Tribunal de Tournai : antivax, il prend la fuite avec ses enfants pendant trois mois
Du 20 août au 29 novembre 2021, Fanny Talleuw avait été privée de ses enfants, enlevés par leur papa. Celui-ci comparaissait jeudi devant le tribunal correctionnel de Tournai.
Publié le 04-05-2023 à 16h04 - Mis à jour le 04-05-2023 à 16h11
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" Après des mois d’angoisse, de questionnements, d’attente interminable, c’est avec beaucoup d’émotions, de bonheur et d’amour que j’ai retrouvé mes enfants à la maison ", expliquait Fanny Talleuw le 1er décembre 2021. Trois mois et demi plus tôt, elle signalait la disparition de ces cinq enfants, enlevés (ou non restitués) par leur père après plusieurs semaines de vacances passées au Portugal, où le prévenu jouit d’une résidence.
C’est au Portugal que les enquêteurs ont creusé pour retrouver une trace des enfants, au Portugal que la maman a effectué un aller-retour pour repartir bredouille, sans aucune nouvelle. "Quand la police a frappé à ma porte, j’ai paniqué. J’ai cru qu’on allait me les retirer pour de bon, alors j’ai pris la fuite avec eux", répond Pascal (prénom d’emprunt) aux questions de la Présidente Sylviane Pichueque.
Pourquoi le papa a-t-il paniqué ? "Je ne voulais pas qu’ils soient vaccinés contre le covid-19. Dans mes réseaux lobbyistes, beaucoup de gens affirmaient que la vaccination deviendrait obligatoire en septembre 2021 pour les enfants. Je vis pour eux. Ma façon de les protéger, c’était de les emmener."
Question centrale autour de cet enlèvement : la durée de la fuite. "Pourquoi a-t-elle duré si longtemps ? Pourquoi, après une phase de panique, n’êtes-vous pas revenu à la raison pour trouver une solution moins radicale ?" s’interroge la Présidente. "La première chose à faire pour enrayer cette spirale infernale dans laquelle vous vous embarquiez était de ramener les enfants et de dialoguer. La période du covid était angoissante pour tout le monde, mais tous les parents qui étaient contre la vaccination ne se sont pas enfuis avec leur progéniture." D’autant que la maman révèle, à la barre, qu’elle se positionnait aussi contre la vaccination pour ses enfants, ne l’estimant pas utile.
101 jours sans aucune nouvelle
Juliette (prénom d’emprunt) est l’autre prévenue de cette affaire. La trentenaire a porté aide et assistance au papa des enfants. "J’ai fait le choix de le soutenir parce que j’ai entendu, dans mon cercle proche, plusieurs problèmes de santé majeurs survenus après l’administration du vaccin. Mon but était aussi de préserver leur santé ", se défend l’intéressée.
Avocate de Fanny Talleuw, Me Derycke estime que le prévenu "tient des propos interpellants". Elle précise: "la solution était de rendre vos enfants, pas de les isoler de tout pendant 101 jours. Au moment où vous annoncez à leur mère que vous vous opposez à lui rendre vos enfants en visioconférence, certains sont en pleurs. Leur mère n’a pas eu de nouvelles pendant plus de trois mois. Son angoisse était terrible. Quant aux enfants, ils étaient déscolarisés et planqués dans une chambre d’hôtel. Vous imaginez bien qu’ils ont dû se reconstruire après cette épreuve interminable."
La médiatisation de l’affaire aurait-elle précipité les prévenus dans la paranoïa ? "La décision de fuir, il ne l’a pas prise au moment où les policiers sont venus le trouver. Il avait élaboré ce projet en amont", déclare Fanny Talleuw.
Depuis décembre 2021 et l’épilogue de cette chasse à l’homme, l’individu a été incarcéré préventivement trois semaines en France, puis un mois en Belgique. Il n’a pas revu ses enfants depuis qu’on les lui a retirés. Avocat de la défense, Me Dufrasne précise qu’il s’agit d’un "père qui aime profondément ses enfants et qui voulait les protéger. Pris dans l’engrenage de la folie autour du covid, il a pris les mauvaises décisions. Son intention n’était pas de nuire."
La substitut du procureur réclame 8 mois d’emprisonnement pour le prévenu et 6 pour sa complice, sans s’opposer à une mesure de faveur. Quant à l’avocat de la défense, il sollicite une suspension simple du prononcé, insistant sur le fait que les deux prévenus n’ont aucun antécédent judiciaire.
Le jugement sera rendu le 6 juin prochain.