Taverne Saint-Géry à Aubechies: une savoureuse cuisine du terroir dans un décor insolite (vidéos)
Sur la place d’Aubechies, la taverne Saint-Géry est une adresse incontournable. Établi dans une ancienne ferme du XVIIe siècle, ce petit restaurant ne ressemble à aucun autre. grâce à son cadre aussi atypique que son chef.
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Publié le 15-07-2022 à 10h09 - Mis à jour le 15-07-2022 à 10h57
Nichée dans l’un des plus beaux villages de Wallonie, la taverne Saint-Géry est un lieu qui respire l’authenticité et fait voyager ses clients à travers le temps. " Il n’y a pas d’avenir sans passé ", se plaît à répéter Christophe Elius, le chef de cet établissement qui est entré dans le cercle très restreint des "tables et bistrots de terroir", un label décerné par l’APAQ-W.

Avant même de passer à table, on est tout de suite frappé par le cadre atypique des lieux, richement décorés du sol au plafond.Pour peu, on se croirait dans un musée.
Une impressionnante collection de plaques émaillées orne les murs de vieilles pierres de la taverne d’Aubechies, tandis que d’étonnants objets anciens, comme des cruches, des sauciers, des machines à café et même des urinoirs (!) pendent au plafond. Toutes ces pièces chinées sur des brocantes ou offertes par des clients rendent hommage à ce bâtiment chargé d’histoire.
C’est en effet dans une authentique ferme datant de 1689, rachetée par les grands-parents de Sophie Noiseliet en 1962, que son mari Christophe Elius concocte depuis 2009 de bons plats du terroir sans chichi.
" On tenait à garder le cachet de l’endroit et même à accentuer le caractère historique et rustique de chaque pièce. Cette ferme familiale a abrité un petit café de village ainsi qu’un magasin où l’on vendait des denrées et des ustensiles de cuisine. Beaucoup d’éléments de déco font référence à ces anciennes activités . Certains clients viennent expressément à la taverne pour son cadre, qui intrigue beaucoup ", sourit le cuisinier originaire d’Ath, qui peut servir une quarantaine de couverts.

Un «assembleur» de bons produits
Rien ne prédestinait Christophe Elius (50 ans) à embrasser une carrière dans la restauration. " J’ai officié pendant 20 ans comme éducateur spécialisé au home Livémont d’Aubechies. L’oncle de mon épouse, Christian Coulon, qui avait repris les rênes de la taverne, est tombé malade et j’ai décidé de me réorienter professionnellement. Je voulais pérenniser l’histoire familiale de la taverne, qui avait un beau potentiel de développement en exploitant davantage les mets locaux. C’est ainsi que j’ai suivi durant 3 ans une formation de restaurateur, organisateur de banquets et traiteur en cours du soir ", explique-t-il.
Dans la cuisine de la taverne Saint-Géry, aucun produit préparé ne rentre… La trentaine de plats inscrits à la carte, qui ont tous leur histoire, sont des réalisations maison qui fleurent bon les saveurs de la région, à des prix démocratiques (moins de 20 €).
" Je défends une cuisine de produits locaux, où rien n’est guindé. Dans mon métier, je n’ai pas la prétention d’être un grand restaurateur. Je me considère plus comme un assembleur de produits de qualité. Il n’y a pas besoin de créer des associations complexes pour magnifier une viande, des légumes… La simplicité, ça me tient à cœur. "
Porte-drapeau de notre terroir, le chef Christophe Elius, dont l’établissement est situé à un jet de pierre de l’Archéosite, est aussi un mordu d’histoire. Cela tombe bien puisqu’il a trouvé un moyen de mêler ses deux passions en imaginant des recettes gallo-romaines. " Je me suis notamment inspiré de bouquins sur la cuisine historique ".
Son imagination foisonnante l’a amené à proposer six sortes de pavé qui se présentent sous la forme de… pommes de terre farcies. Un clin d’œil à notre région "patatière". " Les clients peuvent déguster un pavé André Bourvil (NDLR: un acteur qu’il chérit) ou encore un pavé romain servi dans une crêpe salée avec du poulet, des épices et du miel. Chaque assiette est accompagnée d’une salade (7 variétés!) à l’accent romain, associant des fruits secs, du parmesan… "
Une clientèle internationale!
L’excellente table d’Aubechies s’est taillé une solide réputation, aussi bien pour son écrin unique que pour la cuisine de cœur de Christophe Elius.
L’établissement attire la curiosité d’une clientèle venue des quatre coins du monde! " On accueille un tiers de Flamands mais aussi, grâce au Shape et à l’OTAN, des Américains, des Anglais… Des touristes du Brésil, d’Italie, de Pologne ou du Danemark se sont aussi arrêtés chez nous. On reçoit parfois des gens qui pensent arriver à Disneyland parce qu’on est connu. Mais on n’a jamais changé à notre philosophie depuis 13ans. Le fait d’être référencé dans pas mal d’ouvrages, dont le célèbre guide Lonely Planet, facilite les choses ".
Le compositeur d’Édith Piaf, Charles Dumont, est venu s’y restaurer
La médiatisation du petit restaurant, qui a fait l’objet de nombreuses émissions sur le patrimoine ou la gastronomie, n’est pas étrangère à ce succès.
Des personnalités comme Jean-Philippe Watteyne, Julien Lapraille (ex-candidats de Top Chef), le chef étoilé Benoît Neusy (L’Impératif) ou le compositeur Charles Dumont, auteur de dizaines de chansons pour Édith Piaf, sont venues s’y attabler. " C’est fou ce qui nous arrive car on a démarré de rien, d’un simple café de village. "
Bleuse Tartine: «Un plat qui raconte l’histoire de notre région»
Comment sublimer un produit aussi banal que le pain et qui a très rarement sa place en cuisine? Christophe Elius nous en fait la démonstration avec sa Bleuse Tartine, composée de magret de canard fumé, de pommes et de fromage bleu.
La plupart des plats préparés par Christophe Elius sont truffés de clins d’œil avec, comme sources d’inspiration ses attaches et l’histoire de notre région dont il est l’un des meilleurs ambassadeurs. La Bleuse Tartine, proposée à la carte au prix de 14,90 €, en est une belle illustration puisque son nom fait référence à une petite rue d’Aubechies située à 500 mètres de la taverne.
" Il était assez courant, autrefois, pour les habitants de stocker leur pain dans la cave. Le problème, c’est que l’on vit dans une région fort humide et les tartines bleuissaient rapidement à cause de la moisissure ", raconte le chef de l’établissement, qui s’est aussi raccroché à quelques souvenirs marquants. " Lorsque je travaillais au home Livémont, on partait en vacances avec les résidents dans des refuges de montagne. Je me rappelle que l’on avait pour habitude d’y manger de grandes tartines avec du fromage fondu.Je trouvais ça assez sympathique, un peu comme le pain nappé de fromage blanc que faisait la grand-mère de mon épouse. "
Une création pour Jean-Pierre Coffe

