"A cheval sur le dos des oiseaux" la pièce de Céline Delbecq, à la Maison de la culture de Tournai
Venue d’un quotidien trop réel pour être inventé, la pièce de Céline Delbecq épingle la détresse des invisibles.
Publié le 09-01-2023 à 06h00
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Carine Bielen n’a pas tout pour être heureuse, ni pour sombrer dans des eaux plus noires encore. Dès l’enfance, elle a connu la vie en institution, l’instabilité, la marge, comme ses frères et sœurs. Si aujourd’hui elle dispose d’un logement, pour son jeune fils et elle, la solitude lui pèse, l’exclusion l’englue.
"Petite, mon père m’appelait la poète/parce que je regardais les oiseau x/dès que j’en voyais dans le ciel/je bougeais comme ça/(Elle s’immobilise)/ je les regardais/j’imaginais que j’étais à cheval sur leur dos…"
Adulte fragilisée, la quadragénaire garde des paniques incontrôlables, elle craint le vent, le noir. Des peurs qu’elle a transmises à son gamin, comme s’il s’agissait d’une malédiction: "À peine y fait noir Logan il hurle/c’est toujours la même affaire/pas juste qu’y pleure ou qu’y gémit/y pousse des cris à faire peur/il aime pas le noir non plus on dirait/c’est comme ça c’est de famille…"
Le texte de Céline Delbecq porte avec puissance un fait de société et son cortège sournois de relégations au jour le jour. Il cerne l’identité d’une personne qui n’a pas eu le choix de la chance. Broyée dans son actualité de femme, de mère et l’absence d’aide concrète, elle ne peut que survivre. Le vide administratif étouffe les moindres pas dans un monde réservé à celles et ceux qui sont dans la norme. L’espoir est bien mince.
La comédienne Véronique Dumont invite le public à entrer dans l’intimité des journées de Carine Bielen. Celle-ci s’adresse à lui, seul témoin d’une faille insurmontable, celle que personne ne veut voir. Avec justesse, la voilà délivrant une parole qui n’est ni moralisatrice ni larmoyante. C’est toute la force d’un spectacle écrit et mis en scène par Céline Delbecq, pour une comédienne choisie qu’elle considère comme "une artiste puissante qui parvient à faire entendre la complexité des choses, en attrapant le texte du côté du vivant".
"À cheval sur le dos des oiseaux", mardi 10 et mercredi 11 à 20 h, Maison de la culture. Après la soirée, le public pourra dialoguer avec Christine Mahy, secrétaire générale du Réseau wallon de Lutte contre la pauvreté. 069 253 080