Philippe Gilbert commence sa nouvelle carrière derrière le micro: "Arnaud De Lie sera au rendez-vous ce samedi"
Dès ce samedi au Nieuwsblad, Philippe Gilbert entamera une nouvelle carrière de consultant pour Eurosport.
Publié le 24-02-2023 à 19h35
:focal(2425x1625:2435x1615)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/YTSSTSSAQFHIJIZWLGZK4GBAMA.jpg)
Depuis qu’il est descendu du vélo après avoir passé vingt ans au sein du peloton, Philippe Gilbert n’a pas encore eu le temps de s’ennuyer. “J’ai pas mal de projets, mais une chose à la fois”, dit-il. Dès ce samedi au Circuit Het Nieuwsblad, il entamera sa carrière de consultant pour Eurosport. “Je serai sur la moto”, précise celui qui donne également des conférences à différentes entreprises.
Le nombre de courses qu’il fera durant l’année n’a pas encore été défini et l’ancien champion du monde ne sait pas encore s’il participera à l’aventure du Tour de France pour la chaîne sportive. Mais avant le week-end d’ouverture, il avait des choses à dire. Comme toujours.
Vous entamerez, donc, ce samedi une nouvelle aventure. Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
”J’ai beaucoup d’impatience. J’ai très envie de découvrir ce nouveau métier pour moi, ainsi que cette nouvelle position que j’aurai au sein de la course. Ça va être très intéressant de voir son déroulement autrement.”
Vous voilà également conférencier, puisque ce jeudi soir, vous avez donné une conférence à des entreprises…
”J’avais déjà énormément de demandes à ce niveau-là quand j’étais cycliste, mais c’était totalement impossible de caler cela dans mon agenda. Je n’avais vraiment pas le temps. J’ai hâte de me lancer aussi là-dedans. Cela va me permettre de varier les plaisirs.”
"Le cyclisme mérite un vrai débat, avant et après la course."
La transmission, c’est quelque chose d’important pour vous ?
”Oui, oui, bien sûr. Mon but est de pouvoir apporter mon expérience et de parler du cyclisme. Il y a tellement de choses à dire sur une course cycliste ! Quand je vois que l’on arrive à débriefer un match de foot – parfois pas très passionnant – pendant une heure, je me dis que l’on pourrait parler durant deux heures d’une course cycliste qui a duré presque toute la journée. Le cyclisme mérite un vrai débat, avant et après la course. C’est dommage que cela n’existe pas, même si c’est sans doute dû au temps d’antenne déjà très long que requiert l’événement.”
Pour la première fois, vous n’avez pas dû effectuer la préparation hivernale d’un cycliste professionnel…
”Oui, et cela ne m’a pas manqué du tout. J’ai apprécié le fait d’être beaucoup plus souvent au calme à la maison. J’ai pu faire des choses qui m’ont fait plaisir.”
Vous avez notamment participé à une course à pied à Monaco.
”Oui, c’était vraiment pour le plaisir. Je me suis inscrit la veille, sur un coup de tête. Je n’avais aucune préparation.”
C’était une course de 10 kilomètres. Peut-on vous demander votre chrono ?
”J’ai mis 41 minutes, mais j’ai vraiment couru à la cool.”
Que vous manque-t-il du vélo aujourd’hui ?
”(Catégorique) Rien. J’en ai fait assez. Vingt ans au niveau pro, je pense que ce n’est pas mal. Il n’y a rien qui me manque. Pour le moment, en tout cas.”
"Les coureurs ont une force qu’ils sous-estiment."
Exercez-vous toujours un rôle au sein de la commission chargée de défendre les intérêts des cyclistes auprès de l’Union cycliste internationale (UCI) ?
”Oui, oui. Mais je trouve dommage qu’il y ait un tel manque d’investissement des coureurs, en général. Les équipes devraient aussi jouer un rôle dans ce domaine. Elles pourraient davantage faire bouger les choses. Si les coureurs s’unissent et se présentent en nombre face à l’UCI, leur voix aura beaucoup plus de poids. C’est dommage qu’ils n’en prennent pas conscience. Les coureurs ont une force qu’ils sous-estiment. Je les entends souvent se plaindre de telle ou telle chose mais, alors, pourquoi ne s’unissent-ils pas ? Ça aurait beaucoup plus d’effet qu’aujourd’hui. La solution est simple, mais peut-être est-elle difficile à mettre en place.”

Pourquoi les jeunes leaders ne s’investissent pas davantage pour la sécurité du peloton, selon vous ?
”C’est dû au fait que c’est un sport très prenant, qui prend énormément de temps, qui demande beaucoup d’énergie. Je peux comprendre que les coureurs n’ont pas envie de répondre à des mails quand ils rentrent chez eux après une journée passée sur le vélo. En outre, on voyage encore plus qu’avant. Quand je vois les activités de certains sur Strava, je me dis qu’ils ne sont jamais chez eux. Ça en devient affolant. Entre les stages en altitude, les reconnaissances des courses, les tests divers et les obligations professionnelles, c’est un peu devenu de la folie.”
"Remco est déjà très présent, c'est bon signe pour la suite."
Ce samedi s’ouvre la saison des classiques en Belgique avec le Circuit Het Nieuwsblad. Un favori se dégage-t-il ?
