Une plateforme pour aider et relier les projets d’alimentation durable
Le site espaces-ter.be vise à orienter les porteurs de projets, les distributeurs et les privés de l’arrondissement de Verviers qui veulent contribuer à la transition alimentaire.
Publié le 17-11-2021 à 19h09
À l’occasion de la semaine wallonne de la transmission (du 15 au 19 novembre), différents acteurs wallons de l’alimentation durable alertent sur cette problématique dans le milieu agricole. Une table ronde était ainsi organisée ce mercredi au Hub Créatif de Verviers pour aborder la question de la transmission et de l’installation de nouveaux projets d’alimentation durable. Les différents interlocuteurs – le Réseau alimentaire de l’arrondissement de Verviers (RATav), le Gal Pays de Herve, la coopérative Invent’Terre, Terre en vue, La ceinture alimentaire liégeoise, Empreinte Brabant Wallon, Job’In et Step Entreprendre – ont ainsi abordé différents outils pour faciliter leur installation et leur développement.
Pour ce faire, depuis plus d'un an, le RATav, la coopérative Invent'Terre, le GAL Pays de Herve, Step Entreprendre et Job'In, avec le soutien financier de la Solwalfin, organisent ce qu'ils ont fini par nommer: "Les espaces'ter". Il s'agit d'un "système à mi-chemin entre l'espace test et la coopérative d'indépendant" à travers duquel ils cherchent à accompagner ensemble les porteurs de projets pour leur permettre de les tester en conditions réelles. "En septembre 2020, Job'In, Step Entreprendre et Invent'Terre ont fait un appel aux candidats désireux de se lancer dans le maraîchage et/ou la transition alimentaire. De fil en aiguille en plus de la formation en entrepreneuriat, on les a aidés à trouver un terrain, on a complété avec un regard technique, en faisant entrer d'autres acteurs", rembobine Benoît Delhez, chargé de mission produits locaux au GAL Pays de Herve.
Des dix candidats qui s’étaient à l’époque présentés, trois ont mené leurs projets au bout. Brenda Bours qui a démarré son maraîchage et petit élevage à Baelen en 2021 (Le Préchange), Simon Goffin qui s’est installé début juin chez Invent’Terre (Simon le maraîcher) et Vincent Lefèvre (Domaine Thor’mate à Goé). Ce dernier a cependant mis son projet sur pause pour le moment. Ces entrepreneurs ont pu bénéficier également de la mise à disposition d’un terrain, de matériel et/ou d’aide financière pour l’achat de matériel (trois serres ont été achetées par Invent’Terre).
Un site internet
Après ces premières expériences, les Espaces'ter se dotent aujourd'hui d'une plateforme: espaces-ter.be. On y retrouve notamment des petites annonces pour des terrains à exploiter. "Pour le moment ce sont des terrains privés qui sont proposés non pas contre un loyer, mais contre des services. Mais il y a des communes qui nous ont déjà dit qu'elles étaient intéressées aussi ", explique Benoît Delhez. Cependant, le site ne s'adresse pas uniquement aux porteurs de projets, il vise aussi les distributeurs. "Ils peuvent nous contacter pour que l'on relaie leur demande de certains produits aux producteurs". Finalement, un onglet "je veux investir" propose à tous les privés à financer la transition alimentaire. "On les invite à nous contacter pour qu'en fonction de leurs souhaits on puisse les mettre en relation avec les bonnes personnes. À termes on pense que les citoyens seront de gros leviers de cette transition alimentaire", tranche Renaud Keutgen, coordinateur au RATav.

Entre 1980 et 2019, le nombre d'exploitations agricole en Wallonie est passé de 37 843 à 12 733. Leur superficie moyenne est quant à elle grimpée de 21 hectares à 58 hectares selon Statbel. Ces chiffres ne sont pas prêts de s'inverser pour Françoise Ansay de Terre en vue, une association, coopérative et fondation qui cherche à faciliter l'accès à la terre. "Depuis quarante ans la tendance générale est à l'augmentation de la taille des exploitations et à la diminution du nombre d'agriculteurs. Mais ce qui va s'accélérer maintenant, c'est le vieillissement de la population agricole car plus 70% à plus de 55 ans. Ce qui vaut dire les dix ans ils devraient partir à la retraite et on sait aussi que parmi ces agriculteurs plus de la moitié n'a pas de repreneurs connus. Des centaines et des centaines d'hectares qui vont ainsi se libérer."
De quoi s'inquiéter pour les différents acteurs de l'alimentation durable car les jeunes n'ont déjà plus les moyens de reprendre des exploitations devenues trop grandes et donc trop chères. "Les terres arrivent sur le marché par gros bloc, mais aucun jeune agriculteur ne sait racheter 40 hectares d'un coup. Et donc ce sont de gros investisseurs de l'agroindustrie qui les achètent." La transmission est ainsi un enjeu de taille pour l'agriculture wallonne. "Les terres qui se libèrent, c'est un tabou on n'en parle pas. Il est essentiel que la transmission revienne sur la place publique et qu'il y ait des lieux pour en parler", plaide Renaud Keutgen (RATav). "Au sein du GAL, il y a la campagne pâturage avec laquelle on essaye de faire prendre conscience aux agriculteurs de la valeur de leur outil et de l'intérêt de leur ferme ainsi que de l'impact de sa disparition sur toute la région", indique Benoît Delhez.
Des projets de fermes collectives, partagées entre différents agriculteurs pour en diviser le poids de l’investissement, constituent également une piste de solution. Finalement, pour ces associations, la Région wallonne doit mettre en place des actions incisives de régulation des prix du foncier et de droit de préemption. Terre en Vue et le Ratav contactent également les communes pour les responsabiliser et les conduire à développer une politique foncière inscrite dans la transition alimentaire.