« Visions », avant les attentats au Burkina
Le nouveau directeur d’Hypothésarts, René Georges, est parti trois mois au Burkina Faso, pour un spectacle qui peut s’inviter en Belgique.
Publié le 27-01-2016 à 05h00
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«Visions.» René Georges ne le savait pas encore, mais le titre était prophétique. Le comédien et metteur en scène namurois ignorait que Ouagadougou, là où il a travaillé trois mois sur un spectacle parlant de tolérance, d’humanisme, serait la cible d’attentats meurtriers, le 15 janvier.
À l’heure où certains metteurs en scène préfèrent le confort cossu et convenu des théâtres parisiens, René Georges, grand aventurier de la scène, fou sans limite, a préféré embarquer dix acteurs et cinq membres d’équipe au Burkina Faso pour créer des «paysages humains» dans le pays aujourd’hui touché par le terrorisme. Il existe entre lui et l’Afrique une curieuse intimité. Presque une fascination. Le Profondevillois aime cette terre de soleil. Il l’a montré notamment depuis plusieurs années en s’associant au festival Esperanzah!, après plusieurs voyages sur le continent noir, aux côtés de groupes auxquels il voulait raconter la beauté belge et inviter au dialogue.
Les amis du Sud venus chez nous, c'est sur ce terrain africain qu'il a voulu créer son nouveau spectacle. Plusieurs mois de préparation. «Parce que je suis dans l'alternatif pour mes créations. Et puis on a du traverser Charlie Hebdo. Le Bataclan. C'est d'ailleurs juste après cette date du 13 novembre que nous devions partir. J'ai appelé l'équipe. Leur demandant s'ils voulaient monter dans l'avion. On me disait: on y va! Toute l'équipe était partante. » Comme dans un geste immédiat de révolution et d'espoir.
Le rituel contre le cartésien
Depuis la détresse européenne, l'équipe trouve la douleur burkinabé: « Le pays sortait d'un coup d'état, il fallait travailler en tenant compte du couvre-feu. »
Et c’est vers la sagesse locale que René Georges et son équipe se dirigent. «Visions» tutoie les rituels. Ceux qui guident la spiritualité du pays, et qui combattent «le cartésianisme absolu» de l’Occident. Fort d’un carnet d’adresses nourri sur les chercheurs de l’indicible, et après plusieurs mois de négociation, dans un tempo plus africain, il trouve le contact. Un anthropologue qui ouvre les portes. Deux ans de préparation. C’est lui qui permettra à la troupe de remonter d’un millier d’années, en immersion, pour comprendre comment le non-dit permet d’être mieux dans le présent. La sagesse du griot.
«Visions», qui porte bien son nom, raconte ce voyage entre le gravier que l'on foule et les esprits que l'on peut écouter. « J'ai l'impression de faire ici ma plus belle création». Le spectacle a été présenté là-bas, au Burkina Faso, sur le continent noir. Il doit encore aujourd'hui être accueilli chez nous. Des contacts ont été pris avec le directeur du Théâtre de Namur Patrick Colpé. On attend la réponse.