Des vols alimentaires. Et politiques?
Trois sans-papiers ont commis plusieurs méfaits. La résultante de l’indécision politique?
Publié le 19-05-2021 à 06h00
Hier, le tribunal correctionnel dinantais a revêtu des allures de cénacle politique lors de l’examen d’un dossier de vols commis dans la nuit du 19 au 20 février 2021, rue du Commerce à Ciney. Un débat nourri par les avocats de la défense bien décidés à dénoncer, derrière les agissements de leurs clients, ce qu’ils considèrent comme la résultante d’une coupable indécision en matière de politique d’accueil des étrangers en Belgique.
Sur le banc des prévenus, trois citoyens marocains tout juste majeurs. Ils sont en aveux de deux vols avec effraction: une tablette et de numéraire dans une sandwicherie et 80€ dans une friterie. Ils sont aussi prévenus d’un vol simple d’une valise d’outillage dans une voiture et de deux tentatives de vols dans une habitation et dans un Night and Day. Juste contestent-ils avoir formé une association.
La prison en guise d’eldorado
Leur présence à Ciney serait fortuite. Enjoints par le contrôleur de descendre à la première gare venue après avoir embarqué à Namur, ils ont atterri dans la capitale du Condroz. Sans ressources, ils invoquent leur souhait de trouver de quoi manger et un lieu pour dormir. D'où notamment cette tentative d'intrusion dans une habitation. «Sauf que l'habitante indique que vous l'avez menacée» rétorque la représentante du parquet, qui requiert deux ans de prison ferme à leur encontre.
Débute alors l'intervention des conseils de la défense qui, rapidement, élargissent le débat à tous ces sans-papiers qui croient en l'eldorado européen. Et qui, au prix de mille dangers, traversent la Méditerranée, transitent par l'Espagne. «Pour gagner finalement la Belgique qui a peut-être été décrite à ces damnés de la terre comme étant un pays de Cocagne» indique Me Sinne. «Mais où le politique n'ose pas prendre ses responsabilités dans le sens d'une fermeture radicale des frontières ou au contraire d'une aide systématique des gens qu'elle accueille. C'est cette absence de décision qui fait de nos clients, sans ressources, des auteurs d'infractions» plaident Mes Balaes et Toussaint. Et le trio d'avocats de plaider le sursis pour ce qui excède la détention préventive toujours en cours. Jugement le 8 juin.