La vie après le maïorat (13): À Beaumont, oublier la politique et se réfugier dans la BD
Après 36 années de politique communale, Charles Dupuis a tourné la page. Il en tourne d’autres, celles de ses bandes dessinées.
:format(jpg):focal(545x371.5:555x361.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/N5KDZ6MZ5VB7XEYHYBGFXMXCHE.jpg)
Publié le 20-01-2020 à 00h00
Lors des vœux communaux de 2018, Charles Dupuis, l'indétrônable maïeur de Beaumont, annonce non sans émotion: «Aux prochaines élections communales d'octobre, je ne me présenterai plus». Après 6 législatures à la tête de l'entité beaumontois, la chose devait arriver un jour ou l'autre. Et le contexte de la politique locale des mois qui précédaient pouvait laisser prévoir la chose.
Moment difficile que cette annonce mais sans doute pas autant que celui qu'il allait vivre 11 mois plus tard au moment officiel du passage de témoin. Aujourd'hui encore, cela lui fait mal. «Ce soir du 3 décembre 2018, il est 19 h et je préside toujours le conseil pour la séance d'installation des nouvelles équipes. Le temps de quelques prestations de serment et le rideau tombe telle la lame d'une guillotine. Quelques minutes auparavant, j'étais le maïeur et aussitôt après, je ne suis plus rien!»
Finie, la politique
Une transition à ce point brutale que l'intéressé a du mal aujourd'hui encore d'en parler. Les jours qui suivirent l'ont marqué à jamais: «Je plongeais dans un trou noir, je tournais en rond me sentant complètement déboussolé. Au point, pendant tout un temps, de confondre mes jours et mes nuits, de me sentir au plus mal».
Il faudra du temps pour revenir sur terre. Charles Dupuis a aujourd’hui repris son métier d’agent immobilier. L’Immobilière Charles Dupuis qu’il avait mis en veilleuse les dernières années, lui permet de rebondir et de se dire que finalement, il n’y a pas que la politique dans la vie.
A poor lonesome cowboy
Une vie ordinaire que le maïeur ré-apprivoise, faite de journées de travail entrecoupées de temps à autre de semaines de vacances. Une vie remplie des occupations et des plaisirs du quotidien comme les visites chez sa maman. «Et si le soir, je ne trouve pas le sommeil, j'ai mes fidèles bandes dessinées que je lis et relis toujours avec la même intérêt. Une passion qui date de mon jeune âge».
Car pour le reste, il n’est guère de centre d’intérêt qui l’attire: ni le TV, ni le sport, hormis les Diables rouges. Ah, si peut-être, partager avec l’un ou l’autre ami un bon verre de vin, Bordeaux et Côtes du Rhône en tête.
Des breuvages que les vacances lui permettent parfois de découvrir. Des amis qui se font plus rares car après une vie à mille à l'heure, Charles Dupuis se considère maintenant comme son collègue Lucky Luke: «a poor lonesome cowboy»…
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/NOCRTPKJNFD6JDN34IKW43CIYQ.jpg 480w,https://www.lavenir.net/resizer/gjoZO_9hpfYsY-KXG7XGHCed80M=/768x512/smart/filters:quality(70)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/NOCRTPKJNFD6JDN34IKW43CIYQ.jpg 768w)
Durant 6 mandatures, Charles Dupuis a été le premier beaumontois sans aucune interruption. Et pourtant, tout commence par un échec politique. 1976, ce sont les premières élections après la fusion des communes. Celui qui deviendra le premier bourgmestre de l’entité, Joseph Fagot, maïeur sortant de Renlies, le sollicite pour figurer sur sa liste. Un coup d’essai, mais pas un coup de maître: il n’est pas élu et il doit se contenter d’un lot de consolation, un siège au conseil de l’Action Sociale.
Bourgmestre
Six ans plus tard, le PSC local le sollicite à nouveau. Mais Charles Dupuis n’est guère emballé, se souvenant de la déconvenue de 1976. Ses amis insistant, mais il pose des conditions à ce point exigeantes que cela devrait entraîner un nouvel échec qu’il espère à demi-mot. Il veut être tête de liste, candidat maïeur et pouvoir ouvrir la liste à d’autres courants.
Contre toute attente, ses conditions sont acceptées et sa liste ICI (intérêts communaux indépendants) est sur pied. Liste qui va décrocher 7 sièges contre 7 également au PS et 3 à MIL, des libéraux dissidents. ICI et MIL s’allient et bien que n’ayant fait que le 2e score de sa liste derrière Charles Lambert, Charles Dupuis ceint l’écharpe mayorale.
Majorité absolue
La suite, on la connaît. Pour les 5 législatures qui suivent, Charles Dupuis conduit la liste ICI et emporte les élections en majorité absolue.
Ce long bail mayoral ne fut cependant pas un long fleure tranquille. Lors des deux dernières législatures, Charles Dupuis a connu quelques déboires suite aux dénonciations de deux élus. Les «affaires beaumontoises» le rattrapent: déchets ensevelis, abattoir, centre sportif… finalement la montagne accouchera d'une souris.
La fin de la législature 2012-2018 est des plus pénibles pour Charles Dupuis. Il perd sa majorité, ce qui rend ses missions très compliquées et préfigure une fin de règne, et la fin définitive d'une vie politique: «La porte est fermée. Ne me parlez plus de politique beaumontoise, cela me ferait trop mal».
En quelque sorte, une vie politique qui avait débuté par un échec et qui se terminait un peu en eau de boudin. Et de conclure amèrement: «Si vous saviez comme les amis disparaissent…»
Dossiers