De Sclayn au festival de Cannes, en passant par les lacs de l’Eau d’Heure, Paloma Sermon-Daï filme la pluie et le beau temps
Ce mardi 16 mai, le tapis rouge du festival de Cannes est déroulé. Parmi les films sélectionnés dans la Semaine de la critique, "Il pleut dans la maison", film à petit budget de la cinéaste andennaise Paloma Sermon-Daï, avec des comédiens en herbe et du cru et le décor des lacs de l’Eau d’Heure.
Publié le 16-05-2023 à 08h00
Avec son premier film, le documentaire Petit Samedi suivant les pérégrinations de son frère pour se sortir de ses addictions, l’Andennaise Paloma Sermon-Daï avait déjà marqué les esprits. Du grand public comme des professionnels, puisqu’ elle avait remporté le Bayard d’Or et le Prix Agnès au festival international du film francophone (FIFF) de Namur 2021 mais aussi le Magritte du meilleur documentaire et le grand prix du jury Diagonales du festival Premiers plans d’Angers.
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La belle histoire continue, puisque deux ans et demi après, la cinéaste sclaynoise revient avec Il pleut dans la maison, son premier long-métrage de fiction, mettant en scène notamment Makenzy et Purdey Lombet, frère et sœur originaires de Sclayn qui seront aussi sur le tapis rouge. Le film est sélectionné dans la prestigieuse Semaine de la critique, au festival de Cannes. Interview avant le départ.
Bonjour Paloma, le festival de Cannes, ça fait rêver. Vous y étiez-vous déjà rendue ?
Non, c’est la première fois. Forcément, il y a un peu de stress et beaucoup de préparation au niveau de la promotion, de la presse, des rendez-vous à fixer. C’est impressionnant comme événement.
Puis, c’est vrai, en vue de la montée des marches, on fait un peu de shopping. J’ai emmené mes deux acteurs faire les magasins, pour que nous coordonnions un minimum nos couleurs.
Comment avez-vous accueilli l’annonce de cette sélection ?
Pour tout vous dire, je suis d’un naturel timide. Quand les producteurs m’ont annoncé la nouvelle, dans leurs bureaux, ils ont peut-être été désarçonnés, parce que je n’ai pas fait des bonds de joie. En vérité, j’étais sous le choc. J’avais les larmes aux yeux.
C’était inattendu qu’un film tourné avec les moyens du bord se retrouve là ?
Complètement, d’autant plus que nous n’avons pas reçu beaucoup d’argent de boîtes françaises, que nous n’étions dans les dossiers de personne. Mais peut-être ce film rafraîchit-il le paysage ?
Il pleut dans la maison est en effet une production légère. Nous ne nous sommes pas éparpillés et avons tout tourné, l’été passé, en pleine canicule, pendant 25 jours. Le décor est resté le même: les lacs de l’Eau d’Heure, entre l’infrastructure touristique et la maison familiale.
Un petit budget, ça oblige à des choix ?
Je ne l’ai pas pris comme une contrainte mais comme une manière de booster la créativité, de développer les émotions avec peu d’artifices et en étant modulable. En pouvant réécrire ou retourner une scène différemment.

Avec une certaine urgence de tourner rapidement et légèrement ?
Passer tout de suite à un long-métrage de fiction, c’est compliqué. On vous conseille en général, d’abord, de tourner des courts. Moi, j’avais l’impression de maîtriser la narration d’un long.
Puis, Makenzy et Purdey Lombet, vos acteurs mais aussi membres de votre famille, ont 16 et 19 ans. Il ne fallait pas traîner pour qu’ils puissent encore coller à leurs personnages. D’ailleurs, Makenzy avait déjà été le héros de… Makenzy, un précédent court-métrage documentaire. Il pleut dans la maison serait-elle une suite ?
Pas vraiment. Ce sont deux œuvres différentes. Makenzy n’est pas du tout acteur, à la base, j’ai eu la chance de passer un an à ses côtés, pour le coacher.
Les héros que lui et sa sœur incarnent portent leurs propres prénoms.

Ce n’était pas voulu. Mais, après une année de travail, ils continuaient de se tromper dans les prénoms. C’était donc plus naturel de les garder. Même, ça donnait plus de force aux scènes dans lesquelles ils crient l’un après l’autre.
Il y a eu de l’improvisation dans ce tournage ?
Bien sûr, il y a eu la longue préparation. Mais le scénario tenait sur 60 pages, ce qui n’est pas traditionnel, et les dialogues n’étaient jamais écrits à 100%. Si je voulais partager mon histoire, mon adolescence, avec une certaine méthode documentaire pour donner lieu à une pure fiction, nous réécrivions les scènes pour rester au plus près de la façon de parler de Purdey et Makenzy, leur génération et leur langage. Nous formions une petite famille.
Il pleut dans la maison, c’est un titre plein de mystère.
C’est un titre naïf, une phrase que les héros pourraient prononcer. C’est en même temps une réalité: il pleut vraiment dans la maison. Mais il y a un paradoxe, c’est un film que je voulais solaire. Il n’a pas encore de date de sortie.
À Cannes, aurez-vous quand même de profiter ?
J’espère. Je crois que les premiers jours seront intenses mais j’aimerais voir les autres films de la compétition, notamment.
Le film aura droit à six séances réparties sur le vendredi 19 mai et le samedi 20 mai, la remise de prix aura lieu le mercredi 24 mai