77 ans de bons et «aloyau» services

À Dhuy et Upigny, la famille Simon était au service de l'aloyau et du pâté de campagne depuis 77 ans. Mais le boucher vient de déposer les couteaux...

77 ans de bons et «aloyau» services
12961697 ©© EdA

La petite sonnette s'agite toujours avec le même entrain quand on pousse la porte vitrée. Et même à l'heure de la retraite, elle alerte encore Gérard Simon, le boucher de la place de Dhuy (Éghezée). Depuis des décennies, le charcutier du village surgit de son atelier pour venir servir, petit sourire dans le coin, ses clients, ses amis.

Mais voilà, depuis le 31 décembre, Gérard a remisé le tablier. «J'ai 65 ans et donc pas mal d'heures au compteur», rigole-t-il «Physiquement, le boulot est lourd et c'est surtout en fin de journée que cela commence à devenir pesant.Sans l'aide de mes deux filles, Catherine et Anne, j'aurais peut-être déjà arrêté il y a cinq ans.» Un boucher de village, ce n'est pas un fonctionnaire de l'alimentation.

«Ce ne sont pas des semaines de 38 heures mais quasiment de cent...» Le lundi, aux petites heures, Gérard prenait la route de l'abattoir. «J'ai connu Namur, Wavre, Jodoigne, Huy... Je les ai vus fermer les uns après les autres.» Le mardi, c'est le jour de la découpe. Mercredi, c'est Gérard, le charcutier, qui prend le relais et prépare les pâtés, boudins... «Avec toujours un oeil sur le thermomètre et le minutage des cuissons. Tout compte fait, c'est ça le plus délicat», signale-t-il. Les recettes, c'était déjà celle de son papa, Edmond, qui avait ouvert sa boucherie en 1933 (lire plus bas). «Il faut un bon dosage entre les épices traditionnelles : sel, poivre et noix de muscade.» Une équation qui évolue aussi avec les goûts de l'époque. «Quand j'ai repris, on mettait un kilo de sel pour 50 kg de saucisse. Aujourd'hui, on en met la moitié. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, les gens mangent moins salé qu'avant...» La grande force de la maison Simon, c'était ses interminables tournées dans les villages avoisinants. «On était attendu comme le facteur», explique l'homme qui a raccroché ses crochets. «C'était pas rare que les vieux clients me demandent de recharger le poêle.» La grosse évolution à travers les décennies de spiringues et d'oiseaux sans tête, ce fut le niveau d'exigence de la clientèle.

«Quand j'ai repris les tournées de mon papa au milieu des années soixante, c'était un peu le boucher qui faisait le menu des gens pour la semaine», explique-t-il. «Si on avait mis des côtelettes la semaine précédente, on mettait un rôti pour la suivante. D'ailleurs, les gens demandaient toujours : qu'est-ce que vous avez mis aujourd'hui? Plutôt que de s'assurer qu'on avait bien respecté les commandes. Évidemment, tout cela a rapidement changé.» Mais aujourd'hui les clients fidèles, les voisins, les amis de l'apéro dominical improvisé au coin du comptoir du boucher après la messe... Tous ceux-là auront un petit goût de trop peu, en ce début d'année. Pas facile de... boucher le vide, sur la place de Dhuy.

Pour accéder à cet article, veuillez vous connecter au réseau internet.
Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...