Steven Defour: "Coacher Malines, mon club de cœur, en finale, c’est particulier"
Steven Defour préface la finale de la Coupe de Belgique, entre Malines et l’Antwerp, et fait le bilan de sa première saison d’entraîneur. Un bon bilan, qui pourrait être très bon en cas de succès dimanche. Malines - Antwerp : Dimanche, 14h30
Publié le 29-04-2023 à 06h00
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Les jours qui précèdent une finale de Coupe de Belgique sont toujours particuliers. La pression commence à monter, on décompte les heures et une certaine impatience gagne le club. Steven Defour a vécu ces avant-matchs comme joueur – il a été finaliste de Coupe à plusieurs reprises, avec le Standard, Porto et Anderlecht, et il a remporté la Coupe de Belgique avec le Standard, en 2011.
Il découvre, depuis lundi, l’avant-match comme entraîneur, et ce n’est pas tout à fait la même chose, forcément. "Je réfléchis à mon briefing depuis le début de la semaine, j’ai les grands principes en tête. Après, il faudra aussi laisser parler les émotions", explique-t-il en ce milieu de semaine, par téléphone.
Interview d’un jeune entraîneur (35 ans), qui a l’occasion de gagner un premier trophée pour ses débuts.
Steven, peut-on dire que votre première saison d’entraîneur est réussie avec le maintien et cette finale ?
Je pense qu’on peut le dire, oui, vu les circonstances et le fait que c’est ma première expérience d’entraîneur, avec une reprise en cours de saison (NdlR : il a repris l’équipe en octobre, pour remplacer Danny Buijs). La seule ambition était le maintien, au début, et on devait toujours courir derrière les événements, et les points. On avait peu de marge, et on a connu une saison avec des hauts et des bas. Mais à l’analyse, le maintien a été acquis et sans quelques points perdus, on aurait pu être plus proche du top 8.
Quelle est votre plus grande réussite: avoir assuré le maintien ou qualifier l’équipe pour la finale ?
Si on gagne la Coupe, ce sera évidemment une grande réussite. Mais je retiendrais d’abord ce qu’on a fait durant le championnat. C’est un travail plus consistant, alors que la Coupe, c’est six matchs.
Vous avez repris l’équipe dans un contexte délicat, d’un point de vue sportif, puis l’actionnaire a changé au début de l’année. Comment avez-vous géré cela ?
Cela n’a pas trop perturbé le groupe, tout le monde était payé en temps et en heure. En revanche, on savait que le budget n’était pas énorme. Cet hiver, on avait besoin d’un attaquant, par exemple, car Ngoy et Malede sont plutôt des avants qui aiment s’écarter alors que Mrbati a été gêné par les blessures. On avait besoin d’un attaquant central, mais on n’a pas pu en faire, car on n’avait pas les finances. Le propriétaire a changé (NdlR: Dieter Pletinckx a été remplacé par l’homme d’affaires néerlandais Philippe Van Esch), cela donne un peu d’air, mais on sait déjà qu’au prochain mercato estival on n’aura pas nécessairement beaucoup de liquidités.
Votre sœur vous surnomme Stevie Wonderboy, vu votre réussite lors de cette première saison. Vous validez ?
Si elle le dit, je ne peux que valider (sourire). On a réussi, avec le staff, à faire un bon boulot, avec un budget restreint, des blessés, un noyau qui n’était pas large. Contre Zulte Waregem, en demi-finale, la moyenne d’âge du banc était de 18 ans.
Jouer contre l’Antwerp, où vous avez joué, rend-il la finale un peu plus particulière ?
J’ai passé de bons moments à l’Antwerp, mais si ce match est particulier pour moi, c’est parce que je coache Malines, mon club de cœur, en finale d’une Coupe de Belgique, pour ma première expérience d’entraîneur. Ça, c’est particulier.
Forcément, vous aurez une pensée pour votre papa…
Il est toutes les semaines dans mes réflexions, avant chaque match (NdlR: son papa, qui était le délégué quand Defour était en équipes d’âge, est décédé en 2019). Qu’on gagne ou qu’on perde, dimanche, ce sera très spécial après le match. J’aurais aimé qu’il soit là, mais il sera avec nous, en pensées.