”Non, je ne vois pas un nom sortir du lot. Plusieurs coureurs ont montré une belle forme. Je pense à Pidcock, Küng ou encore Casper Pedersen. Et, bien sûr, il y a Arnaud De Lie. Il est tout à fait capable de la gagner. Ce, d’autant plus que ce n’est pas un parcours extrême. S’il passe le Molenberg avec les meilleurs, je ne le vois plus se faire lâcher après. Je pense qu’il sera au rendez-vous ce samedi.”
Vous avez gagné cette course à deux reprises (2006 et 2008). Qu’a-t-elle de particulier ?
”Comme c’est la première de l’année en Belgique, il y a une grande attente. De la part des équipes, des supporters et des médias. C’est une course qui attire énormément de public. Cela joue aussi dans la tête des coureurs. Le Tour des Émirats arabes unis est sympa, mais il n’y a personne sur le bord des routes. Samedi, ce sera l’effervescence. Il y aura cette ambiance de kermesse dont les amateurs belges de vélo raffolent.”
"Arnaud a les pieds sur terre. Il ne s’enflammera pas."
Pour en revenir à Arnaud De Lie, le connaisseur que vous êtes est-il surpris par son évolution ultrarapide ?
”Je ne le suis pas parce qu’il gagnait déjà d’une manière impressionnante chez les jeunes. Il ne se contentait pas de régler tout le monde, il attaquait. Et puis, il passait déjà très bien les bosses. Lors de la Philippe Gilbert Classic, je l’ai vu très à l’aise dans la Redoute. En juniors, il démontrait déjà des capacités bien au-dessus de la moyenne. En outre, Arnaud a les pieds sur terre. Il ne s’enflammera pas. Un tel état d’esprit va l’aider. C’est pour ça que je le vois aller vraiment très loin.”
Il va également découvrir Milan-Sanremo. Ce monument peut-il déjà lui convenir ou est-ce encore trop tôt ?
”Ça peut déjà lui convenir. En tout cas, je pense qu’il sera présent dans le final. Je ne vois pas pourquoi il serait lâché avant le Poggio. S’il doit être en difficulté, ce sera éventuellement dans cette ascension, mais pas avant.”
Si l’on vous dit qu’il est né du bon côté de la frontière linguistique et que cela lui permet de ne pas avoir trop de pression médiatique trop tôt…
”C’est peut-être un peu le cas, oui. Mais on attend quand même déjà beaucoup de lui du côté flamand. Il est l’un des coureurs belges dont on parle le plus.”

Qu’attendez-vous de Remco Evenepoel cette année-ci ?
”S’il réussit la même chose que l’an passé, ce sera très bien (il rit). C’est en tout cas ce qu’il a annoncé nourrir comme objectif. Et comme, en général, il ne se trompe pas quand il annonce quelque chose… Il a la qualité d’être très réaliste. Je pense que Remco est parti pour faire quelques belles années au plus haut niveau.”
Quels sont les dangers pour lui après une année où il a gagné un monument, un grand tour et les championnats du monde ?
”Selon moi, il n’y en a pas. En tout cas, je n’en vois pas. À l’UAE Tour, il montre qu’il est déjà en grande forme. Remco est présent dès le début de saison et c’est un très bon signe pour la suite.”
"Je ne me fais aucun souci pour Wout."
Concernant Wout van Aert, n’est-il pas temps qu’il gagne un monument flandrien ?
”Oh, vous savez, il ne faut pas s’en faire pour lui. Il a déjà gagné Milan-Sanremo et on sait qu’il fait du Tour des Flandres et de Paris-Roubaix des objectifs concrets. C’est vrai que jusqu’à présent, il ne s’y est jamais imposé, mais il tourne autour de la victoire. Mais je ne me fais aucun souci pour Wout, il ne tardera pas à gagner le Ronde ou à se montrer le meilleur dans l’Enfer du Nord. Il n’y a aucune raison qu’il n’y parvienne pas.”
Au vu de la domination qu’exerce Tadej Pogacar depuis le début de la saison, est-on en droit de se dire qu’il pourrait être à l’apogée de sa carrière cette année ?
”Je ne sais pas. Il fait toujours des gros résultats en début de saison. Pour moi, il est parti sur les mêmes bases que les autres années, sauf qu’il s’aligne sur d’autres courses.”
De son côté, Jonas Vingegaard ne roule pas beaucoup en compétition. N’est-ce pas prendre un gros risque ?
”Attendons quelques années et on saura qui a effectué les bons choix. On verra alors qui a le plus beau palmarès ou a gagné le plus d’argent, ce qui peut aussi constituer un objectif.”
"Julian Alaphilippe est plus sélectif qu'avant."
Enfin, Julian Alaphilippe va-t-il rebondir cette saison après deux années compliquées ?
”Je l’espère pour lui. Durant quelques années, Julian a couru un maximum et ça lui a réussi. Maintenant, j’ai l’impression qu’il est un peu plus sélectif dans ses choix et dans ses moments de forme. Avant, il essayait d’être présent du début à la fin de l’année. J’ai le sentiment qu’aujourd’hui, il choisit certains moments pour avoir un pic de forme. C’est logique. Quand on est jeune, on fait tout à fond. Avec l’âge, on fait davantage de sélections parce qu’on y est obligé. En tout cas, je trouve dommage que son manager chez Soudal Quick-Step et lui ont beaucoup communiqué cet hiver via les médias. Avec tous les moyens de communication qui existent, je ne pense qu’on ait besoin de la presse pour parler à son coureur.”