Marc Grandjean et Joachim Gérard: treize ans de travail et de complicité
Marc Grandjean n’a plus l’occasion d’accompagner Joachim Gérard mais il est toujours présent à ses côtés et jette un regard avisé derrière lui.
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- Publié le 22-01-2019 à 06h00
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Affaibli depuis quelques mois par la maladie de Charcot, Marc Grandjean ne sait physiquementplus suivre Joachim Gérard mais son coaching et ses précieux conseils accompagnent toujours le Brabançon, désormais accompagné sur les terrains par Laurent Dessart, son nouvel entraîneur.
Marc Grandjean, quel souvenir gardez-vous de votre première rencontre avec Jo.
Il y avait Jo, mais aussi Mike Denayer. C’était il y a 13 ans. Le papa de Mike était venu me trouver pour me demander si je pouvais donner quelques cours aux deux jeunes qui avaient alors 17 et 16 ans. J’ai répondu positivement mais c’était pour moi tout nouveau et je n’avais aucune expérience du handisport. Après un stage à Pâques en 2006, nous avons décidé de continuer. En novembre, nous sommes partis tous les trois pour notre premier tournoi à Nottingham. Une véritable expédition car partir en camionnette avec deux joueurs, quatre chaises roulantes et les bagages n’était pas évident. En plus, on conduit à gauche en Angleterre…
Quel sentiment avez-vous en regardant jouer Jo aujourd’hui?
Il est double. Un sentiment de satisfaction d’abord quand je vois sa fin de saison 2018 et le niveau qu’il a réussi à retrouver. Je dois bien avouer que j’ai eu peur quand il a eu ses problèmes à l’épaule en 2017. Une opération suivie d’une période de reprise difficile l’a fait chuter au 9e rang mondial.
Ensuite j’ai un léger sentiment de frustration car je me dis que le niveau qu’il a atteint fin 2018, il aurait pu l’atteindre deux ou trois ans plus tôt. Mais chaque athlète est différent et atteint sa maturité sportive à un moment différent.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué dans son évolution?
Sa capacité à s’adapter aux modifications techniques que j’ai essayé de mettre en place. Que ce soit pour le service, le coup droit il y a deux ans et surtout le revers il y a quelques années déjà. Quand nous avons commencé à bosser ensemble, il n’avait qu’un revers slicé. J’ai décidé qu’un revers frappé était une arme importante pour l’avenir. On a travaillé ce coup pendant trois mois et cela est rapidement devenu un de ses points forts, redouté par tous.
Dans l’autre sens, qu’est-ce qui n’a pas changé chez lui?
J’aurais tendance à employer plutôt le passé et je dirais que ce qui n’avait pas changé chez lui pendant des années est son manque de constance. Il a souvent fait la pluie et le beau temps sur le terrain. Et ça, malheureusement, ça ne peut pas marcher si on ambitionne de s’installer dans le top mondial.
Des regrets?
Pas vraiment car j’ai l’impression d’avoir fait le maximum. Il y a juste cet aspect mental que l’on aurait pu intégrer plus tôt dans sa préparation. Sinon, je suis fier du chemin parcouru. En commençant il y a treize ans, j’étais loin de penser qu’on se retrouverait dans des tournois du Grand Chelem et aux Jeux Olympiques.
Jo s’est fixé comme double objectif pour 2019 de devenir no1 et de remporter un tournoi du Grand Chelem. En est-il capable?
J’ai l’impression qu’il a maintenant franchi un cap. Après son premier succès au Masters en 2015, j’avais l’impression qu’il avait compris beaucoup de choses mais malheureusement le début d’année 2016 fut mauvais. J’espère qu’il aura retenu la leçon, qu’il va aborder maintenant tous les matchs avec sérieux et une détermination maximale. Je reste persuadé qu’il peut gagner un jour un tournoi du Grand Chelem. Quant à devenir n° 1 mondial, c’est prématuré d’en parler. On en reparlera s’il arrive à trouver de la constance dans ses performances et résultats.
Si vous deviez adresser un message à Jo?
Je suis persuadé qu’il a tout ce qu’il faut dans son jeu pour arriver à concrétiser ses objectifs. À condition de ne pas oublier les deux valeurs qui sont pour moi essentielles pour arriver au sommet : la rigueur et l’humilité, au tennis comme dans la gestion de sa vie de tous les jours. Je lui souhaite bien sûr d’atteindre ses objectifs sportifs mais aussi de réussir sa vie familiale et professionnelle. Nous avons vécu une belle tranche de vie ensemble et je peux dire que Jo est vraiment un chic type.