Meurens Natural: une success-story familiale hervienne
Nominée pour le titre d’entreprise de l’année, Meurens Natural, implantée à Herve et à Thimister-Clermont, est en pleine expansion. Bruno et Bénédicte Meurens, frère et sœur, reviennent sur cette reconversion industrielle réussie.
Publié le 03-12-2022 à 08h00
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Bénédicte et Bruno Meurens, vous avez racheté Meurens Natural en 2014 et codirigez l’entreprise depuis, quels produits propose-t-elle aujourd’hui ?
Bénédicte Meurens: On est acteur dans le B to B (commerce interentreprises) agroalimentaire, on offre des gammes d’ingrédients bios et naturels au départ de céréales. On les trouve sous forme liquide, de sirop, ou sous forme déshydratée, de poudre. Les ingrédients que l’on propose peuvent apporter du goût, des couleurs, du pouvoir sucrant, de la texture,… dans toute une série d’applications de l’agroalimentaire. Une de nos spécificités, c’est que l’on est capable de transformer une série de matières premières (du riz, du blé, du maïs, de l’orge, de l’épeautre…) et non pas seulement une seule comme c’est le cas dans des secteurs proches des nôtres comme la glucoserie conventionnelle. À partir du moment où l’on a de l’amidon dans une matière première, on sait faire notre travail d’hydrolyse.
En quoi ce procédé d’hydrolyse, est-il inédit ?
Bénédicte Meurens: Notre savoir-faire se situe à deux niveaux. D’une part celui de l’hydrolyse, avec notre connaissance des enzymes, on va en ajouter pour couper la chaîne d’amidon en différents types de sucres et puis il y a la partie filtration où l’on utilise des filtrations mécaniques qui nous permettent de conserver les goûts et les couleurs. L’intérêt par rapport à la glucoserie conventionnelle, c’est que l’on a un procédé de production tout à fait naturel. On préserve les caractéristiques de la matière première, ce qui fait que nos produits ont des goûts et des couleurs. Dans le conventionnel, le procédé de déminéralisation rend le produit transparent comme de l’eau et il a la dénomination de sirop de glucose, alors que nous, on aura un étiquetage beaucoup plus favorable qui sera sirop de riz… sirop de blé etc.
La croissance annuelle moyenne de Meurens Natural sur les cinq dernières années et de 24%, comment en êtes-vous arrivé à une telle success-story ?
Bénédicte Meurens: Il y a évidemment plusieurs ingrédients, comme le fait que l’on a toujours été très innovant. On est vraiment les pionniers du secteur bio, on a démarré en 1994 et on était les premiers à apporter ce type de produit sur le marché. En 2010, on a décidé d’offrir nos ingrédients en qualité conventionnelle, naturelle. L’avantage, c’est d’avoir un étiquetage plus propre et de répondre à cette demande du consommateur de mieux comprendre ces étiquetages.
Ensuite, on est sur des marchés qui sont assez porteurs pour l’instant alors qu’il y a quelques années, c’étaient des marchés de niches, mais sur lesquels on a investi beaucoup parce que l’on avait une forte conviction qu’ils allaient être porteurs. Force est de constater que c’est tout à fait en ligne avec les challenges environnementaux et de santé aujourd’hui.
Bruno Meurens: Sur les cinq dernières années, on a aussi fortement investi puisque ce site, celui de Thimister, a été inauguré début 2017. Sur la période 2016-2021, on y a investi 35 millions pour augmenter nos capacités de production (NDLR: en 2021, les lignes de production doublaient à Thimister et une ligne dédiée aux protéines était créée). Et on a vu qu’après nos deux phases d’investissement, à chaque fois la croissance s’est accélérée, on a vraiment eu un bon timing. Et cela a été très vite. Notre gourvernance, c’est une de nos forces, de pouvoir prendre des décisions rapidement puisque l’on est que deux à devoir décider !
Un tel rythme de croissance n’entraîne-t-il pas certaines difficultés pour que les moyens suivent ?
