard s’est qualifié sans trop de mal (0-2 puis 2-1).
Les quarts et demi-finales ont été d’un autre niveau, contre Porto, place forte du football portugais, puis contre Tbilissi, vainqueur sortant de la Coupe des Coupes. Le Standard a fait le travail au match aller contre Porto (2-0 puis 2-2), et Jos Daerden a marqué les deux buts liégeois contre Tbilissi (0-1 puis 1-0).
La route vers la finale était ouverte, mais elle a lieu, au Camp Nou, contre le Barça. "Jouer contre le Barça, c’est déjà difficile sur un terrain neutre. Mais à Barcelone, en plus, devant 105 000 personnes…" souffle Walter Meeuws.
Les jours qui précèdent la finale sont marqués par la rapide fête du titre, après la victoire contre Waterschei (3-1), victoire entachée d’une affaire de corruption , reconnue deux ans plus tard (certains joueurs du Standard, à la demande de Raymond Goethals, l’entraîneur, avaient laissé leurs primes de victoire aux joueurs de Waterschei.
La version populaire prétend que Goethals voulait éviter les blessures avant la finale. La vérité est que l’entraîneur, qui n’a jamais reconnu sa faute, voulait enfin gagner un premier titre de champion de Belgique, qui lui avait toujours échappé avec Anderlecht.
Les joueurs, à l’époque, savent ce qu’ils ont fait, mais ils basculent très vite vers la préparation de la finale, la septième d’un club belge, la première pour la plupart des titulaires - seul Arie Haan avait déjà disputé des finales européennes avec Anderlecht.
"Cette finale, même perdue, m’a servi pour devenir le joueur que je suis devenu", explique Éric Gerets, vainqueur de la Coupe des champions 1988 avec le PSV.
Il aurait aimé ajouter cette Coupe des Coupes 1982. "Cela reste difficile à digérer, même après autant d’années, pose le Lion de Rekem. Si Barcelone avait été plus fort, pas de problème, je l’aurais accepté. Mais ce n’était pas le cas."
Le Standard a d’ailleurs mené, assez vite, au bout de huit minutes. Une course d’élan interminable avant un coup franc d’Arie Haan, un ballon subtil glissé à Wendt, qui centre pour Vandersmissen.
"Notre première période avait été réussie, rappelle Meeuws. On était un peu surpris de jouer d’égal à égal avec la Barça. Mais cela donnait de la confiance."
Jusqu’au but de Simonsen, juste avant la mi-temps. À la réception d’un coup franc d’Esteban, l’international danois profite d’une erreur de jugement de Preud’homme, dans sa sortie.
Elles n’ont pas été nombreuses, les erreurs, dans le chef de l’un des meilleurs gardiens de l’Histoire. Elle fait d’autant plus mal, en raison du moment.
Interrogé par Belga Sport, une émission de la télévision flamande, près de trente ans plus tard, l’ancien entraîneur du Standard dit: "J’ai fait une erreur de jugement." Mais il ajoute: "On a rapidement senti qu’on ne pouvait pas gagner ce match. On savait que le Barça devait sauver sa saison sur un match…"
Et c’est le rôle de M. Eschweiler qui est alors mis en cause. "Il a tout sifflé contre nous en deuxième mi-temps, il a manipulé le match, on ne pouvait pas gagner", ose Jos Daerden, alors que Walter Meeuws a fait le constat "de petites choses dans le match qui allaient chaque fois dans le sens du Barça".
Et arrive le deuxième but barcelonais, qui reste encore une énigme. À la suite d’une faute de Poel sur Moratalla, Simonsen n’attend pas le coup de sifflet de l’arbitre pour glisser le ballon à Quini, qui conclut. Les Rouches restent incrédules. Meeuws se rappelle: "Personne n’a compris pourquoi l’arbitre n’est pas revenu au coup franc. Ce deuxième but est très frustrant, car on ne comprend pas."
Daerden, toujours aussi cash, dans Belga Sport: "Je pense que l’arbitre a reçu un appartement à la côte, à Barcelone…"
Le Standard va perdre cette finale, et Meeuws sera exclu, dans les dernières secondes. "Carrasco gagnait du temps, et je voyais Guy (Vandersmissen), derrière lui, qui ne faisait pas faute. J’étais un peu fâché, je me demandais pourquoi il ne faisait pas une faute. Je suis arrivé lancé, de loin, et Carrasco a bien senti le coup. Il m’attendait."
Le défenseur belge reçoit une deuxième carte jaune, et est exclu. "La saison suivante, j’ai manqué les matchs contre la Juventus à cause de ça", souffle-t-il encore.
Quarante ans après, la frustration est toujours présente, au Standard, mais il reste cette impression, pour les joueurs, d’avoir écrit une partie de l’histoire du club. "Le football belge représentait quelque chose, sur la scène européenne, avec Anderlecht et Bruges. Et on venait apporter notre contribution", glisse Meeuws, alors que Gerets retient le positif: "On avait une grande défense quand même." Elle n’a concédé que six buts en neuf matchs, dont un, le dernier, fatal, presque tombé du ciel.
FC Barcelone (Esp) - Standard 2-1FC Barcelone: Urruti; Alexanko, Migueli, Moratalla, Manolo, Miranda; Sánchez; Vigo, Carrasco, Simonsen, Quini (Entraîneur: Udo Lattek) Standard: Preud'homme; Gerets, Meeuws, Poel, Plessers; Daerden, Vandersmissen, Botteron, Haan; Tahamata, Wendt (Entraîneur: Raymond Goethals) Exclusion: 90e Meeuws. Les buts: 8e Vandersmissen (0-1), 45e Simonsen (1-1), 63e Quini (2-1).
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