VIDÉO | L’église où on change l’eau en bière
Dans l’ancienne chapelle du Piroy à Malonne, en région namuroise, on change désormais l’eau en bière. Le petit édifice de briques rouges menaçait ruine. Il connaît désormais une résurrection qui fleure bon le houblon. Grâce à la passion de Jean et Alex, les deux larrons.
Publié le 23-12-2017 à 16h00
La majestueuse salle de brasserie occupe le chœur. Impeccablement alignées sur les deux côtés de la nef centrale, les hautes cuves d’inox semblent former une haie d’honneur pour le visiteur. La brasserie du clocher, lancée il y a deux ans sur les hauteurs malonnoises, n’a pas oublié sa première vie. «Tout a démarré à Noël, en 2014, rappelle Alex Vandurme, le brasseur des lieux. Avec Jean (NDLR: Cheffert, l’autre fondateur), on s’est lancé le pari fou de brasser notre propre bière un an plus tard.»
Un premier miracle s’est produit quand ces deux passionnés ont appris qu’un appel à projets était lancé pour redonner une nouvelle existence à la chapelle du Piroy. «Elle n’était plus occupée depuis six ans, situe Jean Cheffert. La communauté locale y avait pourtant été fort active. Cette chapelle était très vivante. Visiblement, on n’y célébrait que les cérémonies joyeuses: baptêmes, mariages… mais jamais d’enterrement.» On y aurait même organisé un barbecue pour réunir les fidèles et amis de cette chapelle dédiée à Sainte-Philomène.
La structure de l’édifice s’est par contre montrée moins vaillante. «Le clocher s’inclinait dangereusement vers l’intérieur, décrit Alex Vandurme. Pour sécuriser les lieux, il avait été prévu d’étêter le clocher pour offrir moins de résistance au vent. Mais rien que pour les travaux les plus basiques, il fallait déjà 150 000€ et la fabrique d’église n’avait pas cette somme d’argent.»

Les autorités religieuses et civiles sont sur la même longueur d’ondes: Sainte-Philomène devra changer de vie, mais sa destinée ne sera pas confiée pour autant à n’importe qui.
Il y a de l’espace, de la hauteur, du cachet: les lieux, même en piteux état, enchantent Jean Cheffert et Alex Vandurme. «Nous avons soumis notre projet à la fabrique d’église, à l’évêché, au collège et au conseil communal. Ici, on brasse de la bière mais aussi du lien social. Les associations locales sont parties prenantes, on a pu compter sur une soixantaine de bénévoles durant les travaux, on garde aussi la porte grande ouverte. Ce côté participatif a convaincu les différentes autorités», insiste l’épicurien brasseur.
Il faudra six mois pour réunir toutes les autorisations et boucler l’acquisition. «Je pensais que ce serait un chemin de croix. Mais ce fut quand même moins terrible que ce que je ne craignais, reconnaît l’un des deux larrons. Notre projet permet de sauver un joli morceau de patrimoine villageois, sans que cela coûte aux finances publiques.» Pour la fabrique d’église comme pour la Commune, c’est finalement du pain béni.
Solide témoin: une cloche de 360 kilos
Aujourd’hui, la chapelle est devenue brasserie, mais elle a conservé son habit de briques rouges et sa silhouette caractéristique. «Mais on ne cherche pas à jouer sur ce caractère religieux: on ne veut pas se faire passer pour une bière d’abbaye.» Aux antipodes de l’option de Leffe où l’on brasse avant tout les millions d’euros.

Un fier héritage du passé religieux trône quand même en bonne place. En octobre 2015, pour les raisons de sécurité et de stabilité, la cloche a en effet dû être dépendue. «Elle pèse 360 kilos et date de 1880 (comme la chapelle) et elle est dédiée à Sainte-Philomène elle aussi. En fait, elle ne nous appartient pas. La généreuse donatrice l’avait léguée aux paroissiens et ces derniers nous l’ont confiée. Beaucoup d’entre eux sont d’ailleurs devenus des amis de la brasserie.» Sans devoir pour autant se convertir ni entrer dans les ordres du houblon. Les protégés de Sainte-Philomène ont toujours eu l’esprit très ouvert.

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