Le Grand Prix de l’E3, qui s’affiche en Wallonie picarde, veut faire taire toute polémique
"Parlons de la course…" Il n’y a pas à dire: ils savent y faire, en matière de marketing, les organisateurs de la Saxo Classic E3 à Harelbeke
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Publié le 06-03-2023 à 11h01 - Mis à jour le 06-03-2023 à 11h40
Certains usagers qui empruntent la chaussée de Renaix, entre Anvaing et Dergneau, sans pour autant maîtriser la langue de Vondel, se sont sûrement demandé quelle pouvait bien être la signification de la bâche publicitaire – au slogan rédigé exclusivement en néerlandais – placée à hauteur de la station-service de Saint-Sauveur.

Un côté rock’n’roll !
On y découvre une mystérieuse dame, très "classe", dont l’élégant chapeau noir et bleu masque les yeux ainsi qu’une partie du visage, tandis que sa main droite, portée à la bouche, est vêtue… d’un gant de coureur cycliste. Car cette affiche annonce en réalité le prochain Grand Prix de l’E3 à Harelbeke. Il s’agit quasi d’une institution en Flandre, où les médias font leurs choux gras de sa sortie annuelle: réputée pour être accrocheuse, elle est attendue avec impatience par les aficionados de la petite reine… mais pas seulement. Certains estiment qu’on parle même plus de cette bannière que de l’épreuve elle-même. Et cela surtout parce que, en plus de créer l’événement, elle a aussi souvent, par le passé, provoqué la controverse, en étant par exemple accusée à plusieurs reprises de sexisme.

Chargé des relations publiques de l’épreuve reprise au World Tour, Jacques Coussens, son concepteur depuis 2008, aime jouer avec un petit côté provocateur, ou une connotation sexy, voire érotique, de cette image publicitaire dont la réalisation est confiée à l’agence C-Design Graphics d’Ooigem: comme en 2009, avec la sœur de Niko Eeckhout posant nue sur un vélo, ou deux ans plus tard, des petits vélos en train de gravir le corps dévêtu du mannequin Gaëlle Garcia Diaz couché dans l’herbe. L’organisation se défend de vouloir choquer. Elle jouerait plutôt la carte du second degré: " C’est pour rigoler…" Et si la pub ne plaît pas à tout le monde, cela marche: on en parle tant que la campagne de promotion atteint à chaque fois son but !
En 2019, l’affiche montrant deux jeunes femmes bodypaintées disposées de manière à former une grenouille attendant le prince (coureur) charmant, avait ainsi dû être remplacée. On peut encore citer les vaches fans de cyclisme (2010), le prêtre déclarant que La course est sainte, la victoire est bénie (2016), un shérif masqué, ressemblant étrangement à Tom Boonen, réalisant un wheeling (2018), le bébé au lange bleu porteur de tatouages Mommy’s Rebel et Pas pour les coureurs faibles (2019), etc.
"Qui suis-je ?"
La banderole qui a provoqué la plus grande polémique ("la plus culottée " selon certains) date de 2015: on y voyait une hôtesse de dos, jupe soulevée, et la main d’un coureur s’en approchant – clin d’œil à un geste du Slovaque Peter Sagan sur le podium du Tour des Flandres deux ans plus tôt – avec ce texte: Qui les pincera à Harelbeke ?
Après plusieurs plaintes pour misogynie et une injonction de l’Union cycliste internationale (UCI), la bannière avait également été retirée. Mais elle avait fait, comme pas mal d’autres avant, "le buzz", donnant à l’épreuve flandrienne un petit côté punk…

L’affiche de 2023, la "Frasnoise", prend le contre-pied. Elle semble confier qu’après toute l’agitation – le ramdam, dirait-on, à Tournai ! – provoqué par la plupart des photos précédentes, "cette fois, on ne veut plus parler que de la course (sous-entendu: et de rien d’autre…"). Pour réussir son coup médiatique, elle comporte néanmoins un côté mystérieux, parce qu’on ne sait pas qui est cette personne – "Maar wie ben ik ?", interrogeait une seconde photo – alors que certains pensaient même qu’il s’agissait d’un homme… Ou plutôt, on ne le savait pas puisque les organisateurs ont révélé, il y a quelques jours à peine, qu’il s’agissait de l’ex-cycliste professionnelle, devenue journaliste, Ine Beyen.
La Saxo Classic de l’E3 aura lieu le vendredi 24 mars: les coureurs partis d’Harelbeke passeront notamment par Flobecq (La Houppe), Renaix et Mont-de-l’Enclus (cote du Trieu à Russeignies).
On verra ce jour-là si la nouvelle affiche du Grand Prix a eu son petit effet auprès du public de Wallonie picarde.