L'intégration sociale des étrangers: un travail au ralenti
Ces deux derniers mois, les initiatives d'intégration de personnes étrangères ont dû réduire ou suspendre leurs activités.
Publié le 17-05-2020 à 18h00
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Améliorer l'insertion de personnes d'origine étrangère sur le territoire: tel est le but du Service entraide migrants (SEM) et du groupe Alpha, deux organisations gembloutoises dont les membres ont naturellement été perturbés par la crise actuelle. Rencontre avec les coordinatrices de ces deux associations.
Que proposent habituellement vos services?
Maud Plumier (SEM): Nous nous chargeons de l'accompagnement de personnes d'origine étrangère (une centaine sur l'année). Celles-ci bénéficient de deux types de services: un accompagnement individuel sur des questions sociales (les mutuelles, les revenus, les écoles, les titres de séjour...) et une aide d'insertion professionnelle. Nous menons également plusieurs projets collectifs, dont celui d'un groupe de femmes, participant à diverses activités.
Natalie Van Wetter (ALPHA): Quant à notre groupe, il s'agit d'une école centrée sur l'apprentissage du français pour un public étranger. Nous donnons aussi des cours d'alphabétisation à un public belge et étranger, ainsi que des ateliers de citoyenneté. Ces cours se déroulent toute l'année, à destination d'une centaine d'apprenants qui bénéficient d'un suivi et d'évaluations régulières.
Comment le confinement a chamboulé vos activités?
M.P.: Nos projets collectifs ont été suspendus. Au niveau individuel, nous avons arrêté les permanences physiques, mais nous avons continué de conseiller nos membres par téléphone. Les situations urgentes pouvaient toutefois être traitées sur place, mais de façon limitée.
N.V.W.: De notre côté, nous avons fermé l'école le 16 mars, comme tous les établissements scolaires du pays. Notre première mission a été d'informer nos apprenants sur ce confinement (les raisons et les règles sanitaires), via des affichettes explicatives. Certains n'avaient pas compris la situation ou n'étaient pas au courant. Et pendant le confinement, nous avons organisé des cours à distance par visioconférence et par groupe réduit. Les apprenants pouvaient aussi nous envoyer des travaux. Une formatrice avait également créé une plateforme regroupant des exercices. La plupart avaient accès à ces outils, mais malheureusement pas tout le monde.
Certains diront qu'ils ont connu pire.
Comment vos membres et apprenants ont vécu ce confinement?
M.P.: Leur première préoccupation fut financière. Certains travaillent au noir ou vivent de contrats précaires qui s'arrêtent subitement. Nous avons aussi remarqué une fracture numérique. Interdits de contact avec l'extérieur, ils sont obligés de passer par Internet pour consulter les services dont ils ont besoin. Un sacré frein pour ceux qui ne parlent pas français, qui ne sont pas habitués avec les outils électroniques ou qui n'en ont simplement pas. Et enfin, beaucoup se sentent isolés dans leurs petits appartements. Heureusement, on maintient un lien social avec eux par téléphone. Ils s'accrochent vraiment à ça.
N.V.W.: Ceux qui viennent de pays en guerre ont eux aussi connu une forme de confinement, mais d'un autre genre, avec un ennemi visible. Ici, on est dans une situation similaire, mais sans l'apparence de violence tangible. Certains diront qu'ils ont connu pire. Mais ils sont confrontés à plusieurs problèmes, comme ceux qu'on vient d'évoquer. Ils quittent un pays en guerre, mais le sort s'acharne. De plus, ils pourraient subir des remarques racistes de personnes remettant la faute sur «les étrangers responsables du Covid» . De quoi les affecter encore plus.