Danièle Denisty, la maman de Nafi Thiam: «Croyez-moi, elle a encore de la marge»
Impossible de réaliser une rétrospective de l’année 2017 sans évoquer l’incroyable parcours de la Rhisnoise Nafissatou Thiam.
Publié le 03-01-2018 à 06h55
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Depuis sa médaille d’or lors des Jeux Olympiques de 2016 à Rio, l’athlète a tout raflé sur son passage: amélioration des records personnels (lancer du poids ou encore 60 mètres haie), 1re au championnat d’Europe en salle (pentathlon) à Belgrade en mars 2017, troisième performeuse mondiale de tous les temps à l’heptathlon féminin de l’Hypo-meeting de Götzis en franchissant la barre des 7 000 points ou encore, pour terminer en beauté le 6 août dernier, le titre de championne du monde à l’heptathlon de Londres. Une première belge.
Connue jusqu’alors des Namurois mais méconnue au niveau national et international, Nafissatou Thiam est devenue en 2016 la référence de l’athlétisme belge. Cette année, elle a fait ce que chaque sportif a du mal à réaliser: confirmer.
Mais le succès ne lui monte pas à la tête, loin de là. Elle a toujours souhaité conserver une vie «normale» malgré l’or de Rio. Aujourd’hui, elle continue de s’entraîner en Belgique tout en étudiant la géographie à Liège. Elle est d’ailleurs en période d’examens. Raison pour laquelle ses manageurs ont préféré la ménager afin qu’elle consacre sa trêve hivernale à ses cours. Nous avons donc rencontré sa maman, Danièle Denisty. Elle nous raconte comment elle perçoit les incroyables résultats de sa fille tout en réussissant à combiner son sport et ses études à Liège.
Danièle Denisty, après l’or de Rio, votre fille a déclaré qu’il ne fallait pas attendre de nouveaux résultats de sa part, que rien n’était acquis. Pourtant, Nafissatou a réussi une année pour le moins extraordinaire. La force de votre fille ne réside-t-elle pas dans sa modestie, de rester les pieds sur terre?
Cette façon de penser est propre aux épreuves multiples. Même si elle réalise un excellent résultat à la hauteur lors d’un championnat, elle aura intérêt à ne pas se louper à la longueur si elle vise une médaille. Dans ce sport, il faut à la fois pouvoir réaliser de belles performances et, surtout, de ne pas se rater sur les autres épreuves durant deux jours. Elle a toujours été persuadée qu’elle pouvait s’améliorer dans chaque épreuve. Il faut également un brin de réussite.
La chance, peut-on encore l’évoquer?
Oui, il suffit que le javelot ne pique pas trois fois pour que le résultat soit nul. Mais ça, c’est mon côté plus pessimiste (rires). Roger Lespagnard, son coach, est beaucoup plus optimiste. Il est également important de prendre en compte les conditions climatiques. Elles étaient parfaites à Götzis contrairement à Londres, lors des Mondiaux. Elle a été championne du monde mais elle n’a pas réalisé de record.
Götzis restera pour vous le meilleur souvenir de l’année?
Sans aucun doute. Si elle a réussi à devenir la troisième performeuse mondiale de tous les temps en franchissant la barre des 7 000 points, c’est parce que, Götzis, c’est La Mecque pour les épreuves multiples. C’est une organisation extraordinaire, tout est pensé pour le confort des athlètes. Enfin, si Nafi y a réalisé une telle performance, c’est également grâce à la météo. Il faisait magnifique.
Vous pensez que votre fille est capable de faire encore mieux? Elle a déjà presque tout gagné à seulement 23 ans…
Je pense qu’elle peut encore s’améliorer dans certaines disciplines comme le saut en longueur, le 200 ou encore le 800 mètres. Et puis, l’âge idéal, c’est 25 voire 26 ans. Croyez-moi, Nafi a encore de la marge.
Et comment fait-elle pour réaliser de tels résultats tout en continuant son bachelier en sciences géographiques à l’Université de Liège?
C’est une question d’organisation. Et l’organisation est une de ses qualités. Et puis, Roger Lespagnard peut adapter son emploi du temps en fonction des horaires de cours. Ceux-ci sont également ajustés puisqu’elle ne réalise qu’une demi-année académique par an. Comme elle le dit toujours, ce qui lui manque, c’est du temps. L’université est également très compréhensive. Mais il est clair que la préparation, en cette période, n’est jamais optimale. Et puis, en Belgique, nous manquons cruellement d’infrastructures.
N’y a-t-il pas eu d’amélioration à ce niveau depuis l’or de Rio?
Je dirais que la médaille d’or de Nafi a permis de sortir l’athlétisme de l’ombre (voir encadré). Aujourd’hui, beaucoup d’amateurs savent ce que signifie le pentathlon ou l’heptathlon. C’est le cas pour Nafi même si elle bénéficie de davantage de facilités grâce à sa notoriété. En revanche, pour les autres, c’est loin d’être le cas. Je me souviens d’une compétition à Gand, en salle, où il y avait un concours de longueur avec… 85 minimes filles! Ce qui signifie qu’elles ne peuvent sauter que deux fois en raison de leur nombre. Et le temps d’attente entre chaque essai est inconcevable: 1 h 30 entre les deux sauts. Comment voulez-vous rester concentrer et réaliser une belle performance afin de pouvoir se qualifier pour un championnat? Il y a une trop grande demande par rapport aux différentes compétitions se tenant en Belgique. Les organisateurs sont, aujourd’hui, dépassés.