À la fois simple et authentique, cette spécialité "coup de cœur" a été imaginée il y a 10 ans à l’occasion de la venue du célèbre cuisinier et critique gastronomique Jean-Pierre Coffe. " C’était le bon dieu du terroir qui descendait dans notre taverne . Ça a été un privilège de le recevoir; on en garde un souvenir mémorable ", nous dit Christophe Elius. Avec la Bleuse Tartine, le restaurateur belœillois démontre qu’il est possible de confectionner une assiette savoureuse en s’appuyant sur un produit alimentaire de base, fort peu utilisé en cuisine.
Il est temps de lever un peu plus le voile sur cette création unique, récompensée d’un Saule d’or en 2017 par le jury des Fins Gourmets, un concours mis sur pied par le Parc naturel des plaines de l’Escaut.
Première étape pour Christophe Elius, la découpe d’une tranche de pain demi-gris " de style abbaye ", sur 2 cm d’épaisseur, provenant de la boulangerie du Moulin (Ellignies). Le secret de cet épicurien, c’est d’y associer des produits de qualité issus de notre terroir. " Différentes couches se superposent sur la tartine: j’ajoute d’abord 100 g de magret de canard fumé fourni par la ferme Van Nieuwenhuyse (Laplaigne), quelques tranches de pommes des Vergers de Brunehaut et de la Fourme d’Ambert (fromage bleu) affinée au Sauternes par Jacquy Cange (Stambruges). Vous faites ensuite gratiner la Bleuse Tartine avec du gruyère en la passant 10 minutes au four, à 220 degrés. "

En accompagnement, le cuistot compose une petite salade fraîche assaisonnée d’une vinaigrette maison (à base d’huile d’olive, de framboise, de noix et de tournesol), le tout agrémenté d’un mix de fruits secs et de copeaux de parmesan. Un délice!
Cette recette originale présente l’avantage d’être facile à reproduire à la maison, en peu de temps. " Il ne faut pas forcément utiliser des produits nobles pour obtenir de bons plats. Les gens peuvent s’amuser avec une tartine, en adaptant la préparation selon leurs envies, avec des restes de cuisine (jambon, saucisson…) par exemple. Une bonne façon de lutter contre le gaspillage alimentaire ."