Un mois après les inondations, Theux panse ses plaies
Cinq semaines après le déluge, la commune de Theux reprend doucement vie. Mais le travail de reconstruction reste titanesque.
Publié le 18-08-2021 à 07h10
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Un mois. Pour les personnes sinistrées, c’est à la fois long et court. Long parce que les démarches pour remettre en état les maisons, tant pour le volet administratif que pour la réalisation des travaux, demandent du temps. Et court parce que le souvenir de ces terribles inondations, lui, reste intact et continue de hanter, comme au premier jour.
Pourtant, comme ailleurs, les Theutois sont bien décidés à se relever. Depuis le 14 juillet, des commerces ont rouvert leurs portes dans le centre, comme la boulangerie, les rues ont été nettoyées et bon nombre de riverains ont pu regagner leur maison. Même si tous les stigmates ne sont pas encore effacés.
L’heure est donc aujourd’hui à la reconstruction et à un retour à une certaine autonomie. Mais il faut être honnête, le travail qu’il reste à accomplir à Theux est conséquent. Car contrairement à ce que certains peuvent penser, il n’y a pas que la place du Perron qui a été touchée par la catastrophe. De nombreux endroits de la commune ont souffert. On doit notamment citer Polleur, Marché, les Forges, Spixhe, Juslenville ou encore Forges Thiry.
Au total, dans les prochains mois, il va falloir rénover et sécuriser pas moins de 4 km de berges, 15 ponts et 20 000 m2 de voiries sur le territoire communal. Tout en continuant d’accompagner les citoyens dans le besoin, que ce soit pour se nourrir ou pour se loger. Actuellement, on dénombre quelque 950 logements impactés, à différents niveaux, et deux habitations devront probablement être démolies. Hébergées jusqu’au 31 août à Sol Cress, à Spa, 7 personnes doivent également encore être relogées. Si les demandes diminuent, l’aide alimentaire demeure indispensable. Entre 150 et 200 repas chauds continuent en effet d’être distribués chaque jour.
Dans les lignes qui suivent, L'Avenir Verviers a décidé de dresser l'état des lieux de la situation theutoise. cinq semaines après, en compagnie du bourgmestre Didier Deru.
«Theux sans commerce, ceserait une ville qui meurt»
Le bourgmestre Didier Deru nous offre une vision à 360 degrés de sa commune et ses défis un mois après les inondations qui l’ont durement touchée.
1.L'aide alimentaire?
Aujourd'hui à Theux, un mois après la catastrophe, le bourgmestre Didier Deru évalue la demande alimentaire comme étant «en régression» pour la simple et bonne raison que «certaines personnes sont rentrées chez elles, ont trouvé d'autres solutions» ou ont simplement reçu un réchaud fourni via la Commune grâce aux services clubs – 150 au total issus du Rotary – «ce qui leur permet d'au moins fristouiller chez eux». Des repas sont par contre toujours distribués à midi et le soir, approximativement 180 à chaque fois, soit 360 quotidiennement. Le tout étant depuis vendredi coordonné par la Défense (avant, c'était géré la par la Croix-Rouge) via un conteneur et une tente installés place du Vinave pile en face du Delhaize sinistré. Les habitants touchés par les inondations viennent alors pour la plupart y chercher leur nourriture à l'exception de 25 personnes qui sont livrées à domicile par les militaires notamment du côté de Marché, leur situation ne permettant pas le déplacement. «Nous avons aussi le service à domicile du CPAS qui continue bien de fonctionner», ajoute le mayeur.
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Toujours en activité depuis le 15 juillet, les bénévoles de l'épicerie sociale place du Perron continuent de distribuer gratuitement des vivres aux personnes dans le besoin du lundi au vendredi de 9 à 13 heures. « Avant cela, elle était ouverte chaque jour tout au long de la journée mais ici, la demande s'amenuise», ce qui explique par ailleurs aussi que les produits vont progressivement devenir payants, comme cela devait être le cas initialement pour cette structure dont la création était prévue bien avant les inondations et pour laquelle l'ouverture a été accélérée par les événements. Quant à savoir combien de temps va perdurer cette aide alimentaire, «tout dépendra du cadastre, répond Didier Deru. «Pourquoi? Parce que certaines personnes qui sont rentrées chez elles vont peut-être se rendre compte qu'il est difficile de rester là et vont devoir migrer en attendant que leur habitation soit opérationnelle.»
À noter qu’au niveau de l’eau, qui a été source de problèmes la première quinzaine après les inondations, elle est potable sur l’ensemble du territoire communal depuis le 30 juillet.
2.Le relogement?
