Le lait et les céréales, filières privilégiées pour la région verviétoise
Philippe Baret présente, ce mercredi à Dison, le diagnostic agricole et alimentaire de l’arrondissement de Verviers.
Publié le 21-09-2021 à 06h00
Philippe Baret, vous êtes professeur à l’UC Louvain et responsable de l’équipe Sytra. Ce mercredi, à Dison, vous présenterez le diagnostic agricole et alimentaire de l’arrondissement de Verviers, une mission confiée par le RATaV, le Réseau Aliment-Terre de l’arrondissement de Verviers. Quel était l’objectif de départ?
L’objectif, c’est de réfléchir à comment on relocalise l’alimentation. C’est un bel enjeu, puisqu’il y a un but environnemental; et un but économique et social. Se relier, refaire du lien avec les acteurs locaux pour assurer le développement économique de la région, c’est aussi l’objectif du RATaV. Ce qu’on avait comme mission, c’était de définir les priorités. Car c’est un bel objectif global, mais par quoi commencer, par quelle filière? Ce qu’on a dû faire, c’est un diagnostic du territoire, voir quelle est la production agricole autour de Verviers et voir d’où on part (car on ne part pas d’une page blanche). Ce fut la première étape. Ce diagnostic est quantitatif: combien on produit de lait, de légumes, etc. Il répond à des questions et apporte des données statistiques, une photographie… Ce diagnostic a, aussi, une dimension qualitative: y a-t-il des abattoirs, etc.? C’est donc une cartographie sur les produits et une cartographie sur les acteurs, pour faire simple.
Pour déterminer des priorités?
Oui, c’est ce qu’on a fait avec le RATaV afin de définir la mission et de choisir deux filières prioritaires.
Lesquelles?
Si on avait demandé aux citoyens, ils auraient peut-être dit les légumes ou les fruits… Nous, ce qu’on a identifié ce sont les filières du lait et des céréales. On a un territoire où la situation est idéale pour produire du lait de façon durable, mais ce lait est surtout orienté vers les marchés nationaux et mondiaux. Ne pourrait-on pas réfléchir à une relocalisation vers les acteurs de la région et vers les villes voisines?
La filière céréalière s’impose aussi, car il y a une tendance, au niveau wallon, pour se réapprovisionner en céréales. La Wallonie n’est pas du tout autosuffisante. Et lorsqu’on parle avec les agriculteurs, beaucoup envisagent cette diversification. Ce qui a du sens car l’association élevage-agriculture est vraiment intéressante, mais nous n’avons pas aujourd’hui la filière pour valoriser au mieux cette priorité des céréales.
Ce sont des priorités sur du court terme?
Parallèlement, on a essayé de dresser une liste de priorités pour les acteurs locaux. C’est un diagnostic et une feuille de route de ce qu’on peut faire très vite, pour avoir un impact et aider à développer les choses. Ce qu’on n’a pas fait, en revanche, c’est tout le travail de mobilisation des acteurs. Ça doit être fait aujourd’hui, Voir comment ils peuvent s’organiser, aborder la question des contrats… Il y a tout un travail d’organisation des filières sur base des deux portes d’entrée: le lait et les céréales. Car sur ces deux filières, il y a effectivement moyen, demain, d’avoir très rapidement une valeur ajoutée du territoire. Ça ne vaut pas dire qu’il ne faut travailler que sur ces filières, mais les autres c’est pour après-demain. Il faut se fixer des objectifs à court terme et à moyen terme.
À qui souhaitez-vous vous adresser ce mercredi?
C’est aux bourgmestres qu’on va présenter les choses. C’est important de parler aux pouvoirs publics. Les agriculteurs, quelque part, ils savent déjà. Le but, c’est surtout de cibler et de mettre ensemble les pouvoirs publics qui ont un pouvoir d’organisation du territoire, sur ce qu’on mange dans les écoles, etc. L’erreur serait de ne parler qu’aux agriculteurs. Les systèmes alimentaires sont des systèmes avec des agriculteurs, des consommateurs et des pouvoirs publics qui ont un grand rôle à jouer. On sait qu’ils ont eu beaucoup à faire cet été, mais l’agriculture est aussi un facteur de résilience. Et à la suite des inondations, il faut aussi aider à la construction d’alliances entre les agriculteurs et les pouvoirs publics.
Quelles suites à ce diagnostic?
Nous, on fait des missions, on documente, donc on va un peu sortir du jeu. Mais le travail fait à Verviers peut être exemplaire pour d’autres régions. Si chaque territoire mène ce type de réflexion, on pourra créer des interactions, des échanges. La suite, de mon point de vue, c’est la mise en réseau des initiatives à l’échelle de la Wallonie. Sur des bases objectives, il faut que les initiatives puissent de parler, que chacune vienne avec sa carte de visite et dise: voilà ce que moi je peux faire.