Harcèlement scolaire: la reine en visite à l’école de Bouge (vidéo)
La lutte contre le harcèlement scolaire, l’école communale fondamentale de Bouge en a fait son cheval de bataille avec la méthode KiVa. La reine Mathilde s’y est rendue dans le cadre de la semaine contre le harcèlement scolaire.
Publié le 22-02-2022 à 18h19
Effervescence inhabituelle mardi à l'école fondamentale de Bouge. Drapeaux et couronnes tricolores étaient frénétiquement agités par les enfants pour la venue de la reine Mathilde, qui venait découvrir la méthode KiVa, mise en place l'année passée au sein de l'établissement.
KiVa est inspirée de Finlande et signifie "agréable". Implémentée en partenariat avec l'ASBL Université de Paix et des chercheurs de l'UCL, elle vise à lutter contre le harcèlement à l'école par une approche globale. "Ce système s'appuie sur la prévention, l'intervention et le monitoring, indique Christel Paul, la directrice, convaincue que si un enfant ne se sent pas bien à l'école, ses apprentissages en pâtiront. Les enseignants proposent dans leur classe différents types d'activités avec les enfants où ils travaillent à la fois sur le bien-être, l'empathie, l'identification des émotions, et où ils apprennent à exprimer des messages clairs et à dire stop quand quelque chose ne leur convient pas." La méthode est destinée aux 6-12 ans mais selon la directrice, qui gère deux implantations, à Bouge (école du Moulin à vent) et à Beez, une attention est déjà portée aux émotions des tout-petits avec le programme Graines de médiateurs mis en place dès la maternelle.

La force du groupe
La technique KiVa ne vise pas seulement le harceleur ou le harcelé mais s'appuie sur la force et la dynamique du groupe, pour que les témoins qui observent ce genre de faits puissent être "acteurs" et intervenir également afin que l'enfant en difficulté ne se sente plus seul et soit adéquatement soutenu. Tant les enfants que les professeurs coopèrent à la gestion du conflit.
Sur ses deux implantations, des enseignantes ont été formées à l'intervention. "Les enfants sont reçus pour qu'ils puissent expliquer leurs difficultés. Cela permet de faire un premier tri: ces enfants sont-ils réellement victimes de harcèlement ou rencontrent-ils plutôt une situation liée à un problème disciplinaire ?, poursuit la directrice. Dans ce dernier cas, j'organise une table ronde dans mon bureau avec les élèves concernés comme je l'ai toujours fait. S'il s'agit de harcèlement, ces enseignantes disposent d'outils pour intervenir de façon plus précise avec différentes techniques dont le choix dépend de chaque situation."


Entourée par le ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Pierre-Yves Jeholet, et la ministre de l'Éducation, Caroline Désir, la reine a posé bon nombre de questions à ses interlocutrices. "Qu'en est-il du cyber-harcèlement, qui se déroule le plus souvent hors des murs de l'école?" ou "Comment faites-vous pour armer ces enfants face au harcèlement qu'ils peuvent aussi connaître en arrivant dans le secondaire?", a-t-elle notamment demandé. Des interrogations qui trouvent une réponse avec KiVa.

Après cette table ronde avec l'équipe pédagogique, la souveraine a ensuite participé à une animation avec les élèves de 4e primaire. Via des saynètes bien préparées illustrant des cas concrets, ils ont pu montrer les outils visant à détecter et résoudre des situations délicates. "Pour certains enfants, c'est naturel d'aller trouver spontanément un adulte pour signaler que quelque chose ne va pas, ajoute Christel Paul. Mais pour d'autres, ça l'est moins. Les activités réalisées en classe amènent l'enfant à prendre confiance en lui et à libérer la parole."
Des outils pour la vie
Le nombre d'enfants victimes de harcèlement scolaire est difficile à chiffrer, notamment parce que ce terme n'est pas toujours correctement appréhendé par les plus jeunes. "L'année passée, j'ai effectué une enquête auprès des enfants. 27% d'entre eux se disaient victimes de harcèlement. Ça correspond presque à la moyenne en Fédération Wallonie-Bruxelles", détaille Christel Paul, qui nuance toutefois. "Il ne faut pas nier qu'il y a du harcèlement mais il faut veiller à ne pas le banaliser à force de l'utiliser et s'en servir à bon escient."
Les implantations de Bouge et Beez sont les premières écoles communales de Namur à mettre en place le système KiVa. Cela ne signifie pas que rien n'est fait en la matière dans les autres établissements namurois, selon l'échevine de l'Enseignement, Patricia Grandchamps. "On prend la problématique à bras-le-corps via un groupe de travail réunissant enseignants et directions dédié au bien-être et dont la première mission touche au harcèlement, souligne-t-elle. Un budget a été consacré à l'engagement d'agents d'éducation. Ils connaissant bien les enfants et sont là notamment pour la prévention et déminer certaines situations."
D'après Isabelle Brouillard, secrétaire générale de l'Université de Paix, le système KiVa a fait ses preuves au niveau international. Jusqu'à présent, une quinzaine d'écoles prend part à ce projet-pilote et s'il est concluant, il pourrait se généraliser aux autres écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Caroline Désir a par ailleurs indiqué que 2 millions€ structurels ont été consacrés à la mise en place d'un programme-cadre en faveur de la lutte contre le harcèlement scolaire. 200 écoles par an en bénéficieront (sur les 2500 que compte la Fédération).
La reine a terminé sa visite en félicitant les enseignant(e)s impliqué(e)s dans ce projet et en informant les enfants qu'apprendre à utiliser ces outils maintenant était primordial car ils s'en serviront toute leur vie. "Tout ce qui touche aux émotions est tout aussi important que les acquis académiques", estime sa Majesté.