CYCLISME| Kenny Molly veut agrémenter ses échappées
Futur papa, le Ploegsteertois de 25 ans va entamer, au Tour de Valence, une nouvelle saison sous le maillot "wallon-bruxellois".
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Publié le 28-01-2022 à 06h00
Ils sont devenus une denrée rare et même extrêmement rare. Dans le peloton professionnel, les coureurs régionaux ne courent plus les rues. Alors que la saison a démarré sur les routes espagnoles, Kenny Molly a désormais tout le poids de la Wallonie picarde sur les épaules. "Même si j'habite désormais à Nieuwkerke?", nous demande gentiment le coureur de Bingoal Pauwels Sauces WB. Évidemment, Neuve-Église étant la porte à côté de Ploegsteert où il a longtemps résidé. Rencontre avec notre unique rescapé du peloton pro, avant son début de campagne 2022.
Kenny, février arrive, l’heure est souvent à la prise de température à l’issue de la préparation; comment vous sentez-vous?
Bien, grâce à des stages effectués avec l’équipe dans de très belles conditions. Il y a eu celui de décembre, du 4 au 18. J’ai pu passer quinze jours à la maison pour les fêtes. J’ai enchaîné avec celui de janvier, du 5 au 19! Lundi, je repars trois semaines, avec le début des courses, après avoir composé avec la météo en Belgique. Brouillard, froid, verglas, pluie… Rien de facile mais le métier veut ça. On ne peut pas toujours être au soleil.
Vous allez le retrouver lors de vos premières courses…
Dès mercredi, je serai sur le Tour de Valence (NDLR: cinq jours de course). Puis, on restera sur place pour d’autres épreuves, comme Murcie. Je remonterai alors dans le sud de la France pour le Tour du Var. Je rentrerai une semaine en Belgique pour repartir en France avec la Drôme et l’Ardèche. C’est mon programme habituel mais je l’aime bien. Débuter à Valence, c’est top; on y annonce un gros niveau. On saura où on en est au niveau de l’équipe. Personnellement, j’ai passé un bon hiver. Le plus important est de confirmer en course.
L’idée est de répéter 2021?
De faire mieux! J’ai toujours envie de donner plus. 2021 a été une belle année. Je me suis montré, j’ai pris des maillots, j’ai fait des résultats…
Lequel retenez-vous plus volontiers qu’un autre?
Le Tour du Portugal restera un très bon souvenir. Je sortais d’un stage, je me sentais bien préparé et ça s’est confirmé. J’ai fait deux Tops 10, trois Tops 15, pris la seizième place du général. Ceux qui s’y connaissent en vélo savent ce que c’est de rouler au Portugal (NDLR: parcours difficiles et vallonnés; grosses chaleurs). Ce résultat est significatif.
Il y en a eu d’autres…
Oui, comme le fait de pouvoir porter des maillots distinctifs un peu partout. Il y a eu le Tour du Luxembourg en fin de saison où je prends trois échappées en cinq étapes. J’y suis meilleur grimpeur alors qu’il y avait un sacré niveau (NDLR: Almeida, Gaudu, Hirschi, Pinot). Au-delà de ma réussite, je retiens aussi volontiers les bons résultats signés en équipe. Le succès de Milan Menten sur le Tour de Croatie restera un fameux moment. Pour notre «petite» structure, à un tel niveau, ce sont des instants rares que l’on savoure d’autant plus.
Ces dernières saisons, on vous a souvent vu dans les échappées matinales sur les classiques: Liège, Gand-Wevelgem, l’Amstel… Pour beaucoup, c’est votre marque de fabrique…
Sans doute un peu mais je ne désire pas que mon nom soit juste accolé à un rôle de coureur échappé qui finira bien par être repris à un moment de la course. S’échapper, oui, mais il faut aussi faire des résultats! En 2021, j’ai couru différemment qu’en 2020. Je sortais du peloton mais toujours avec une idée derrière la tête: aller chercher des bonifs ou des points pour un maillot, signer un résultat… En Croatie, je ne suis repris qu’à 4 km de l’arrivée sur une étape. Désormais, j’évite les échappées à la con (sic). Celles qui permettent juste de faire tourner le moteur et de progresser, se montrer et montrer le maillot. Il me faut un vrai but sportif.
L’équipe Bingoal WB a un peu évolué et a été rajeunie; quelle place y occupez-vous?
Le staff me connaît très bien. L’équipe sait qu’elle peut toujours compter sur moi. Quel que soit le terrain de jeu proposé, je donnerai tout. C’est ce que l’encadrement a déjà fait remarquer. Mais rien n’est acquis. Sa place, il faut la mériter, la gagner. Jamais je ne dirai que je suis sûr d’être aligné sur telle ou telle épreuve car je sais d’où je viens et je sais le coureur que je suis.
Un coureur qu’il est difficile de placer dans une catégorie…
C’est vrai, on ne peut pas dire que je suis un vrai puncheur ni un pur grimpeur. J’ai une belle petite pointe de vitesse, je passe bien les bosses, moins bien les cols. Quels que soient les parcours, je sais me rendre utile avec ce bel avantage de bien passer partout.
Mais votre terrain de jeu préféré, quel est-il?
J’aime les classiques wallonnes sur lesquelles je devrais à nouveau me retrouver. Mais j’apprécie aussi les Flandriennes. Rien n’est prévu pour le moment en sachant que tout peut aller vite; j’espère goûter à une belle course en Flandre, sur des routes que je connais.
Et ce cyclisme pro dans lequel tout est si difficile pour percer?
C’est un milieu dans lequel je me sens bien. Sinon, je ne ferai pas tant de sacrifices. Mais oui, c’est compliqué! Dans le coin, je me retrouve un peu seul. Franklin Six n’a pu continuer et Jonas Castrique, qui était mon compagnon d’entraînement, a arrêté. On rêve tous de passer pro un jour et de le rester mais il n’y a pas la place pour tous… Il faut être épargné par la malchance, les chutes, les blessures. Moi, jusqu’ici, j’ai eu cette chance. Jonas et Franklin moins!
On vous dit aussi irréprochable dans l’approche du métier…
Je le vis à 100%. Je donne le maximum, estimant que j’ai de la chance d’avoir fait de ma passion mon métier. Ce que les autres font ne me regarde pas, ce que je sais, c’est que de mon côté, pour être à niveau, juste pour être capable de suivre, je me dois de me consacrer à temps plein au vélo.
Juste pour suivre, vous dites?
Mais oui! C’est peut-être bizarre d’entendre cela mais je n’ai pas le talent d’un Evenepoel. Quand lui accélère, moi, je suis déjà à la limite.
Il y a de l’admiration?
En tant que fan de vélo, oui, j’admire les perfs d’un Remco ou d’un van Aert. Bien sûr! Rouler dans le même peloton qu’eux, c’est top mais je ne m’en préoccupe plus. Je ne touche plus les freins si je vois qu’ils sont à côté de moi (rires). Ils ont deux bras et deux jambes, comme moi. La seule différence, c’est qu’ils ont bien plus de talent. Quand devant cela se joue à la pédale entre eux, moi, je suis déjà lâché ou en grosse galère mais ça reste motivant de se frotter à de tels phénomènes.
Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour cette saison?
La santé pour moi, mes proches et le bébé que ma campagne attend pour juin. Ce sera une nouvelle étape dans ma vie. Un gros changement qui m’apportera, j’en suis sûr, un bel équilibre.