Alaphilippe, au nom du père
Le Français s’est offert un cinquième succès sur la Grande Boucle, en s’inspirant de ses coups de force à Milan-Sanremo.
Publié le 31-08-2020 à 06h28
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Pouvoir serrer ses proches dans les bras, vivre intensément les rares moments en famille, voilà des choses qui ont disparu à cause de la pandémie de coronavirus. Une fois la crise sanitaire terminée, chaque citoyen pourra retrouver ce plaisir, pas Julian Alaphilippe. En plus d'un confinement difficile à gérer pour un sportif professionnel, le puncheur français a dû dire adieu à son paternel, décédé d'une longue maladie, en juin dernier. Le souvenir de son papa, Jacques, musicien rebaptisé «Jo», car il était fan de Johnny Hallyday, le coureur de Deceuninck-Quick Step s'en est servi comme une force pour s'imposer sur la Promenade des Anglais, laissé couler les larmes une fois la ligne franchie. «Je m'étais promis de gagner pour lui, a déclaré le Saint-Amandois. J'ai vécu une année difficile sur le plan personnel, ce succès est une libération.»
Aussi bizarre que cela puisse paraître pour un coureur de sa trempe, ce bouquet remporté en terre niçoise est le premier de la saison pour Alaphilippe, qui était passé à un fifrelin de remporter Milan-Sanremo pour la deuxième année consécutive, dans son duel intense avec Wout van Aert sur la Via Roma. La Primavera lui a d'ailleurs servi d'inspiration dans le final de l'étape. Le col non répertorié des Quatre Chemins avec la descente sur Nice, ensuite, présentait de réelles similitudes avec le célèbre Poggio et la descente vers Sanremo. Comme il l'avait fait lors de la Classicissima, le coureur tricolore est passé à l'offensive. Seul Marc Hirschi a pu l'accompagner, rejoint un peu plus tard par Adam Yates. «J'avais demandé à mes coéquipiers de durcir la course, ce qui a été admirablement fait par Dries Devenyns puis par Bob Jungels, insiste le vainqueur du jour. Dans la dernière ligne droite, je ne me suis pas posé de questions. Le sentiment de victoire me manquait (NDLR: il n'avait plus gagné depuis le contre-la-montre de Pau, lors du Tour 2019).»
L’appétit vient en mangeant
Anecdote pour le moins cocasse, Devenyns, fidèle lieutenant de celui que beaucoup appellent «Loulou», s'est arrêté auprès d'un spectateur présent en bords de route pour regarder les 500 derniers mètres de l'étape sur le smartphone de ce dernier. Avec la délivrance, au décompte final. «C'est une victoire forte en émotion. J'ai crié comme si j'avais moi-même gagné, sourit le Louvaniste. On va maintenant s'attaquer à la défense du maillot jaune, en essayant de le conserver le plus longtemps possible.»
À ce sujet, Alaphilippe s'est montré clair, sans qu'on puisse garantir la sincérité dans ses propos. On connaît son appétit d'ogre et son envie de rendre le peuple français heureux. «L'objectif est de poursuivre sur cette lancée. On va essayer de défendre le maillot avec honneur car cela se respecte mais ce n'est pas la priorité absolue. Je ne suis pas présent pour gagner le Tour de France. Je vise davantage des victoires d'étapes.»
Outre l’impact qu’une victoire sur la Grande Boucle représente pour une équipe cycliste, elle est d’autant plus importante qu’elle redonne du baume au cœur à une structure groggy, ces derniers temps, après les chutes impressionnantes de Fabio Jakobsen, au Tour de Pologne, et de Remco Evenepoel, au Tour de Lombardie.
Sauf incident mécanique ou énorme sensation lors de la troisième étape, ce lundi, entre Nice et Sisteron (198 kilomètres) Alaphilippe rejoindra Bernard Thévenet au nombre de maillots jaunes portés au Tour (16). Sa vitrine se remplit toujours plus et quelque chose nous dit qu’elle ne fermera pas ses portes de sitôt, compte tenu de son tempérament.