Le dernier match de championnat contre l’Antwerp a été une correction (défaite 5-0). Peut-il vous servir pour la finale ?
Il peut aider, mais il faut se souvenir du contexte. On venait de se qualifier pour la finale, il y avait eu de la décompression. Mais il y a des choses qui serviront. On avait laissé trop d’espaces dans le dos, on était en retard sur les deuxièmes ballons, le pressing n’était pas bon. On a eu des moments délicats après la qualification, et quelques matchs moins bons (Malines avait pris 3 points sur 15). On a eu une grosse conversation avec les joueurs. C’est bien de penser à la finale, mais il ne faut pas se projeter trop tôt, car on ne peut pas être prêt en une semaine. De ce point de vue, les matchs contre Gand (1-1) et à Anderlecht (2-3) ont permis de voir de meilleures choses, pour bien préparer le match de dimanche.
Comment votre réflexion a-t-elle évolué pour devenir entraîneur ?
Quand tu es adjoint, tu vois différentes approches. J’avais vu celle de Wouter (Vrancken, à Malines), j’ai passé une semaine à Burnley, et j’ai vu comment travaillait le coach (Sean Dyche), puis j’ai côtoyé Stan Buijs au début de la saison. J’ai pu avoir trois versions différentes, les confronter avec ce que je pense, faire évoluer mes opinions. À un moment, on se sent prêt, et je l’étais quand on m’a proposé de reprendre l’équipe.
Quels sont vos principes de jeu ?
Je veux développer un jeu offensif, avec des combinaisons au sol, et y mettre de l’intensité. C’est ce qui manque un peu à notre équipe, parfois. On a beaucoup de bons joueurs, mais il manque un peu le côté pitbull, on va dire. Alors on doit l’amener, avec le staff. Mais on aimerait le transmettre aux joueurs.
Steven Defour, joueur, avait un côté pitbull. Vous auriez aimé avoir un joueur comme vous, qui ne se laisse pas faire ?
J’aime bien quand les joueurs viennent me voir directement, parce que ça veut dire qu’ils sont impliqués dans le projet, qu’ils réfléchissent aussi à ce qu’ils veulent. Il n’y a rien de mieux qu’un joueur qui se sent à l’aise dans un système. Et ces discussions peuvent m’aider comme entraîneur, pour faire évoluer mon point de vue.
Quels entraîneurs ont été vos sources d’inspiration ?
J’ai aimé le style de jeu de Porto, basé sur la possession (NdlR: à Porto, il a eu Vitor Pereira, Paulo Fonseca et Luis Castro comme entraîneur), mais d’un autre côté, j’ai su aussi retenir l’approche tactique de Preud’homme et Bölöni ou la psychologie de Dyche (à Burnley), la manière dont il préparait son équipe.
Vous êtes au début de votre carrière. Vous projetez-vous déjà vers la suite, en Belgique ou à l’étranger ?
Malines est mon club de cœur, mais je sais qu’un jour, ça se finira. Pour le moment, je n’y pense pas, mais je ne me verrais pas entraîner dans un autre club en Belgique, même du top. À l’étranger, si le projet se présente bien, pourquoi pas ? Mais j’ai encore beaucoup de boulot à Malines.
À l’approche de la finale, ressentez-vous plus la pression comme entraîneur que quand vous étiez joueur ?
J’étais plus calme quand j’étais joueur, certainement, car, sur le terrain, j’avais confiance en mes capacités pour changer les choses s’il le fallait. Quand tu es entraîneur, tu te sens parfois impuissant, parce que le message ne passe pas bien. Et attendre la mi-temps, ce n’est pas toujours facile. Quand tu es joueur, quand tu perds, ou que tu es moins bien, tu vas sur le banc. Quand tu es entraîneur, si les résultats ne suivent pas, à un moment, ça s’arrête.
Beaucoup de jeunes entraîneurs belges percent en ce moment. Comment l’expliquez-vous ?
C’est une évolution des choses. On travaille de plus en plus avec des ordinateurs, des datas, le jeu évolue. L’intensité du jeu a changé aussi par rapport à il y a dix ou quinze ans. Les joueurs commencent à jouer de plus en plus tôt, vers 16-17 ans, c’est un peu dans la continuité des choses que les entraîneurs arrivent de plus en plus tôt.