Beaumont: elle accuse son ex d'avoir causé la mort du foetus

Le parquet requiert une peine de prison pour une scène de coups du 3 août 2018 considérée comme l’élément déclencheur des complications de santé de Tiffanie, enceinte de 33 semaines au moment des faits.

L.C.
 La mère de famille, qui a perdu son fœtus à 33 semaines de grossesse, mène sans relâche un combat pour faire évoluer la Loi pénale.
La mère de famille, qui a perdu son fœtus à 33 semaines de grossesse, mène sans relâche un combat pour faire évoluer la Loi pénale. ©ÉdA

C’est un dossier de violence conjugale, à l’issue hélas dramatique, qui a été évoqué durant deux bonnes heures ce mardi en journée devant la 10e chambre du tribunal correctionnel de Charleroi. Le 4 septembre 2018, en urgence, Tiffanie se retrouve sur la table d’opération pour subir une splénectomie (ablation chirurgicale de la rate). Un mois avant, elle affirmait avoir reçu des coups au ventre de la part d’Hamid, son compagnon de l’époque.

Les coups pourraient être la cause du décès

Le drame vécu par Tiffanie a eu lieu alors qu’elle entamait sa 33e semaine de grossesse. Le fœtus se prénommait Lounes. Après presque quatre ans et demi de combat et de procédure judiciaire, la plaignante fait enfin face à son ex-compagnon, poursuivi pour une multitude de scènes de coups et blessures, à diverses périodes de la relation sentimentale ayant duré 2 ans. Dans les bras, Tiffanie porte un mini-cercueil avec la photo de Lounes collée dessus.

La mère de famille exhibe également une veste avec des messages lourds de sens au dos: "Quand la violence conjugale tue et que la justice ignore" ou encore "Pas de valeur pénale = pas de valeur". Pour la maman de jumeaux issus de son union avec Hamid, son ex est bien à l’origine de la perte de son fœtus. Mais face à la justice, pas question de parler de meurtre ou de reconnaître le fœtus comme une personne. La Loi pénale est claire: le fœtus n’a pas de personnalité juridique. "C’est un point qui a été assez difficile à entendre pour ma cliente", ajoute Me Sonia Martines, partie civile.

Depuis lors, Tiffanie mène un combat sans relâche pour faire évoluer les choses. Une proposition de Loi, portée par la députée Vanessa Matz (Les Engagés), membre de la Commission Justice, vise à introduire la mort du fœtus dans le code pénal quand celle-ci a été provoquée par un acte de violence envers la maman.

Dans le cas de Tiffanie, un rapport d’expertise a été effectué. La rupture de la rate a provoqué le décès de l’enfant. Et les coups survenus un mois auparavant pourraient en être la cause. C’est possible, mais ce n’est pas toutefois pas confirmé par les experts. Comme ce n’est pas suffisamment prouvé dans le dossier qu’Hamid a bel et bien porté des coups à Tiffanie le 3 août 2018. Le ministère public demande donc l’acquittement au bénéfice du doute du prévenu pour cette prévention.

Les autres scènes de coups et blessures ne sont pas contestées par Hamid qui prétend avoir "repoussé son ex-compagne, en n’ayant jamais porté le moindre coup." Le quinquagénaire est dépeint de façon peu glorieuse par Tiffanie et son avocate. "Il bousculait régulièrement ma cliente. Elle dit qu’il l’interdisait de mettre des sous-vêtements féminins, hormis en sa présence, et elle devait mettre des caleçons à la place. Il y a eu des violences verbales, du chantage, des menaces de mort. Le tout, parfois en présence des enfants. Elle ne pouvait pas sortir et n’avait pas accès au compte bancaire du ménage", énumère l’avocate carolo.

Une responsabilité partagée

Pour le substitut Bouilliez, étant donné l’ancienneté des faits (2018) et l’absence d’antécédent correctionnel pour Hamid, une peine de 10 mois de prison avec un sursis est requise. Après le portrait peu flatteur dressé par la partie civile, Me Frédéric Laurent à la défense a remis l’église au milieu du village. D’après lui, les responsabilités dans ce dossier sont "partagées". Tiffanie aurait pu également se retrouver sur le banc des prévenus, parce qu’elle a aussi donné des coups et s’est montrée virulente, insultante ou menaçante. De son côté, Hamid est loin de correspondre au cliché de l’homme violent qui cogne ses compagnes. "Deux ex-compagnes ont été entendues. Elles ont vécu 8 et 16 ans de relation avec mon client. On parle d’un caractère fort et têtu, mais jamais de violence et c’est un homme qui fuit le conflit."

Un acquittement est plaidé pour la scène du 3 août 2018. Pour les autres scènes de violence, une suspension simple du prononcé est sollicitée.

Jugement fin mars.

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