INTERVIEW | Jacky Munaron évoque le «meneur d’hommes» Robert Waseige: «Il était comme un père»
Passé sous les ordres de Robert Waseige au RFC Liège avant de devenir son entraîneur des gardiens chez les Diables, Jacky Munaron ne garde que de bons souvenirs de son défunt mentor.
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Publié le 18-07-2019 à 14h47
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Avec la mort de Robert Waseige, c'est tout le football belge qui est en deuil. Le «Mage de Rocourt» a construit sa légende tout au long de sa longue carrière et ne laisse que de bons souvenirs derrière lui, comme peut en témoigner Jacky Munaron. Principalement connu pour son passage à Anderlecht, le gardien namurois a ensuite côtoyé Robert Waseige chez les «Sang et Marine» avant de le retrouver sur le banc des Diables rouges. Il se souvient d'un homme entier et intransigeant mais tellement humain.
Jacky, qu’est-ce que cela vous a fait d’apprendre la triste nouvelle?
J’avais déjà un mauvais pressentiment quand j’ai appris qu’il était admis à l’hôpital et que seule la famille pouvait se rendre à son chevet. À l’annonce de son décès, j’ai évidemment été très triste car on a vécu beaucoup de belles choses ensemble.
Notamment lors de votre passage au RFC Liège où Robert Waseige a remporté son seul et unique trophée avec vous entre les perches?
Quand j’ai quitté Anderlecht en 1989 à cause de problèmes physiques, personne ne me voulait par crainte de rechute. Le seul qui m’a fait confiance, c’est Robert Waseige. Et au final, ce fut une magnifique saison avec une Coupe de Belgique remportée et un très beau parcours en Coupe d’Europe. D’ailleurs, après notre victoire contre le Rapid Vienne, je lui avais sauté dans les bras. Cette saison réussie, c’était une revanche sur le sort pour moi mais aussi un cadeau pour lui et tout le travail qu’il avait accompli à la tête de l’équipe.
Si son expérience au Sporting Portugal n’a pas été concluante, c’est parce que son traducteur n’a pas su retransmettre sa hargne et ses émotions au groupe
Que retenez-vous de Robert Waseige en tant que coach?
Il a toujours été un gagneur qui détestait la défaite. C’était un meneur d’hommes et un grand motivateur. Si son expérience au Sporting Portugal n’a pas été concluante, c’est parce que son traducteur n’a pas su retransmettre sa hargne et ses émotions au groupe. Il était également en avance sur son temps car il lisait beaucoup de bouquins sur le physique et le mental. Il avait même fait appel à un sophrologue pour la gestion du stress. C’était l’un des premiers à faire ça.
Et en tant que personne, comment était-il avec ses joueurs?
Il était sérieux mais, parfois, il lâchait une remarque et tout le monde se pliait en quatre. Je me souviens notamment de ce poisson d’avril en 1991 où il avait manigancé avec RTL-TVI en faisant passer un journaliste pour une nouvelle recrue. Je suis tombé dans le panneau car je me disais: «C’est qui ce guignol qui ne sait pas jouer?» Robert Waseige était à la fois humain et intransigeant. Au fond, il était comme un père. Il pouvait être sévère mais toujours pour la bonne cause. Certains acceptaient difficilement ses remarques et d’autres en pleuraient même, mais ça l’a permis de se faire respecter partout où il est passé.
Après votre carrière dans les buts, vous l’avez ensuite retrouvé sur le banc des Diables en tant que coach des gardiens avec des hauts et des bas. Quel souvenir gardez-vous de cette époque?
L’Euro 2000 a été une grosse déception. Certains ont craqué avec la pression de jouer dans leur propre pays. Ensuite, il y a eu ce Mondial 2002 au Japon et en Corée où on était tous prêts à aller au feu pour lui, qu’on soit joueur ou membre du staff. Je me souviens avoir couru dans les bras de Robert après notre qualification pour les huitièmes avant ce fameux goal de Wilmots refusé contre le Brésil et qui nous élimine.
C’était quelqu’un d’entier qui n’allait jamais baisser son pantalon et ça ne plaisait pas à tout le monde
Malgré ce beau parcours et un beau bilan à la tête des Diables, Robert Waseige a quitté la sélection nationale brutalement en 2002.
Ce fut très difficile au début car une certaine presse flamande lui est rapidement tombée dessus. Comme à son habitude, il cherchait à motiver tout le monde en tapant sur le clou. Certains en avaient marre de ses piques et ça a mal tourné, notamment à cause d’une taupe dans le staff. C’était quelqu’un d’entier qui n’allait jamais baisser son pantalon et ça ne plaisait pas à tout le monde.
Malgré tout ce qu’il avait accompli au RFC Liège, sa belle aventure à Rocourt n‘avait pas non plus connu une fin heureuse…
Non car il a été poussé vers la sortie lors de sa troisième saison. Tout ça à cause de certains joueurs qui n’avaient pas le niveau et n’acceptaient pas ses méthodes. Je n’étais pas d’accord avec ce départ. J’ai voulu défendre mon coach qui ne méritait pas ça. D’ailleurs on m’avait pris en grippe pour ça.
Vous l’aviez revu dernièrement?
J’avais entendu qu’il n’était pas en très bonne santé ces derniers temps mais ça faisait longtemps que je ne l’avais plus vu. On ne passait pas notre temps ensemble mais on se téléphonait pour les anniversaires ou pour la nouvelle année. Je suis vraiment touché par son décès et mon épouse aussi car, pendant trois ans, nous étions côte à côte en tribune. Ce qui est certain c’est qu’il restera à jamais une personnalité qui a marqué la D1 belge et qui suscitera toujours un énorme respect.