Mes Damien Brotcorne et Valéry Gosselain, de vosavocats.be (Ath et Leuze) sur la réforme du code pénal
En novembre, le gouvernement s’est mis d’accord sur une nouvelle mouture du code pénal. On apprend à cette occasion que les courtes peines de prison n’étaient pas appliquées. Qu’en est-il exactement ?
Publié le 22-12-2022 à 18h00 - Mis à jour le 03-01-2023 à 10h49
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Me Damien Brotcorne: Tout va changer… c’est l’intégralité du Code pénal (qui existe depuis plus de 150 ans) qui est revue. L’ancienne classification (désuète) des infractions, délits et crimes et les Titres et sous titres du code pénal sera supprimée L’objectif du Ministre de la Justice est de faire entrer la justice dans le 21e siècle. Il y aura désormais (si le projet est validé par le Parlement) huit niveaux de peine classés selon leur gravité. Nous constaterons concrètement, quand le nouveau Code sera validé, ce qui changera vraiment. Par contre, les avocats et leurs clients sont déjà concernés par une partie de la réforme qui est déjà entrée en vigueur, celle concernant la "réforme du Code pénal sexuel".
On apprend à cette occasion qu’en Belgique, les « courtes peines » de prison n’étaient pas appliquées. Qu’en est-il exactement ?
Les courtes peines ont toujours été appliquées mais pas dans leur intégralité et pas nécessairement en prison. Pour une peine en dessous de 3 ans, cela restait de la compétence des directions de prison. Pour les peines de plus de 3 ans, c’est le Tribunal de l’application des peines qui reste compétent. Dans ce cas, la plupart du temps (il y a certaines exceptions en matière de terrorisme et de faits de mœurs), les personnes condamnées à une peine en dessous de 3 ans qui recevaient leur billet d’écrou, n’entraient en prison que quelques heures pour signer leur acceptation d’un bracelet électronique permettant leur maintien à domicile.
À présent, l’ancien système reste d’application pour les peines de moins de deux ans mais pour les peines entre 2 et 3 ans (jugement prononcé après le 31/08/22), le principe est d’exécuter la peine en prison. Même s’il existe toujours des possibilités d’exécuter tout ou partie de la peine en dehors de la prison. C’est désormais le Juge de l’application des peines qui en décidera, et non plus la direction de la prison.
Des citoyens comprennent mal qu’une peine de prison, même légère, ne soit pas purgée…
Me D.B.: Tout d’abord, il n’est pas possible de mettre en prison toutes les personnes condamnées à des peines légères car il n’y a pas assez de place.
D’autre part, la Justice souhaite modaliser les sanctions pour permettre à la personne condamnée (parfois bien longtemps après les faits) de continuer à évoluer ou se réinsérer dans la Société. La Justice ne veut pas mettre à mal l’évolution sociale (travail, famille…) du condamné entre le moment où il a commis l’infraction et le moment où il reçoit son billet d’écrou.
Cela ne s’applique que pour les personnes qui sont condamnées plusieurs mois voire années après les faits commis car les détenus avant condamnation, eux, continuent de purger leur peine en prison (vu qu’ils y sont déjà).
Pour les infractions en matière de roulage, l’emprisonnement se justifie-t-il ?
Me Valéry Gosselain: Des peines de prison sont parfois prononcées par les tribunaux de police, principalement en cas de récidive (faits nouveaux dans les trois ans d’un jugement) ou de faits graves commis après d’autres condamnations, hors cas de récidive.

Elles ne seront cependant pas exécutées car inférieures à deux ans et surtout parce qu’elles sont quasi tout le temps accompagnées d’une mesure de sursis ne rendant la peine de prison concrète qu’en cas de nouveaux faits.
Le but de la mesure de prison est surtout de laisser au-dessus de la tête du condamné une épée de Damoclès pour le dissuader de commettre de nouveaux faits.
Dans l’état actuel de la politique carcérale, les condamnés à des peines de roulage ne sont pas prioritaire dans la distribution des places libres en prison.
Les formations à la sensibilisation des conséquences dramatiques d’une conduite inadaptées m’apparaissent être plus efficaces qu’une politique sanctionnatrice, même si l’on peut entendre le désarroi des familles endeuillées par un accident de la route.