Tadej Pogacar, la prouesse d’un surdoué à jamais dans l’histoire
Tadej Pogacar a remporté le Tour dès sa première participation. Il a ainsi placé la Slovénie sur le toit du cyclisme.
Publié le 20-09-2020 à 21h28
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Le souffle coupé, le regard dans le vide, les mains derrière la tête… Sur le coup de 18 heures, en ce samedi maussade de septembre, le temps s’est arrêté. Installé sur le trône et en passe de décrocher sa première victoire au Tour de France, Primoz Roglic a connu la défaillance de sa vie. Galvanisé par la mauvaise prestation de son plus grand adversaire et au sommet de son art, Tadej Pogacar est entré dans l’histoire. L’hégémonie de Sky, devenu Ineos, avait presque fait oublier le sens du mot «suspense». Cette fois, c’est un véritable thriller qu’a vécu le monde la bicyclette dans la Planche des Belles Filles. Le jeune Slovène est parvenu à dépoussiérer les vieilles images du Tour 1989. Depuis ce mano a mano et ce chambardement au général dans le duel entre Laurent Fignon et Greg LeMond, aucun autre scénario n’avait rendu la planète vélo aussi bouleversée. Plus tard, sans connaître le même impact dans l’histoire de la Grande Boucle, l’affrontement entre Cadel Evans et Andy Schleck en 2011 s’était également joué lors du chrono.
Et dire que Pogacar s'était présenté à la Côte d'Azur avec la casquette de jeune prodige devant grandir dans la roue de Fabio Aru et censé dynamiter la course dès qu'il en aurait l'occasion. Vainqueur à Laruns, puis au Grand Colombier, avant sa démonstration dans le chrono franc-comtois, le «petit Pogi» a construit sa légende en plusieurs étapes, en prônant sans cesse le fameux «Gagner, sinon rien», propre à cette nouvelle génération.
Le vélo, par hasard
Si ce lundi, jour de son 22e anniversaire, Pogacar se rendra peut-être compte de ce qu’il vient d’accomplir et qu’il est le plus jeune vainqueur du Tour après-guerre, absolument rien ne laissait penser que le prodige d’Europe centrale se dirigerait vers le cyclisme. C’est en fait en imitant son grand frère, Tilan, qu’à huit ans il s’est consacré aux deux roues. Il ne s’est guère rendu au club cycliste à Ljubljana, la capitale slovène, avec un réel enthousiaste. Et pour cause, il rêvait davantage du football. D’années en années, le natif de Komenda a pris du galon jusqu’à devenir le grand espoir national. Son ascension est rapide et il suscite rapidement les convoitises des formations les plus huppées et aux denrées importantes.
Sur les traces de Bernal, un an plus jeune
Comme si c’était écrit, Pogacar a suivi la même trajectoire qu’Egan Bernal. Lauréat du Tour de l’Avenir en 2017, puis du Tour de Californie en 2018, le Colombien était parvenu à concrétiser son évolution sur la Grande Boucle en 2019. Le Slovène a réalisé pareilles prestations, l’année suivante. Cela prouve une nouvelle fois que le destin et le côté aléatoire du sport peuvent être supplantés par un athlète dont les références dépassent largement la norme. Et comme s’il était déjà préparé à vivre un tel moment, le grimpeur d’UAE Emirates, certes pas le plus souriant du peloton, n’a pas connu la moindre hésitation lors de son discours, après avoir chanté, sous son masque, les paroles de son hymne national.
Le triomphe du sport
Enfin, par le contexte sanitaire qui entourait l'épreuve, le Tour 2020 avait déjà une dimension historique lors du grand départ à Nice. Cette édition est entrée un peu plus dans les livres des records. En ambassadeur du cyclisme offensif, Pogacar a rendu l'ordinaire extraordinaire. Ce lundi, plus personne ne parlera du Covid-19 et des divers tests positifs durant la course en Charente-Maritime. Tout le monde se souviendra de ce coup de force, l'un des plus grands exploits du XXIe siècle, du gamin slovène. Comme le disait si bien Pierre de Coubertin, «Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre». Ses mots prennent un peu plus du sens, aujourd'hui.