Reloger les sinistrés fait toujours partie des priorités de la Commune de Theux à ce stade de la crise. À ce jour, il reste sept Theutois – contre vingt il y a quinze jours – au centre d'accueil de Sol Cress à Spa, cohabitant avec les demandeurs d'asile depuis fin juillet. «Le lendemain des inondations, on comptait 95 personnes» qui ont d'abord été hébergées à l'IPEA de La Reid et à l'école communale de Juslenville «pour parer à l'urgence». Certaines de ces personnes sont simplement rentrées chez elles, ont migré vers d'autres logements ou d'autres communes, «deux familles ont trouvé un logement sur la commune de Malmedy via l'AIS – l'Agence Immobilière Sociale» – tandis que certains habitants ont rejoint des logements de transit. «Il y a toujours un réel accompagnement social réalisé» pour reloger les sinistrés pile cinq semaines après les événements.
La date butoir du 31 août arrivant à grands pas et marquant la fin de la possibilité d'hébergement de sinistrés à Sol Cress, le bourgmestre doit aujourd'hui réfléchir à une autre solution. « Au fur et à mesure de l'évolution des études de stabilité, on fera face à certaines personnes qui seront amenées à ne pas pouvoir tout de suite rentrer chez elle. Nous avons pris des contacts avec le camping de Polleur qui pourrait nous dépanner. On active tous les réseaux au maximum.»
3.La reconstruction?
Avec pas moins de 950 logements impactés à des degrés divers, – ce qui peut représenter «1 800 personnes», chiffre avec précaution le bourgmestre Didier Deru – le travail de reconstruction va être colossal. «À Theux, nous avons aussi beaucoup de vieilles habitations avec énormément de bois. Il y a une grande attention à avoir au niveau de la mérule ou de différents champignons. Il faudra vraiment être attentif à la question de savoir si elles ne vont pas se dégrader avec le temps.»
L’heure est d’abord et toujours aux constats des dégâts. Une analyse du bâti a débuté, réalisée par des agents de la Région wallonne, «il s’agit d’une inspection visuelle extérieure et nous attendons les résultats». Une seconde inspection intérieure et extérieure sera réalisée par un bureau d’étude, le bureau liégeois Cerfontaine, plus en
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profondeur. «Objectif? Finaliser l'inspection des 100 maisons les plus préoccupantes pour fin de semaine. Cela nous permettra d'avoir des données beaucoup plus concrètes» avant d'entrer dans la phase de reconstruction. On sait d'ores et déjà que minimum deux maisons, l'une à Forges-Thiry (coupée en deux) et l'autre sous le viaduc de Polleur devront être détruites.
Un gros morceau représentera aussi la reconstruction des sites et bâtiments publics qui sont plus d'une dizaine à devoir subir à moyen et long terme des travaux dantesques et font l'objet actuellement d'expertises et de contre-expertises. Une quinzaine de ponts devront aussi être reconstruits, «tout cela a été en partie vérifié ou doit l'être» tout comme deux passerelles (place Pascal Taskin et quai des Saules qui, cette dernière, sera reconstruite de manière provisoire par l'armée) et 20 000 mètres carré de voiries qui devront être rénovés. «Aux Forges, on est sur de la terre battue. Il y a énormément de travail.»
Par ailleurs, Theux, comme l'ensemble des autres communes, va devoir reconstruire ses berges. Ce qui représente 4 kilomètres au total «dégradés, effondrés ou instables». Des réparations provisoires ont été réalisées derrière la caserne des pompiers, place du Vinave et Forges-Thiry pour contenir le lit de la Hoëgne et éviter «toute catastrophe ultérieure». Sur le long terme, «la réparation des berges devra être une priorité» et les autorités supérieures en seraient bien «conscientes».
4.L'économie et le commerce?
Difficile de faire moins bien que le jour après les inondations d’un point de vue commercial et économique dans l’hyper-centre de Theux. «Il n’y avait plus rien d’ouvert», lance d’emblée Didier Deru. Petit à petit, la place du Perron reprend toutefois des couleurs. Le premier commerçant à avoir offert une petite bouffée d’air frais aux habitants, c’est le boulanger Jean-Pierre qui a très rapidement repris ses activités à deux pas de son commerce sinistré, dans l’ancienne boulangerie du Perron où les dégâts étaient moins importants. «C’était primordial d’avoir une boulangerie. Les commerçants ont vraiment pour la plupart cette volonté de remonter la pente.» Confirmation en ce début de semaine également que la boucherie de la place du Perron va d’ici peu faire renaître ses activités dans un camion devant son enseigne un peu à la manière dont les assurances Theate ont investi un conteneur. Au niveau des supermarchés, Theux en manque toujours cruellement, le Delhaize de la place du Vinâve attendant toujours la fin du chantier de Spixhe avant de rejoindre son implantation de l’avenue Reine Astrid. Si la date de fin août avait déjà été évoquée pour la réouverture de la route, Didier Deru ne préfère pas se prononcer. «Les travaux ont repris mais j’ai rarement vu un chantier se terminer quand il l’avait annoncé.»
