À Marche-les-Dames, Thomas invite à manger perché et à tester les arbres de la table (photos et vidéo)
Mordu de la grimpe et bourlingueur, Thomas Maro propose, à l’abbaye Notre-Dame du Vivier, de prendre son repas là-haut, dans les arbres. Insolite et naturel.
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- Publié le 29-05-2023 à 21h59
- Mis à jour le 29-05-2023 à 22h02
"J e ne sais pas si vous les avez vues… Elles sont là, juste au-dessus de nos têtes." En suivant le regard malicieux du guide, Thomas Maro, on ne les manque pas, les deux tables suspendues à la lisière de la forêt environnant le domaine de l’abbaye Notre-Dame du Vivier et mises en service depuis le 21 mai.
"Je les ai dessinées avec la société andennaise Élysta qui les a conçues durables. Je les ai hissées à cinq mètres du sol, mais leur point d’accroche est bien plus haut, à 15-20 mètres, pour assurer leur stabilité quand les convives y prendront place."
L’arbre choisi est un hêtre centenaire, un des plus vieux du coin, sur lequel Thomas a pratiqué un diagnostic phytosanitaire s’assurant de la bonne santé et de la robustesse de ce restaurant tout en écorces et à la décoration originelle. "Je fais le tour de l’arbre, repère les champignons ou parasites dont il peut être victime. S’il n’est pas creux et que sa croissance est régulière, que ses feuilles sont bien vertes partout et qu’il arrive à faire monter l’eau jusqu’à sa cime, il est mécaniquement bon. " Feu vert est donné pour l’escalader.

Dinners in the sky d’un autre genre
Le concept est simple, les amateurs de ces autres "diners in the sky", moins guindés et plus sauvages, peuvent réserver leur table et emporter leur pique-nique, le restaurant de l’abbaye proposant aussi des paniers gourmands et des boissons.
"Moi, je montre aux invités la manière d’accéder aux tables, puis je reste en bas, veillant à la sécurité et faisant le service. J’accroche les paniers et les hisse, je rouvre une bouteille de vin au besoin. Quant au participant, en suivant le lierre et la corde, il pourra découvrir plein d’oiseaux et de bestioles. Il y a du monde, de la vie, à tous les étages. L’idée, c’est de se mettre à table, de manger mais aussi de créer du lien avec les autres participants et l’arbre hôte. Avec soi-même aussi. Ça touche aux émotions, c’est engageant physiquement, même si l’ascension est douce, cela demande à certains de se surpasser. Ça me plaît de créer une expérience forte et positive et de contribuer, par là, à préserver notre environnement."

Si l’installation est voulue éphémère et légère, sans même planter une échelle, tout est mis en place pour que l’activité ait le moins d’impact désagréable possible. "Au pied, on veille tous à suivre le même chemin pour éviter le tassement et le piétinage des racines. Je sensibilise à prendre soin de l’être vivant qu’on a en face de nous, sans tirer ses feuilles."
Après le repas, suspendu en permanence par le baudrier, chacun pourra quitter la table et s’aventurer un peu plus loin dans le feuillu, en fonction de son aisance et de sa curiosité. "Je n’ai pas prévu de hamac, mais pourquoi ne pas faire une sieste digestive.", sourit Thomas.

Il y a quatre ans, ce bourlingueur originaire de Bretagne, diplômé éducateur grimpe d’arbres, a lancé sa structure, Vagabond’Arbres. "Depuis un an, je suis indépendant à temps complet. Je propose des séances d’initiation, une fois par mois, mais aussi de la grimpe sur demande, pour des anniversaires d’enfant ou des réunions de famille. En été, j’organise aussi des bivouacs en hauteur et des stages d’autonomie. " On a ainsi pu voir Thomas prendre part à des animations dans des festivals comme La Semo ou Espéranzah !, ou aux grottes de Han, en partenariat avec l’ASBL BelgoCîmes.
Reste que pour mener ce genre de sorties, il faut disposer d’arbres et c’est là que le bât blesse. "J’ai souvent trouvé des beaux endroits et, dans la foulée, été confronté à des refus du Département Nature et Forêt (DNF). Quand c’est public, il est rare que ce soit autorisé d’y entreprendre quelque chose. Il faut donc trouver un privé qui accepte de vous accueillir ou se rabattre sur les sites dédiés aux mouvements de jeunesse. Mais force est de constater que ce ne sont pas les plus belles forêts qui sont mises à disposition de nos enfants. " Le propriétaire de l’abbaye Notre-Dame du Vivier n’a pas été dur à convaincre. La saison des tables suspendues est lancée. Elles seront praticables tous les week-ends de mai et juin et tous les jours de juillet et août, sur réservation. Quatre services seront possibles par jour.
Reconnexion

Venu de Bretagne, donc, Thomas a vu du pays. Formé au métier de cordiste, il y a une dizaine d’années, il a œuvré à la sécurisation de falaises et travaillé dans des industries mais a essentiellement contribué à créer des parcours accrobranche et des cabanes, un peu partout en France. " Au fur et à mesure, j’y ai trouvé moins de sens. Quand je voyais le public utiliser les infrastructures, cela ressemblait plus à un parc d’attractions qu’à une expérience de la nature. " D’où ce besoin de reconnexion pour lui et autrui. Toucher un arbre, faire le lien, ça reste le domaine des sensations fortes, vivantes et vibrantes.
"Mon arbre préféré, c’est le hêtre, tout doux, tout lisse, accueillant. Le chêne, lui, est robuste, il donne et fait confiance. Le tilleul, c’est le symbole de l’amour. Les cèdres du Liban comme de l’Atlas sont impressionnants. "
Thomas voit-il les effets du réchauffement climatiques ? "Je n’ai pas suffisamment de recul. Plus ça va, plus j’en apprends et j’ai l’impression de ne rien savoir. Mais les forêts se sont toujours adaptées. Reste à voir si elles seront suffisamment rapides à s’adapter. Cela dit, j’ai plus peur pour nous, humains, qui risquons de disparaître, que pour notre environnement."
100€/4 personnes, 25€/personnes pour le repas. Infos: 0489 50 52 03 et info@vagabondarbres.be.
vagabondarbres.be