Heureux Abri à Momignies: le dernier chapitre d’un livre de 120 ans
Le chantier de démolition du bâtiment historique de l’Heureux Abri, débute ce 1er mars. Épilogue d’une histoire débutée au début du XXe siècle.
Publié le 27-02-2023 à 15h22
Fin janvier, le bourgmestre Eddy Bayard l’annonçait: "Le ministre Borsus vient de signer le dernier document pour la démolition du chancre de l’Heureux Abri. Les premières réunions avec les entreprises désignées vont pouvoir être programmées." Cela n’a pas tardé, en effet, puisque l’on sait désormais que le chantier débutera dès le 1er mars, pour une durée envisagée de 180 jours.
Celui-ci met un terme à une saga débutée en novembre 2016, mais surtout à une longue histoire, dont l’origine remonte, elle, en l’an 1902.
L’école des frères
C’est à Reims que l’imposante bâtisse trouve son origine. Les frères de Saint-Jean-Baptiste de la Salle y dirigent un pensionnat, lorsque la loi Combes impose à toutes les congrégations religieuses de fermer leurs institutions.
Les frères acquièrent alors la propriété du Dr Demanet fin 1903 et y réalisent rapidement d’importants travaux en vue d’accueillir les premiers pensionnaires, dès Pâques 1904.
L’historien local André Deflorenne rappelle: "La rentrée en octobre 1904 est modeste, avec 89 élèves. Mais le succès ne se fait pas attendre. Ils seront 202 l’année suivante, 220 en 1907 et jusque 390 en 1913, juste avant la guerre". L’accroissement de la population scolaire impose rapidement de nouveaux locaux. "Dès fin 1906, la construction du bâtiment dit des Classes fut entreprise: une aile de 60 mètres merveilleusement réussie avec la combinaison de pierre et de brique, comprenant 12 classes et 4 dortoirs".
En 1913, l’édification d’une nouvelle aile, au nord-est, est décidée. Le rez-de-chaussée était réservé à l’installation d’un réfectoire, de la cuisine et de ses dépendances. Les étages étant eux prévus pour les bains, douches, bibliothèques et nouveaux dortoirs. "Les travaux sont terminés pour la rentrée 1914, mais coup du sort, elle n’aura pas lieu. Dès le mois d’août, l’armée allemande fait irruption et réquisitionne le bâtiment pour ses troupes".
À l’issue de la Grande Guerre, l’établissement reprend sa vie petit à petit. En 1923 est érigée l’École Libre des garçons, contiguë au pensionnat. La seconde guerre sera une nouvelle période de troubles, bien que la présence allemande à l’École des Frères ne sera que passagère: "Le lieu se mue en home Prince Albert et accueille les enfants des villes socialement déshérités. Les moines trappistes y vivent en communauté avec le home, l’abbaye étant, elle, occupée".
Après l’armistice, le lieu connaît un timide essai de réouverture de quelques classes, mais dès 1947, la fermeture est définitive: "Seuls quatre frères vont mener une vie monotone dans cet ensemble spacieux, où le calme pesant n’est troublé que lors du passage estival de différents mouvements de jeunesse".
En 1961, les bâtiments sont rachetés par la société d’assurance La Prévoyance Sociale.
L’Heureux Abri
L’ancien pensionnat des frères devient alors l’Heureux Abri, un établissement adapté pour les élèves nécessitant un enseignement spécial de type I et III. Il héberge rapidement 250 enfants dans un cadre médico-psycho-pédagogique. En 1992, alors que les bâtiments sont déjà fortement dégradés, la Prévoyance Sociale souhaite céder la gestion de l’établissement. Une nouvelle structure est instaurée dès 1995-1996 sous l’égide de la Province du Hainaut. Avec la construction de nouvelles infrastructures, à Momignies et aux Quewettes à Seloignes, les bâtiments historiques sont abandonnés dès 2002, à l’exception de quelques classes de l’école primaire. C
elle-ci quittera Momignies pour sa nouvelle implantation en 2021.
Place à la maison de repos
La démolition des bâtiments historiques de l’Heureux Abri lance les travaux destinés à l’ouverture d’une maison de repos, espérée pour 2026.

Décembre 2016. Le conseiller de l’opposition "Intérêts Communaux" Jean-Marc Poullain parvient à rassembler une majorité pour obtenir un amendement au plan stratégique de l’Intercommunale hospitalière, visant à envisager un retour sur investissement de la commune frontalière, par la création d’une maison de repos sur son sol.
Six mois plus tard, il relaye la décision du ministre Maxime Prévot d’accorder 5 millions d’euros en vue de la création d’une telle institution à Momignies. Des accords sont pris entre la commune et l’ASBL Heureux Abri pour la cession des terrains et un subside est également obtenu pour financer la destruction du chancre de la rue de Beauwelz.
Après de nombreux rebondissements et négociations, l’actuel bourgmestre Eddy Bayard informe en janvier dernier que les dernières signatures ministérielles ont été obtenues, tout comme le permis de construire de la future seniorerie, qui comptera finalement 83 lits. Un mois plus tard, le chantier peut débuter.