S'il est clair que Theux «va aider les commerçants», la Commune ne sait pas encore sous quelle forme exactement. «C'est la suite. Le point a été abordé en collège. Il faut qu'on se penche là-dessus. Theux sans commerce, ce serait une ville qui meurt.» Avec une volonté certaine de soutenir en particulier l'horeca, «déjà fort impacté par le Covid». Des pistes? «C'est la suite» du «programme» dans les semaines à venir maintenant que la gestion de l'urgence est passée.
Une dizaine de sites et bâtiments publics touchés
Le tour des dégâts ces dernières semaines révèle qu’une dizaine de sites et bâtiments publics devront subir d’importants travaux. Les études sont en cours.
La liste est longue. Celle des sites et bâtiments publics touchés par les inondations du 14 juillet. L'administration et le CPAS et aussi la caserne des pompiers qui, un mois après, est en partie opérationnelle. On se souvient tous aussi des premières images montrant une voiture presque engloutie devant la bibliothèque communale qui est aujourd'hui nettoyée mais devra subir un lifting en profondeur et «en priorité» tout comme le home franchimontois, le hall omnisports, la piscine, les terrains synthétiques, les ateliers communaux, deux plaines de jeux (Juslenville et rue des Grands Prés) ou encore la Maison des jeunes. Tous font l'objet d'études diverses en vue d'une réhabilitation.
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bourgmestre Didier Deru (IFR). Dans un premier temps, la Commune a collaboré avec sa voisine jalhaytoise, notamment pour les cartes d’identité et les mariages. Deux conteneurs ont ensuite été installés en face de l’église Saint-Hermès-et-Alexandre, rue de la Chaussée. C’est là que le service population et état civil travaille et reçoit les citoyens aujourd’hui, de 8 à 12 heures du lundi au vendredi. Tout comme le CPAS, dont le rez-de-chaussée, au début de la place du Perron, est hors d’usage aussi.
«Il a fallu s'adapter rapidement mais il faut reconnaître aujourd'hui que cela fonctionne bien.» Toutes les démarches administratives réalisées par ces départements peuvent en effet y être réalisées. Une efficacité d'autant plus nécessaire qu'il est impossible de dire aujourd'hui quand l'administration communale sera à nouveau opérationnelle sur son site originel.
Un bâtiment classé
Plusieurs contacts ont déjà été pris par les autorités communales afin de pouvoir réaliser les travaux nécessaires le plus rapidement possible. «Mais il s'agit ici d'un bâtiment classé, rappelle le bourgmestre. Nous ne pouvons donc pas faire ce que nous voulons.» Parmi les éléments patrimoniaux notables des lieux, on pointe notamment de nombreuses boiseries. «Nous devons donc être très prudents au niveau de la mérule, qui pourrait s'y développer rapidement», conclut-il.
L’électricité, l’eau et le gaz sont rétablis depuis plusieurs semaines
Contrairement à d’autres communes impactées par les intempéries, la commune de
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Theux peut s’estimer chanceuse: elle a déjà récupéré un approvisionnement normal en énergies et en eau.
«Au lendemain des inondations, j'ai été en contact étroit, tous les jours, avec ORES, explique le bourgmestre Didier Deru. Et Theux a finalement retrouvé très rapidement de l'électricité.» Pour le gaz, la remise en marche a été rapide également. Avec un bémol toutefois. «Tout est aujourd'hui rétabli, à l'exception d'une poche du côté des Forges», note-t-il.
L’eau potable dès fin juillet
Pour l'eau, en revanche, la situation était un peu plus compliquée. Pour rappel, la Commune de Theux est le gestionnaire de son propre réseau d'eau (seul Oneux et ses alentours sont fournis par la SWDE). Suite aux fortes pluies et au débordement de la Hoëgne et des égouts, une partie de celui-ci s'est retrouvé contaminé. En attendant que le problème soit réglé, une distribution d'eau était organisée par les autorités. «Cela concernait tout un périmètre desservi par ce que l'on appelle le réseau des Awieux», indique le mayeur. Plusieurs traitements ont donc dû être appliqués pour la rendre à nouveau potable. Et les analyses se sont avérées bonnes le 30 juillet. «Jusque-là, on conseillait aux citoyens de la faire bouillir avant de la consommer. Maintenant, l'eau est potable partout».
Des conditions plus que primordiales pour permettre aux personnes sinistrées de regagner leur domicile.