Elena, le lien qui facilite la vie des réfugiés ukrainiens dans le sud-Hainaut
Au milieu de la tristesse qu’implique tout exil, Elena apporte un rayon de soleil musical aux réfugiés ukrainiens arrivés chez nous voici près d’un an.
Publié le 28-02-2023 à 16h00
Elena est arrivée de Russie voici plus de 20 ans. Une partie de sa famille est encore là-bas. Mieux que tout autre, elle pouvait comprendre la difficulté de l’exil, de la communication dans une langue inconnue. Et justement, Elena a fait du partage des cultures son métier. Animatrice pour Vitamine Music, elle aime accompagner pas à pas enfants ou adultes dans la découverte d’une autre langue, d’une autre culture. Musicienne et chanteuse, elle marie ses talents pour organiser des ateliers ludiques autour d’idiomes dont le côté parfois rébarbatif disparaît lorsqu’on y mêle les gestes, la musique. "Quand les premiers réfugiés sont arrivés, j’ai été sollicitée pour leur apprendre le français, explique la jeune femme. Et servir d’interprète car j’étais quasi la seule dans le coin à les comprendre. Les cours de français ont aussi été l’occasion d’entendre leurs demandes, leurs besoins. Par exemple, certains venaient de la ville et avaient du mal à ivre à la campagne, où il faut une voiture pour tout, où l’on a plus de mal à trouver du travail… "
Des cours puis des ateliers culturels
Au fil des mois, les plus jeunes sont partis en ville, et les cours de français ont évolué vers des ateliers culturels, qui s’inscrivent plus dans la durée. "On y parle de la Belgique, du folklore, des traditions. Ils trouvent très étrange les marches de l’Entre-Sambre-et-Meuse et leur côté militaire, par exemple. Avec ce petit groupe d’une dizaine de personnes, on continue d’échanger, de découvrir les coutumes et habitudes. Ainsi, ils s’étonnaient qu’en Belgique, les garçons de café n’avaient pas d’uniformes: comment les reconnait-on alors, se sont-ils demandé. "
L’humain d’abord
Au-delà des aspects culturels, ce sont des relations humaines intenses qui se sont nouées. "Au début, je craignais qu’ils n’aient de l’appréhension, parce que je suis russe. En fait, non, on a de suite compris qu’il y avait d’un côté le conflit, de l’autre nos relations, avec tout ce qu’elles comprennent d’humain, de sensible. Et ça, c’est vraiment beau, cela permet d’avancer, dans la connaissance de langue et surtout de l’Autre."
Ces ateliers, au-delà de l’apprentissage d’une langue, d’une diction, d’un alphabet différent, c’est aussi une formidable soupape de décompression. "Sur 2h de rencontres, on passe souvent une heure à évacuer les doutes, les angoisses, ce que chacun a sur le cœur. En contact avec leur pays, c’est compliqué pour eux tout ce qui continue de se passer là-bas. Et pour moi aussi, car comme russe, je suis aussi"punie"; avec le covid et la guerre, je ne peux plus retourner dans mon pays d’origine où j’ai toujours mon papa et une partie de ma famille."
En famille
"C’est très étrange, avec ce qu’on partage, je me sens avec eux un peu comme en famille, cela donne de l’énergie. Au début, je voulais, avec la musique, le chant, apporter un peu de joie, les faire rire, se détendre. ça a fonctionné, au-delà de mes espérances."