Zoom sur la première journée en rose de Remco
Retour sur les 24 premières heures de Remco Evenepoel avec le maillot rose sur le dos, ce dimanche, suite à son succès sur le chrono inaugural.
Publié le 07-05-2023 à 21h55 - Mis à jour le 08-05-2023 à 06h00
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J’ai toujours été attiré par le maillot rose. D’abord parce que c’est une tunique prestigieuse. Puis, parce que mon histoire cycliste avec l’Italie a été compliquée jusqu’ici et que je veux changer ça."
Le souhait émis par Remco Evenepoel à la veille de la Grande Partenza de ce Tour d’Italie a pris forme dès samedi. Le champion du monde n’a pas attendu pour s’emparer du leadership en écrasant le chrono de 19,6 km entre Fossacesia Marina et Ortona.
Le long de la mer Adriatique, le bolide brabançon a écœuré la concurrence. D’emblée un véritable coup de canon apprécié par les très nombreux spectateurs italiens, réputés pour aimer autant les grands champions que leurs compatriotes.
Une chambre pour éviter toute fatigue inutile
Pour rendre possible cette performance exceptionnelle, Soudal Quick-Step n’avait négligé aucun détail, allant jusqu’à réserver une chambre à la journée pour son prodige à quelques hectomètres du départ. "Parce que le bus se trouve à deux kilomètres et qu’on veut qu’il garde toute sa fraîcheur pour l’effort chronométré", nous a glissé Patrick Lefevere. Pendant que son poulain moulinait tellement vite qu’on avait parfois l’impression qu’il pédalait dans le vide – alors qu’il utilisait un grand plateau à 60 dents – le manager roularien ne masquait pas son épatement. Nerveux au début, Lefevere exprima sa joie par une onomatopée.
"Il nous a de nouveau impressionnés, même s’il s’était préparé de manière maniaque pour ça. Ces derniers mois, seul l’objectif du Giro comptait. Il a mis tout le reste de côté et voilà, clama le patron du Wolfpack, protégé du généreux soleil par un chapeau blanc du plus bel effet. Remco met Roglic à 43 secondes, c’est beaucoup, mais il faut rester vigilant. On sait que le Giro est une course atypique qui se décide en troisième semaine. Mais il a travaillé pour être prêt sur la longueur."
Plus d’une heure de cérémonie protocolaire
Le héros du jour eut tout juste le temps de récupérer qu’il entama le long protocole auquel doit se soumettre tout leader d’un grand tour. D’abord, il dut satisfaire au contrôle antidopage auquel le porteur du maillot rose n’échappe jamais. Ensuite, il monta à quatre reprises sur le podium. Pour enfiler, coup sur coup, les maillots blanc de meilleur jeune, cyclamen de… meilleur sprinter et rose, celui de meilleur grimpeur revenant à McNulty qui avait été plus rapide (si si !) que lui dans la bosse finale. À chaque fois, il eut droit à un bouquet de fleurs qu’il s’empressa de remettre à sa femme, Oumi. Il fit tout avec le sourire même si cela s’éternisait. "Cela fait partie de mon job, dit-il. Et puis, il y a plus désagréable qu’être mis à l’honneur."
Descendu de son trône, il entama les interviews avec les chaînes de télévision et autres sites internet, parqués dans une zone mixte exigüe. D’abord, les détenteurs de droits. Après, les autres. Et la presse écrite ? Ses représentants l’attendaient dans un bus mobile dans lequel il devra monter aussi longtemps qu’il sera leader du Giro. "Même si je ne m’attendais pas à creuser de tels écarts, ce n’est pas la plus belle victoire de ma carrière, lancera le premier Belge à enfiler ce maillot rose depuis Rik Verbrugghe en 2001. Je place Liège-Bastogne-Liège et les championnats du monde au-dessus."
Un discours fédérateur
Le temps de prendre la pause avec sa femme pour les photographes et il put enfin rejoindre ses équipiers et le staff du Wolfpack à l’hôtel. "On va en profiter, dira Lefevere. Un petit verre, une bonne assiette de pâtes et tôt au lit."
"Oui, les autres ont bu un verre, confirmera le lendemain le champion du monde. Mais on a surtout veillé à bien dormir.
Et il a tenu à les remercier à travers un discours fédérateur. "Je pense qu’on démarre bien le mois, commença-t-il après avoir sabré le champagne. Je veux surtout remercier le staff, qui nous a très bien préparés pour ce chrono. Le matériel, l’alimentation… tout était parfait. Maintenant, c’est à nous, coureurs, à gérer la course, à nous montrer prudents aussi. Nous devons rester concentrés car il y a encore un très long chemin jusqu’à Rome mais nous ne pouvions pas espérer meilleur départ."
La presse étrangère dithyrambique
Un départ salué comme il se doit par la presse internationale. La Gazzetta dello Sport écrivit dans son édition dominicale: "Si élégant et si puissant." Le journal espagnol AS faisait état d’un "contre-la-montre stratosphérique où il a écrabouillé ses rivaux. Remco a volé comme une fusée". L’Équipe parla, elle, de "coup de massue du champion du monde, qui a écrasé la concurrence".
Dimanche midi: nouvelles sollicitations
On ne sait pas si Remco Evenepoel a pris connaissance de tous ces superlatifs mais, dimanche en fin de matinée, il faisait de nouveau l’objet des sollicitations. Longtemps réfugié dans le bus de son équipe au départ à Teramo, il eut droit à des applaudissements nourris de fans qui faisaient le pied de grue devant le Pullman bleu.
Il lui fallut alors monter avec ses équipiers sur le podium pour la traditionnelle présentation des équipes. Après avoir signé la feuille de départ, il fit un passage éclair devant les médias agglutinés dans une zone mixte. "Avoir la maglia rosa est spécial, nous dit-il. J’ai l’impression qu’il attire plus l’attention que le maillot rouge de la Vuelta. Bon, il y a quand même moins de regards tournés vers moi que lorsque je porte le maillot de champion du monde."
On lui rappela que s’il devait rester en tête jusqu’à Rome, il n’arborera pas une seule fois la tunique arc-en-ciel durant trois semaines, puisqu’il roule les chronos avec les couleurs distinctives de champion de Belgique de l’exercice. "L’irisé est, évidemment, le maillot le plus prestigieux de tous mais ce n’est pas un problème pour moi de ne pas l’avoir sur le dos, réagit-il, réfugié derrière un masque. Cela voudra dire que j’aurai réussi quelque chose de bien. J’espère même ne pas devoir le porter souvent jusqu’à l’arrivée à Rome."
Un high five avec Oumi pendant l’étape
"Si on voit que les équipes de sprinters doivent contrôler la course aujourd’hui, on les laissera évidemment faire. Dans ce cas, ce sera une étape plus calme pour nous." Le scénario souhaité par le maillot rose eut lieu lors d’une étape conclue par un sprint final remporté par Jonathan Milan. "J’ai veillé à rester dans les premières places et j’ai évité la chute qu’il y a eue. Pour moi, ça a été une super-journée", dit-il à l’arrivée à San Salvo.
Il a même eu le temps de taper dans la main d’Oumi, postée le long de la route et vêtue de rose pour l’occasion. Un week-end parfait pour le champion du monde. Parfait mais chargé.