Ardoise salée pour infractions financières
Les dirigeants de fait d’un complexe de sociétés immobilières avaient été acquittés à Namur. La cour d’appel les a condamnés.
Publié le 10-06-2021 à 06h00
Le trio fut acquitté par le tribunal correctionnel de Namur, le 28 février 2020, pour de la délinquance en col blanc, dans le secteur de l’immobilier à Andenne. La période infractionnelle s’étendait, selon l’accusation, de janvier 2012 à avril 2014. Selon le procureur du Roi, toujours, le montant du butin s’élevait à quelque 550 000 euros. Les prévenus répondaient d’abus de biens sociaux, d’abus de confiance, de détournements d’actifs et de retard dans l’aveu de faillite, le temps de vider les avoirs des sociétés.
Il n’a pas fallu prier le parquet pour qu’il relève appel et l’affaire a abouti devant la cour d’appel de Liège qui a vu les choses autrement. Voyons ça dans l’ordre.
Un couple de Namurois avait érigé en 1999 un complexe de sociétés immobilières, imbriquées les unes dans les autres. Plusieurs années plus tard, ils seront rejoints par un quadragénaire espagnol qui deviendra lui aussi un dirigeant de fait de la pyramide de sociétés et d’agences immobilières. Michel P., né en janvier 1957, déclara cependant n’avoir perçu aucune rémunération pendant 15 ans. Puis, avec son épouse, ils auraient décidé de se rémunérer via une société anonyme ancrée dans le groupe. Selon leur version, ces rémunérations se sont élevées à 116 000 euros, entre janvier 2012 et juillet 2013.
Les juges d’appel ont considéré qu’il y avait nombre de manœuvres frauduleuses et que ces rémunérations constituaient un avantage illégal dans le chef des deux époux qui ont agi avec cynisme, alors que le groupe manquait de liquidités. Ils se sont servis illégalement et la prévention d’abus de biens sociaux a été déclarée établie.
Concernant les abus de confiance, la cour d'appel de Liège a relevé qu'en l'espace de quelques mois, le trio a retiré des fonds pour un montant global de 430 000 euros. Les trois prévenus se sont défendus en prétendant qu'ils s'étaient remboursés d'une créance qu'ils avaient sur une société du groupe. Ils ont récupéré ce pactole indirectement, au travers de deux autres sociétés. Aussi, les juges d'appel ont estimé que les prévenus avaient «usé des biens de la SA M.F. uniquement dans leur intérêt personnel, sans avoir égard aux intérêts patrimoniaux » de ladite société anonyme et de ses créanciers, «en retirant de son patrimoine d'importants fonds, alors que dans le même temps, ils la privaient de ses bénéfices et de sources très importantes de revenus.».
Les abus de confiance ont donc été déclarés également établis. Le trio s’est rendu coupable encore d’autres délits mais l’essentiel est dit. Sur le plan pénal, les peines de prison – de 8 à 12 mois – et les amendes prononcées à Liège sont couvertes par de larges sursis.
Par contre, les époux se voient confisquer chacun 150 000 euros, soit 300 000 euros à rembourser à la curatrice de la faillite qui obtient un total de 600 000 euros, à titre provisionnel, à débourser pour les trois prévenus. Sous le choc, le trio s’est tourné vers la Cour de cassation mais celle-ci n’y a rien entendu. Les peines sont définitives.