Namur : expo "Portraits de fossoyeurs", l'envers du métier
La Nef accueille l’exposition «Par-delà ces regards : portraits de fossoyeurs». Des clichés pour sensibiliser le public à ce métier méconnu.
- Publié le 14-11-2022 à 14h17
- Mis à jour le 14-11-2022 à 14h36
C’est une profession discrète, mais pourtant indispensable à l’équilibre d’une commune. Être fossoyeur, ce n’est pas seulement creuser des fosses dans les cimetières pour y inhumer les défunts, loin s’en faut.

Depuis les années 1990, le métier s’est complexifié, avec notamment la récupération de corps contenus dans des housses plastiques et des contenants anaérobiques. Des tâches délicates et moralement difficiles pour ces hommes de terrain confrontés, par tous les temps, à la mort et au deuil…

Un envers du décor qui est au cœur de l’exposition Par-delà ces regards: portraits de fossoyeurs, visible gratuitement à la Nef jusqu’au 27 novembre. L’occasion de cerner l’utilité des missions entreprises par les fossoyeurs.
"En vingt ans de métier, j’ai constaté que les fossoyeurs étaient profondément négligés par les décideurs politiques. Leur profession est d’ailleurs l’une des seules qui ne fut pas mise en valeur lors de la crise sanitaire, déplore Xavier Deflorenne, coordinateur de la cellule de gestion du patrimoine funéraire de Wallonie. Le but de cette exposition consiste donc à les mettre en lumière afin que l’on réfléchisse davantage à leur statut."
Difficiles exhumations
Xavier Deflorenne, organisateur de l’exposition, a invité les deux photographes Frédéric Pauwels (collectif Huma) et Olivier Gilgean (Service Public de Wallonie). Chacun de leurs clichés en grand format mêle leurs propres regards à ceux de ces agents communaux confrontés à l’adversité.
"Ensemble, nous sommes parvenus à faire ressortir les sentiments des fossoyeurs avec leurs visages, la couleur ainsi que le noir et blanc", estime Olivier Gilgean. De quoi mieux comprendre les difficultés propres à cette fonction. "En affichant le traumatisme des fossoyeurs, il s’agit de jeter un pavé dans la mare pour changer les règlements liés aux pratiques funéraires", ajoute Frédéric Pauwels.
Frédéric et Olivier ont également eu l’occasion de photographier plusieurs défunts lors de leur exhumation. Un travail, indispensable pour libérer de la place dans les cimetières et ainsi éviter leur extension, qui n’a pas laissé indifférent les deux hommes. "La nuit qui a suivi ma première exhumation a été difficile car des images me revenaient sans cesse à l’esprit", reconnaît Frédéric Pauwels. "En ce qui me concerne, je retiens le respect qui caractérise les fossoyeurs à l’égard des morts, en particulier lorsqu’on déterre le corps d’un enfant. Dans un moment comme celui-là, il règne un silence de plomb", complète Olivier Gilgean. En résultent des clichés pas toujours soutenables pour le spectateur, mais qui reflètent la réalité du métier.
Les mentalités évoluent
Si des inégalités de traitement persistent d’une Commune à l’autre, Xavier Deflorenne constate toutefois un changement progressif du monde politique à l’égard du fossoyeur: "Petit à petit, certains politiciens comprennent qu’il s’agit d’une profession à valoriser car essentielle." Le gouvernement wallon a pris quelques mesures en ce sens. "Nous avons travaillé sur la modification des décrets liés aux sépultures car cette législation doit évoluer selon l’évolution de la société", explique Valérie De Bue (MR), ministre wallonne du Patrimoine. De nouvelles formations ont également vu le jour, à la Région wallonne, pour que les fossoyeurs de demain soient mieux préparés aux prochains défis inhérents au métier.
La Nef, rue Saint-Nicolas à Namur, jusqu’au 27 novembre, en semaine de 14 à 18h, le week-end de 11 à 18h.