Un regard sur l’ère «post-Covid» de nos sentiers
Ne se passe pas une semaine sans que la problématique des sentiers soit abordée dans nos colonnes.
Publié le 18-06-2021 à 06h00
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«Les conditions sanitaires ont modifié les habitudes de loisirs et de tourisme, rappelle l'Ellezellois Michel Richart, de l'ASBL "Les Sentiers du Vert Savoir": les sentiers ont constitué un espace de liberté insoupçonné, un exutoire aux mesures de restriction. Ce regain d'intérêt pour les sorties de proximité en plein air a provoqué un afflux de marcheurs et de vététistes. Certains bois hyperfréquentés offrent aujourd'hui les stigmates d'un dédale de sentiers (NDLR: à Frasnes, notamment). La surfréquentation aurait été, dit-on, source de désagréments pour des riverains à l'exemple du Sentier de l'Étrange, véritable aspirateur à touristes du dimanche, dont l'accès a été interdit à deux reprises…»
Évasion pour les uns, invasion pour d’autres…
Tandis qu'on entrevoit le bout du tunnel, il reste des questions: «Quelles leçons les usagers tireront-ils de cette période inédite? Oublieront-ils que ces sentiers leuront permis de ne pas étouffer? Seront-ils définitivement vaccinés contre une mobilité débridée et énergivore? Sauront-ils goûter aux charmes de leur propre région autrement qu'au retour d'expéditions lointaines?» Pour réguler le trop-plein d'usagers sur des sentiers qu'une publicité excessive finit par saturer, des alternatives existeraient: «Encore faut-il mettre en œuvre une politique touristique géolocalisée, planifiée et raisonnée. C'est aux pouvoirs communaux que revient la responsabilité de relever ce défi et d'orchestrer la manœuvre. Elle passe par l'adoption d'un projet de maillage et par l'incontournable actualisation de l'Atlas de 1841, tâche immense à laquelle ils sont généralement allergiques. Or, le déterminisme aux erreurs qui ont été commises (laisser-faire, complaisance, complicité…) n'est pas irréversible mais réclame une bonne dose de courage politique. À voir le peu d'empressement des communes à s'atteler à cette tâche, on peut penser que cette réforme sera reportée à la Semaine des 4 jeudis»!Jusqu'à ce jour, force est de reconnaître que les associations de citoyens bénévoles et volontaires ont été l'aiguillon qui a fait bouger les lignes: «La majorité des sentiers rendus au public est due à leur obstination, qui leur vaut parfois de la part de détracteurs le surnom de fous furieux des sentiers. Peu de communes leur ont emboîté le pas, beaucoup se sont montrées réfractaires pour des raisons inavouées! Quelques-unes profitent du travail que d'autres font à leur place…»
Grâce aux fous furieux?
Lors du dernier CA de l'ASBL Chemins de Wallonie, quelque 80 cas ont été passés en revue dont 16 en Hainaut: «Cette augmentation d'obstructions, de voies de fait, de vandalisme, de signalétiques arrachées, de poses de panneaux dissuasifs illégaux… est interpellante et, en l'absence d'interface, les positions risquent de se radicaliser.» La vague de demandes de suppression et cette stratégie de mise devant le fait accompli n'épargnent pas la Wallonie picarde. En 2020-2021, notre journal a relaté plusieurs cas: le sentier du Bédeau (Kain), Eul Vouye Daniel (Buissenal), le sentier 119 (Frasnes-lez-Buissenal), le chemin de la coupure de Léaucourt (Pecq) les sentiers 176 et 221 (Ellezelles) ou encore le chemin 10 (Warchin).
«À chaque fois, des sentinelles ont donné l'alerte. Il s'est ensuivi des dépôts de plaintes, des constats de police, des enquêtes publiques, des pétitions…, commente M. Richart. Certaines procédures ont abouti et ont rendu leur verdict. Pour deux cas ci-avant mentionnés, l'enquête publique a fait «pschitt» puisque, des mois après la clôture de l'enquête, les résultats n'ont pas été communiqués! Ces hors délais en disent long sur l'imbroglio provoqué par les personnes qui s'imaginaient que leur demande de suppression passerait comme une lettre à la poste. Quand comprendront-ils qu'il vaut mieux chercher une solution à l'amiable (tourniquets, chicanes, échaliers, barrières ouvrables, déplacements alternatifs crédibles) que de s'aventurer dans des procédures onéreuses et à l'issue encore plus problématique?»