Bruno Meurens: Si on dit non, on ment… (rire). C’est clair que les challenges sont nombreux. Or des investissements financiers qui sont assez lourds à porter pour une PME, en termes de ressources en interne il y a aussi la croissance du nombre de personnes. On est passé de 32 personnes en 2016 à 85 personnes.. C’est une grosse augmentation et il faut trouver ces recrues, ce n’est pas toujours simple. Puis, le chiffre d’affaires grandit aussi vite, on est passé de 22 millions à 66 millions l’année dernière et l’on devrait être proche de 80 millions cette année.. Gérer au quotidien de telles croissances, ce n’est pas tous les jours simple. Mais on est bien entourés, on a des nouveaux, des anciens dans les équipes sur lesquels on peut compter, puisque nous n’avons aucune compétence en production par exemple, pour suivre le quotidien qui n’est pas toujours de tout repos avec des croissances de ce type-là.
Meurens Natural a été une des premières entreprises en Belgique et en Europe à se lancer dans la filière du bio dès 1994, comment est-ce que vous faites en sorte d’y garder en une bonne place ?
Bénédicte Meurens: Que ce soit le bio ou le naturel, l’important c’est de toujours avoir une longueur d’avance et c’est ce que l’on s’efforce à faire au quotidien en innovant, en trouvant de nouvelles matières premières, de nouveaux concepts de produits. Principalement, il s’agit d’avoir une R&D (recherche et développement) très active afin de proposer aux clients des solutions un peu clefs sur porte en intégrants nos ingrédients.
Bruno Meurens: On garde aussi une longueur d’avance sur nos concurrents parce que notre qualité et notre savoir-faire sont reconnus par notre clientèle.
Prix de l’entreprise de l’année: « Il nous apporterait de la notoriété »
C’est déjà une belle reconnaissance d’être en finale, mais ses directeurs croient en leur chance de victoire.
Comment Meurens Natural en est-elle arrivée à se retrouver nominée pour le prix de l’entreprise belge de l’année ?
Bruno Meurens: Les dernières années, on est venu nous demander plusieurs fois si on voulait y participer. Cette fois-ci, on s’est dit que l’on allait rentrer notre dossier et on a eu la bonne nouvelle en octobre d’être dans les trois finalistes. C’est déjà une très belle reconnaissance pour la société puisque l’on est face à des sociétés de plus grandes tailles, cotées en bourse pour certaines. C’est une reconnaissance aussi pour les travailleurs, d’ailleurs une partie nous accompagne ce lundi en car à Bruxelles pour la cérémonie.
Après avoir obtenu déjà le titre de Gazelle en 2020 de la part du Trends-Tendances, était-ce une suite logique ?
Bénédicte Meurens: Les Gazelles ce ne sont que les chiffres (NDLR: les entreprises sont récompensées sur base de l’analyse de leurs comptes), tandis que pour l’entreprise de l’année, les chiffres ce n’est que la porte d’entrée. Il y a ensuite tout une analyse de votre stratégie, d’où vous voulez aller, de vos valeurs, de votre internationalisation etc.
Est-ce que vous vous voyez gagner ?
Bénédicte Meurens: On sait que l’on a quelques atouts, c’est une entreprise 100% familiale, on a une croissance quand même importante ces dernières années et on est sur des secteurs qui font partie des préoccupations actuelles.
Bruno Meurens: Sain pour la santé et durable pour l’environnement… on serait un gagnant dans l’air du temps ! Et on est également une reconversion industrielle réussie en Wallonie (ce n’est pas nous qui le disons).. Et en Wallonie on a tendance à garder l’industrie sans vouloir reconvertir et investir… Mettre une société industrielle qui a réussi une reconversion en Wallonie (NDLR: en se scindant de la siroperie en 1994 pour se consacrer à la transformation des céréales bios), c’est un bel exemple que l’on peut donner. Avec tout ça cela nous donne quelques chances pour remporter le prix.
Qu’est-ce que cela apporterait à l’entreprise de recevoir un tel titre ?
Bruno Meurens: Pour ses travailleurs, ce serait déjà une mise en avant de leur travail de tous les jours et du travail effectué durant les dernières années. Cela nous apporterait aussi un peu de notoriété. Quand on parle de Meurens dans la région, clairement tout le monde pense au sirop de Liège et aux produits très traditionnels et pas à un ingrédient innovant… Avec la siroperie, ils sont B to C et nous, on est B to B, on n’a pas une marque forte vis-à-vis du consommateur final. De la notoriété, cela devrait nous aider aussi pour recruter.