Tribunal de Tournai : le karaoké, une fausse affaire en or ?
L’ancienne exploitante doit répondre d’escroquerie. L’établissement est tombé en faillite tandis que les acquéreurs n’arrivaient plus à payer.
Publié le 13-12-2021 à 19h00
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Murielle (prénom d’emprunt), 46 ans, doit répondre d’escroquerie. L’ancienne exploitante d’un karaoké implanté sur la Grand-Place de Tournai, entre-temps déclaré en faillite, est poursuivie pour avoir cédé son commerce à un prix prohibitif, à savoir 200 000€. Elle nie toute manœuvre frauduleuse. Son ex-mari est aussi poursuivi. L’établissement, selon la principale prévenue, fonctionnait très bien. Mais après la vente, il a vite périclité.
Murielle souhaite à l’époque vendre son commerce pour partir en Polynésie. Elle met une petite annonce. Des clients, devenus des amis, sont intéressés. Seulement, ils n’ont pas le feu vert des banques. Une reconnaissance de dette est envisagée.
"Le prix a été fixé de commun accord et un comptable nous avait conseillé de faire une reconnaissance de dette", souligne la prévenue.
La partie civile explique que les billets d'avion pour la Polynésie étaient déjà achetés au moment de la transaction. "Le but des prévenus était de ne laisser aucune trace pour éluder le fisc. La vente devait se dérouler rapidement".
Pour le ministère public, la prévenue avait un train de vie important. "Elle a vendu du rêve aux candidats acquéreurs, leur disant qu'il s'agissait d'une affaire en or. Pour avoir leur confiance, elle va avancer une reconnaissance de dette établie via un comptable. Ils ont accepté la convention qui avait pour but d'éluder l'impôt. "
Le ministère public a requis un an contre la prévenue et l’acquittement de l’ex-mari de Murielle, dont le rôle dans la gestion était minime.
«La victime, c’est moi»
La défense indique que sa cliente a contacté un comptable: "Pour financer le prix de la cession, une solution a été envisagée. Le couple acquéreur avait effectué un paiement de 27 500€. Il restait 172 500€ à payer et c'est là qu'une reconnaissance de dette a été établie sur 7 ans avec un taux d'intérêt de 6%, soit 581€ à verser chaque semaine par le couple. Ils ont payé pendant 45 semaines mais ont stoppé le 30 novembre 2014. L'établissement a été déclaré en faillite en octobre 2016.
Ce prix de 200 000€ n’était pas prohibitif. Il s’agissait d’une base objective en rapport avec une année de chiffre d’affaires: 137 000€ en 2012, sans oublier le matériel informatique, les jeux de lumière et le stock de boissons ainsi qu’un fichier avec 500 chansons. Le couple n’a jamais parlé de prix prohibitif.
À propos de la convention de cession qui n’a pas été établie, le comptable est dans le flou. Il dit que déontologiquement, il ne pouvait pas le faire… La qualification d’escroquerie exige une manœuvre frauduleuse. Elle n’a jamais voulu tromper personne et a perdu des plumes dans l’affaire. Le couple aurait pu se faire mieux conseiller. Nous demandons l’acquittement."
Murielle a repris la parole. "Dans ce dossier, la victime, c'est moi. Je ne récupérerai jamais l'argent qu'on me doit. Ça va beaucoup trop loin."
Jugement le 13 janvier.