Tournai : moussaka, ardoise et chanson… devant le tribunal
Le client est connu, certes. Ce n’est pas une raison pour charger la mule. Me Rivière s’est employé et a même cité Aznavour.
Publié le 10-03-2023 à 19h00
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Condamné précédemment pour trafic de stupéfiants, l’homme est devant la barre du tribunal pour trois préventions: abus de confiance auprès d’une station essence, usage abusif d’un moyen de communication à l’égard de son ex-copine(soit du harcèlement), et outrage.
La cour d’assises sinon rien
Trois préventions ? Plutôt deux, selon M Rivière, avocat de la défense. "Le tribunal correctionnel n’est pas compétent pour les faits d’outrage". Explication: un jour, le prévenu indique sur les réseaux sociaux qu’une opération policière est en cours au rond-point de l’Europe. "J’informe qu’un"contrôle de porc"se déroule dans le centre-ville. Par porc, je voulais dire énorme, comme quand on dit l’expression"manger comme un porc". Sauf que mon correcteur écrit"contrôle des porcs". Je ne fais pas attention et je publie le message. Je l’ai supprimé dès que je l’ai vu", explique l’individu. Mais quelques jours plus tard, il reçoit une convocation de la police pour outrage. "J’ai eu le sentiment de vous faire bondir, Madame la présidente, en indiquant que le tribunal était incompétent, mais c’est ce qu’indique l’article 150 de la Cour de cassation. Les propos jugés haineux sur les réseaux sociaux constituent un délit de presse qui ne peut être jugé que par la Cour d’assises. J’invite les membres de cette institution judiciaire à sortir pour voir dans quel monde on vit". Me Rivière a fait la comparaison avec cette fameuse "affaire de la moussaka", lorsqu’un client mécontent d’un restaurant tournaisien avait émis un avis critique sur TripAdvisor.
Qui paie ses dettes (à temps) s’enrichit
La défense s’est ensuite interrogée sur la valeur morale de l’abus de confiance à charge de son client. En avril 2022, le prévenu remplit son réservoir à une station d’essence. "Mais au moment de payer, ma carte ne passe pas. Comme la vendeuse me connaît bien, je lui ai demandé si je pouvais lui rembourser les 12,19 € plus tard. Elle m’a laissé une semaine. J’ai repoussé plusieurs fois. Elle a dû appeler la police, mais je l’ai remboursée". L’avocat: "Au moment de récupérer le carburant, Monsieur a-t-il eu l’intention de ne jamais restituer la valeur du carburant ? J’ai des doutes, car la pompe est près de chez lui et la vendeuse le connait. C’est pourquoi je demande l’acquittement de mon client sur cette prévention".
Charles Aznavour à la rescousse
Pour la présidente et le ministère public, le harcèlement envers son ex-conjointe reste le plus grave, car des menaces de mort sont proférées. "Après cinq ans de relation, la séparation a été compliquée. C’était amour, tristesse, haine et colère (un bon titre de série). Je n’ai plus de contact avec elle". C’est en citant Aznavour que Me Rivière a plaidé: "La période infractionnelle s’étale uniquement sur trois jours. Alors oui, monsieur est coupable "de ne pas avoir su retenir les cris de haine qui sont les derniers mots d’amour". Il poursuit: "Je sollicite un sursis probatoire, mais dans les conditions, je n’ai pas cru utile pour ces trois malheureux jours de lui faire suivre une thérapie sur la violence, comme le suggère la procureure du roi". Le jugement sera rendu le 6 avril.