Tribunal de Tournai : toujours la question de savoir si "l’activité" est légale ou pas…
La défense ne veut pas que son client devienne un bouc émissaire. Tout ce qui se passe à l’étage est légal. Il n’y a pas d’exploitation.
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- Publié le 14-10-2022 à 06h00
- Mis à jour le 06-09-2023 à 11h41
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L’établissement est réputé comme étant "le bar à champagne" de la région. Son gérant est devant la barre du tribunal pour "organisation de la prostitution dans le but d’en tirer un avantage".
Pour entrer dans le club, chaque client paie 45 euros. Plus d’une dizaine de travailleuses du sexe proposent des prestations à l’étage. En échange de 10 euros par jour, elles ont droit à la location de la chambre, des boissons, et de la publicité si souhaitée. En effet, "à leur demande", les services effectués peuvent être vantés par le prévenu sur un site internet spécialisé. L’homme précise que les tarifs sont fixés de manière uniforme par les femmes et qu’il ne perçoit rien du montant touché.
Un manque de diligence
Plusieurs contrôles ont été réalisés entre 2016 et 2019. "On compte dix-neuf prostituées, toutes d’origine étrangère. Sur 124 jours, il y a eu plus de 400 000 euros de bénéfices. Il n’y a pas la moindre base légale qui aurait permis la fermeture de l’établissement depuis lors. La dépénalisation concerne les maisons de débauche (ex: club échangiste) et non pas les maisons de prostitution. La publicité est ici prohibée", indique le procureur du roi. "Les faits ne sont pas compliqués. Mon seul regret est que l’instruction n’ait pas été menée avec plus de diligence".
Le magistrat réclame un an de prison ainsi qu’une amende de 100 000 euros à l’encontre de la société anonyme de l’individu.
Conseillé par le ministre de la Justice
L’avocat du gérant s’insurge. "Le ministère public attend, parce qu’il dit ne rien savoir faire. Ce n’est pas compliqué quand on fait des amalgames. On dresse un tableau apocalyptique avec exploitation de personnes étrangères. Il ne manquerait plus qu’il y ait une circonstance aggravante avec traite d’êtres humains dans le chef de mon client. Monsieur a eu des contrôles pendant des années et jamais il n’a dû fermer son bar. Pourquoi ? Car les enquêteurs ont constaté par les informations collectées que les hôtesses choisissaient elles-mêmes leurs horaires. Elles sont sous couverture sociale. Il n’y a rien d’illégal au niveau fiscal. Des mails ont notamment été échangés entre mon client et le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne. Ce n’est pas n’importe qui. Il l’a conseillé".
La publicité pose question
Deux débats sont soulevés par la défense. D’abord "l’organisation de la prostitution". Il n’en est rien dans ce dossier. Il n’y a pas eu de coordination contre rémunération. "L’infraction n’existe plus si dans le simple fait de tenir une maison, il n’y a pas d’exploitation. La prévention est non fondée". Le conseil demande l’acquittement pour cette prévention. Il est plus embêté au niveau de la publicité. "Il ne faut pas que mon client paie pour les autres. Cette loi est hypocrite. Cela est interdit quand on le fait pour les autres, mais la plateforme qui diffuse ces offres à caractère sexuel est libre. Je suis allé voir le site et c’est hallucinant. C’est le Spotify du sexe !". L’avocat qui représente la société anonyme rejoint son confrère et relève les arguments suivants: les petites annonces à la fin des journaux ou encore, récemment, la photo de Dodo la Saumure en Une d’une gazette concurrente. "Et ça, ce n’est pas de la publicité ? Qu’est-ce qui change ?". À cet égard, la défense sollicite la suspension simple pour cette seconde prévention.
Jugement le 14 novembre.