Haute couture au vestiaire de la cathédrale de Tournai

Le vestiaire de la cathédrale de Tournai recèle un véritable trésor de haute couture: le "Grand-Rouge de Saint-Martin".

Patrick Malice
 Déployant ses quinze pièces aux regards éblouis, offrant ses broderies métalliques aux jeux de lumière, le "Grand-Rouge de Saint-Martin" révèle sa somptuosité et son éclat originels.
Déployant ses quinze pièces aux regards éblouis, offrant ses broderies métalliques aux jeux de lumière, le "Grand-Rouge de Saint-Martin" révèle sa somptuosité et son éclat originels.

L’ornement dit "Grand-Rouge de Saint-Martin" est, avec l’ornement "Cotrel", la pièce maîtresse du Trésor de la cathédrale de Tournai dans le domaine de la paramentique. Il comporte au total quinze pièces dont six chapes, une chasuble, deux dalmatiques, deux étoles, trois manipules et un voile de calice.

Il aurait été offert par Louis XIV à l’abbaye Saint-Martin (installée sur le site de l’actuel hôtel de ville) en 1671 à l’occasion de la dédicace de la nouvelle église abbatiale. La réalité, prestigieuse, est tout autre. S’il est vrai que Louis XIV a inauguré l’abbatiale de Saint-Martin le 14 juin 1671 et qu’il a offert un ornement à l’abbaye en 1681, ce dernier n’a rien à voir avec la pièce maîtresse du vestiaire cathédral, réalisée, quant à elle, au XVIIIe  siècle par des brodeurs athois, le prestigieux atelier Dormal-Ponce.

Lors de la Révolution, il est vraisemblable que, à l’instar des autres ornements textiles et des archives de l’abbaye Saint-Martin, le "Grand-Rouge" ait été mis en lieu sûr en Allemagne pour échapper aux confiscations révolutionnaires. Il réapparaît au début du XIXe  siècle où il échoit finalement en 1808 à la fabrique de Saint-Brice par la volonté du dernier abbé de Saint-Martin.

Outre son ampleur, le "Grand-Rouge" se caractérise par la richesse des étoffes, des fils utilisés et l’originalité de l’ornementation. Mais ce qui le singularise, c’est l’aspect hybride des fonds: les six chapes sont sur damas de soie rouge tandis que les autres pièces sont sur velours cramoisi. Toujours est-il que sur les deux fonds se déploie une même ornementation foisonnante faite de motifs floraux semés le long de rinceaux souples et de feuilles ondulantes. Le caractère luxueux de l’ensemble tient également à l’utilisation de fils métalliques d’or et d’argent.

La qualité des œuvres des maîtres-brodeurs Pierre-François Dormal et Charles Ponce témoigne de leur maîtrise d’un métier et d’un art qu’ils ont portés à des sommets de raffinement. Et la clientèle, essentiellement ecclésiastique de haut rang, est à la recherche de beauté et d’une magnificence que peut lui procurer l’atelier athois.

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