Sursis pour séquestration et torture

En janvier 2001, les proches de Hakan Kaplan vengeaient son assassinat en se faisant justice. Ils écopent de cinq ans... avec sursis!

Gisèle MARÉCHAL

Cinq ans avec sursis pour ce qui excède la préventive subie six mois à l'encontre de huit prévenus de séquestration arbitraire et tortures. Voilà leur peine. Leur procès s'est clôturé ce jeudi devant le tribunal de première instance de Mons. À moins d'un appel, ce procès met un terme judiciaire définitif au drame de la disparition de Hakan Kaplan, fin janvier 2001.

Bruxellois d'origine, Hakan Kaplan vivait à Lessines de petits vols qu'il perpétrait en compagnie d'une bande dirigée par Thierry Dumont. Lorsqu'il disparut, fin janvier 2001, ses proches (et surtout sa famille) eurent de bonnes raisons de croire que la bande de voleurs de Lessines y était pour quelque chose. Les Kaplan de Bruxelles organisèrent leur justice privée personnelle : ils mirent sur pied une expédition punitive, afin de retrouver Hakan. Première étape : par l'intermédiaire de la copine de Hakan, ils allèrent chercher Thierry Dumont. Ils l'emmenèrent au bois de Lessines. Ils le ligotèrent, lui brûlèrent le nez à l'aide de briquets ; ils lui lacérèrent les jambes au tournevis... mais Dumont garda le silence.

Les Kaplan firent alors venir Raphaël Marchal. Ils lui exhibèrent le corps inanimé de Dumont : «si tu te tais, tu subiras le même sort». Marchal subit un couteau chaud dans le dos. On tenta de lui couper l'oreille gauche. On lui sauta à pieds joints sur la tête... Enfin, Marchal livra le secret. Il emmena la famille Kaplan dans les campagnes désertes du zoning de Ghlin-Baudour, où gisait le corps sans vie (dépecé) de Hakan Kaplan. C'était le 29 janvier 2001. La police entamait alors l'enquête. Elle a abouti, en novembre 2003, au procès d'assises de Raphaël Marchal : il a écopé de 15 ans de réclusion pour l'assassinat de Hakan Kaplan. Thierry Dumont était le grand absent du procès. Et pour cause : on avait retrouvé son corps en état de décomposition avancée, dans le bois de Lessines, en mai de cette même année.

Restait à sanctionner la justice privée à laquelle s'est livrée la famille Kaplan. Huit prévenus devaient répondre de " séquestration arbitraire avec circonstance aggravante que des traitements inhumains ou des tortures ont été perpétrées ". Suite aux plaidoiries des avocats de la défense, la présidente Mme Galand a scindé la prévention en " séquestration arbitraire " et " tortures ", ce dernier terme étant le degré supérieur des traitements inhumains, infligés à une personne pour obtenir d'elle des renseignements ou des aveux. La torture peut être physique ou morale, infligée au moyen d'instruments ou non. Par exemple, Marchal a été torturé mentalement lorsqu'on lui a exhibé le corps inanimé de Dumont en le menaçant de lui faire subir le même sort.

Aux yeux de Mme Galand, chaque prévenu emporte la même part de responsabilité dans la séquestration doublée de tortures, " prêtant main forte à la capture et à la surveillance des détenus, permettant qu'on utilise leur véhicule, certains accomplissant des supplices, prêtant main forte à des coups portés, assurant l'absence de rébellion des suppliciés, conscients que le nombre de personnes présentes leur interdisait toute réaction efficace, en aggravant le caractère angoissant de la situation, par leur nombre ". Sont donc également responsables, la petite amie de Hakan, qui a accepté d'attirer Dumont et Marchal dans un traquenard ; et le père de Hakan, qui a fourni son aval moral à cette justice privée.

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