Anderlecht en crise : pourquoi le président Wouter Vandenhaute ne démissionnera pas
Dégoûtés par la situation sportive et financière du club, les supporters d’Anderlecht demandent le départ du président Wouter Vandenhaute. Pas si simple.
Publié le 11-01-2023 à 19h20
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C’est la crise totale à Anderlecht. Ce mercredi, les supporters ont même rédigé une lettre ouverte demandant la démission du président Wouter Vandenhaute. Même si ce dernier est fortement touché par cette action, il ne jettera pas l’éponge. Il n’est pas non plus question d’un licenciement.
Partir, c’est perdre des millions
Que ce soit dans le monde des affaires ou en tant qu’organisateur de courses cyclistes, Wouter Vandenhaute est un habitué des critiques à son encontre, mais il n’a jamais été du genre à abandonner facilement. Il ne le fera d’ailleurs pas non plus à Anderlecht, qu’il considère comme son bébé et qu’il a juré de sauver.
Malgré la tempête que son club traverse actuellement, il reste convaincu que sa politique va remettre le Sporting sur les rails. Comme Bart Verhaeghe l’a fait avec le Club Bruges après des années de galère.
Une autre raison exclut un départ prématuré de Vandenhaute. Avec son partenaire d’affaires Geert Duyck, il a investi 24 millions d’euros dans le RSCA. Cet effort financier conséquent constituait l’une des manœuvres orchestrées pour obtenir une hausse de capital à hauteur de 42 millions d’euros et assurer la survie du club. Le président-actionnaire ne va pas quitter le navire en y laissant son argent.
La colère noire de Coucke
Le constat vaut également pour Marc Coucke, le propriétaire du RSCA. Depuis son rachat du club en décembre 2017, il y a déjà injecté 130 millions d’euros. Il ne le dit pas tout haut, mais l’homme d’affaires doit déjà souvent avoir regretté sa décision de reprendre le club le plus couronné de Belgique. Il a d’ailleurs décidé de ne plus mettre un euro supplémentaire dans le RSCA.
Quelques heures avant le précédent Topper perdu face au Club Bruges (0-1, le 16 octobre), Coucke a d’ailleurs piqué une crise de colère durant le conseil d’administration. Il était furieux que la masse salariale ait augmenté de 50 à 57 millions d’euros et que le club allait une fois de plus devoir annoncer une perte opérationnelle de 27 millions d’euros.
Coucke pointait également du doigt les mauvais transferts. Cette fois, Peter Verbeke n’a pas pu trouver de buteur comme Nmecha, Zirkzee ou Kouamé. Silva n’est pas un renard des surfaces et Esposito est une catastrophe totale. Nilsson Angulo et surtout Ishaq – le transfert le plus cher de la saison avec ses 3 millions d’euros – font penser à Bundu. Ils sont trop courts pour l’équipe A et jouent en U23. Et la direction a refusé de vendre Françis Amuzu à Nice pour 9 millions d’euros. Depuis lors, il n’en touche (presque) plus une.
Kindermans, la goutte d’eau
La onzième place au classement empire évidemment la situation. Si Anderlecht avait battu l’Union SG à dix contre onze dimanche dernier, la crise n’aurait pas été si profonde aujourd’hui. Mais la goutte qui a fait déborder le vase – comme le disent les supporters dans leur lettre ouverte – a été la mise à l’écart de Jean Kindermans, directeur de l’école des jeunes. La décision date pourtant du mois de novembre mais elle a fuité, lundi, au lendemain de la dixième (!) défaite de la saison en championnat. Son gros salaire avec bonus – il était le dernier rescapé de l’ère Van Holsbeeck – était une épine dans le pied de Vandenhaute. Ce dernier espère sincèrement que Kindermans acceptera de rester à des conditions fortement revues à la baisse mais sans doute rêve-t-il. Ce n’est pas le premier clubman que le président vire. Il l’avait déjà fait avec son ami Frankie Vercauteren mais, cette fois, il se retrouve au cœur d’une tourmente. Il fallait hélas s’y attendre.
Kompany, ce paratonnerre
Le 27 mai 2022, date du limogeage de Vincent Kompany, nous écrivions: "Anderlecht a perdu son paratonnerre. Tant que Kompany était là, les dirigeants restaient à l’abri de la tempête. Ils ont pris le risque de s’exposer à la rage des fans en cas de crise."
Plus de sept mois plus tard, c’est exactement ce qui est en train de se passer. Et ce qui accentue encore la colère des supporters, est la première place de Kompany avec Burnley (D2 anglaise), où il est considéré comme un messie. L’entraîneur Kompany ne faisait pourtant pas l’unanimité auprès des supporters mauves, il faut aussi s’en rappeler. Mais entre-temps, ses deux qualifications pour les playoffs 1 et sa qualification pour la finale de la Coupe de Belgique sont considérées comme des petits exploits.
Vandenhaute a voulu jouer le dur en décidant de se séparer de Kompany. Il ne tolérait pas que son (ancien) entraîneur réclame les pleins pouvoirs sportifs. L’ancien capitaine des Diables rouges avait très mal pris un discours de Vandenhaute dans le vestiaire après l’une ou l’autre défaite. Le vestiaire était le domaine du T1 et de personne d’autre, estimait Kompany. C’est pour cette raison qu’il a exigé un rôle de manager à l’anglaise.
Mazzù, erreur de casting
Ébloui par le succès de Felice Mazzù à l’Union SG, Wouter Vandenhaute a suivi le principe de l’Anderlecht de Constant Vanden Stock et Michel Verschueren: renforçons-nous avec la pièce maîtresse de notre grand rival. Sauf que Mazzù prônait un tout autre football que Kompany. Enorme erreur de casting. Formatés selon la méthode Kompany, les joueurs n’ont pas su s’adapter aux principes de l’ancien Entraîneur de l’année et la direction a réagi quand il était trop tard. Le 24 octobre, jour du limogeage de Mazzù, la saison était déjà gâchée.
Les efforts que Vandenhaute a dû consentir pour réparer ses erreurs ont évidemment coûté des fortunes. Virer Mazzù et son staff, et débaucher le duo danois Fredberg – Riemer ont été des opérations coûteuses. Sans parler de la signature de Jan Vertonghen, un transfert réalisé par Vandenhaute lui-même. Forcément, le Diable rouge touche un salaire qu’Anderlecht ne comptait plus offrir à qui que ce soit.
La patate chaude
Vandenhaute doit espérer que son équipe ne se prenne pas une raclée au Club Bruges, dimanche, et qu’elle bat Zulte Waregem, mercredi (deux matchs qui se jouent sans supporters d’Anderlecht) puis Seraing. Sinon, cela risquerait de chauffer lors de la venue de l’Antwerp, le 29 janvier, comme en avril 2019 lorsque le public avait réclamé la démission de Coucke comme président. Un an plus tard, Coucke avait passé la patate chaude à Vandenhaute. Elle n’a jamais été aussi bouillante.