Aubechies : un lotissement de 22 maisons qui va défigurer l’un des plus beaux villages de Wallonie ? (vidéo)
Un projet de 22 maisons à l’entrée d’Aubechies fait grand bruit parmi les habitants de ce village reconnu comme l’un des plus beaux de Wallonie.
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Publié le 07-03-2023 à 15h44 - Mis à jour le 07-03-2023 à 16h20
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Dans un village où l’on dénombre plus de vaches que d’habitants, un projet immobilier suscite des inquiétudes grandissantes, ces derniers jours parmi la population locale.
En venant d’Ellignies-Sainte-Anne ou de Blicquy, l’accès au cœur historique d’Aubechies dévoile un paysage bucolique où la nature règne en maître, au milieu des vieilles pierres et de quelques habitations éparses. Un cadre qui pourrait changer de physionomie d’ici 2 ou 3 ans si le projet de lotissement de la société GSC Patrimonium (Bernissart) aboutit.
La demande de permis porte sur la construction de 22 maisons sur une vaste prairie, reprise en zone à bâtir, de 1,35 ha entre les rues d’Ellignies, de l’Abbaye et du Monceau.
Ce terrain a appartenu à l’ex-bourgmestre belœillois et ministre d’État Pierre Descamps. Rachetée par un lotisseur qui se cassa les dents avec un premier projet de 14 logements, recalé par la Commune de Belœil, la parcelle a été acquise il y a un an et demi par le promoteur et constructeur GSC Patrimonium.

"Nous avons introduit un permis groupé pour 22 habitations unifamiliales clés sur porte, essentiellement mitoyennes, qui seront mises en vente. Les implantations (18 logements 3 façades, 2 villas et 2 maisons 2 façades) seront aérées grâce à l’intégration d’espaces verts. Comprenant deux niveaux, elles seront équipées de 3 ou 4 chambres", détaille Stéphane Gérin, le gérant de la SPRL bernissartoise.

Les futurs occupants (NDLR: il y a déjà beaucoup de demandes selon le maître d’ouvrage) disposeront de parcelles oscillant entre 3,5 et 10 ares. "On a par ailleurs prévu 3 à 4 places de parking (garage, carport ou passage latéral) par logement en vue de ne pas encombrer les voiries communales. Particularité du projet, celui-ci reprend l’aménagement de 18 ares d’espaces communs, ce qui n’est pas négligeable. Les résidents auront accès à des vergers, des potagers, des espaces de détente avec du mobilier urbain, des jeux pour enfants… ", précise l’entrepreneur originaire de Belœil.
"Ce projet démesuré détruira l’âme d’Aubechies"

L’envergure de ce nouveau quartier, susceptible d’accueillir a minima 60 habitants d’après le demandeur, est à mettre en perspective avec les quelque 160 âmes vivant à Aubechies.
Un tel développement de l’habitat, qui ferait bondir la population de plus de 30%, est-il admissible ? La réponse est non pour un certain nombre d’habitants et défenseurs du patrimoine. Les opposants s’insurgent contre "la taille démesurée du projet qui va totalement défigurer le village et l’une de ses portes d’entrée. " Le patron de l’authentique taverne Saint-Géry, Christophe Élius, est très remonté.
"Il faut bien insister sur le fait que les Aubechois ne sont pas réfractaires aux nouvelles constructions. Ce qui dérange, nous déstabilise et suscite notre colère, c’est l’agglutinement de toutes ces maisons au cachet totalement impersonnel. Avec ce lotissement, on aura quasiment un deuxième village, qui accueillera près de 100 nouveaux citoyens et une quarantaine de voitures. Le promoteur va bétonner la plus grande prairie d’Aubechies pour en faire un ghetto (sic)… C’est inacceptable."
Le restaurateur a lancé une pétition et participera à une réunion du comité de quartier, convoquée ce mercredi.
Un risque de perdre son label ?

Outre l’ampleur du lotissement, les voix contestataires pointent du doigt sa localisation à l’un des principaux points d’entrée du village, ainsi que la dangerosité de la rue d’Ellignies. " La situation deviendra encore plus problématique car la résidence sera connectée à la chaussée, où l’on recense régulièrement des accidents, peste M. Elius.
Le cœur du village ne sera, certes, pas directement impacté mais cette cité à l’entrée d’Aubechies va donner une piètre image aux visiteurs qui viendront à Aubechies pour y découvrir ses richesses naturelles, patrimoniales, architecturales… On ne veut pas que l’on détruise notre village si vivant, son âme…"
L’autre grande crainte des riverains, c’est de voir Aubechies être rayé du réseau des plus beaux villages wallons.
"Intégration harmonieuse dans le paysage"
S’il comprend que le projet puisse "faire un peu peur", Stéphane Gérin défend avec force son bien-fondé. Il soutient que l’urbanisation du terrain ne dénaturera en rien le charme du petit village.
"Les futures maisons, de teinte rouge et recouvertes de tuiles brunes en terre cuite typiques de la région, seront assez ressemblantes à celles des parcelles voisines, affirme-t-il. On est sur une mixité de logements qui reprendront les codes identitaires d’Aubechies, avec de la pierre bleue autour des portes d’entrée, des garages dont l’esthétique rappellera des granges... Tout a été fait pour limiter les impacts visuels des constructions, via la conception de zones végétalisées (vergers, haies entre les habitations…). Les nuisances liées aux travaux seront réduites avec un seul phasage et une parcelle qui bénéficie déjà des infrastructures nécessaires (égouttage, eau, station d’épuration, cabine haute tension…)."
"Une densité faible d’habitats à l’hectare"

Sur le nombre de logements, le responsable estime que la proposition est équilibrée: "On est sur un ratio de 16 maisons à l’hectare alors que dans des entités rurales avoisinantes, on en bâtit parfois entre 25 et 40. J’aurais très bien pu accroître la densité du bâti mais je ne voulais pas que cela se fasse au détriment des espaces verts."
M. Gérin ne comprend pas non plus les critiques relatives à l’emplacement choisi. "Depuis la route reliant Ellignies à Blicquy, Aubechies n’est pas du tout valorisé auprès des usagers. La signalétique est peu présente et visible. Le projet permettra justement de marquer l’entrée du village, en créant un lien avec le noyau d’habitats du centre, et grâce à l’installation d’un potager entre les rues d’Ellignies et de l’Abbaye. De même, nous allons amener de la mobilité douce en réalisant autour du site 300 m de trottoirs de 1,5 m de large. Actuellement, rien n’est prévu pour la sécurité des usagers faibles." L’enquête publique se clôture le 4 avril. Le dossier est consultable sur rendez-vous au service urbanisme (place de Quevaucamps).